jeudi 17 mars 2016

Laura Domenge "En Personne(s)"

Point Virgule
7, rue Sainte-Croix de la Bretonnerie
75004 Paris
Tel : 01 42 78 67 03
Métro : Hôtel de Ville / Saint-Paul

Seule en scène écrit pas Laura Domenge et Christian Lucas
Mis en scène par Christian Lucas

Présentation : Laura est une fille ? Une femme ? Quel tourment !
Qui suis-je ?... Cette quête existentielle est l’occasion pour l’humoriste de se glisser avec un grain de folie dans la peau d’innombrables personnages : psychanalyste, professeur de yoga, vieille dame « momophobe », gamine qui confond télé et réalité en passant par une racaille baby-sitter…
Rien ni personne ne lui échappe. A travers l’ensemble des personnages qu’elle interprète, avec humour et audace, la comédienne se joue des codes et d’elle-même et nous fait découvrir une Laura Domenge, en personne(s).

Mon avis : D’emblée très mutine avec son public, Laura Domenge nous dévoile immédiatement le contenu de son spectacle. Elle va tout autant nous parler d’elle et incarner des personnages. Tout cela avec, en fil rouge, sa difficulté à se situer : est-elle encore une fille, ou est-elle déjà une femme ? Très vite, on comprend que nous serons incapables de l’aider à lui fournir une réponse car elle va osciller sans cesse entre les deux âges. Sa tenue de scène elle-même est hybride. Je vous laisse la découvrir car il faut oser ce type d’association vestimentaire.


Tout repose donc sur cette dualité. Et elle en joue à la perfection. Y compris dans sa galerie de personnages qui va de la gamine de 7 ans à la mémé en passant par Gigi la femme mûre. Laura Domenge est cash, elle ne souffre visiblement d’aucune inhibition. Comme elle joue énormément de l’autodérision, en se moquant d’abord d’elle-même, elle peut sans vergogne titiller les spectateurs. Et, avec un sens de l’observation très incisif, elle ne s’en prive pas. Pour le plus grand plaisir de celles et ceux qui ne sont pas concernés…


Quand on est une « Sale gosse » (nom de la troupe dans laquelle elle a fait ses débuts) entre 10 et 13 ans, on en garde toujours un peu lorsqu’on aborde le one woman show quelques années plus tard. Ce qui m’a le plus impressionné chez Laura Domenge, c’est son métier, sa maîtrise de l’espace, son aisance sur scène, sa faculté à prendre différents accents, ses mimiques expressives, sa gestuelle pittoresque avec des postures très étudiées. Lorsqu’elle joue de sa féminité, elle le fait à la garçonne, pour ne pas dire à la hussarde. Elle s’en amuse. La minauderie, ce n’est pas son truc. Elle n’a peur ni des grimaces qui enlaidissent, ni du ridicule. Elle se donne à fond avec une gourmandise qui lui attire sans problème l’adhésion et la sympathie du public.


Son spectacle est très personnel. Elle y met beaucoup d’elle-même. Il est également bien écrit et bien construit. D’autant qu’elle a l’intelligence de le terminer en apothéose en interprétant le personnage de Gigi. Avec son accent parigot, façon Arletty, son langage argotique et imagé, ses attitudes théâtrales, elle nous offre en bouquet final un condensé de tout ce qu’elle sait faire. C’est très malin car ça nous laisse sur la plus joyeuse des impressions.

Je pense que Laura Domenge ne va cesser de progresser. Elle peut se reposer sur ses acquis d’excellente comédienne pour désormais affiner son écriture, la rendre encore plus insolente, plus provocatrice, plus corrosive. Elle en a largement le potentiel.


Gilbert « Critikator » Jouin

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