dimanche 19 novembre 2017

L'amour est dans le prix

Gymnase Marie-Bell
38, boulevard de Bonne Nouvelle
75010 Paris
Tel : 01 42 46 79 79
Métro : Bonne Nouvelle

Une comédie de Thierry Boudry
Mise en scène par Clair Jaz
Collaboration artistique : Pascal Légitimus
Lumières et scénographie de Steve Moune
Costumes de Matteo Porcus

Avec Emmanuelle Clove (Suzanne), Christophe Guybet (Alex), Vanessa Féry (Fanny), Pierre Diot ou Alexandre Pesle en alternance (Le patron), Izabelle Laporte (Carole), Jérémie Poppe ou Charlie Costillas en alternance (L’associé)

L’histoire : Comédie sentimentale inspirée d’une histoire vraie.
Trois hommes et trois femmes d’aujourd’hui. Une mère extravertie, une fille en mal d’amour, un gendre pas idéal, un mari qui s’interroge, un amant qui délire, une maîtresse bipolaire.
L’histoire commence à la croisée des chemins, au point crucial de leurs vies et de leurs envies. Une quête : le bonheur…

Mon avis : Avec le recul, je me demande si cette pièce n’aurait pas pu également s’intituler : « La mort est dans le prix »… En effet, d’une part l’histoire commence dans une agence de pompes funèbres et, d’autre part, il y est question à un moment donné d’un décès « par accident » qui a son importance. Mais, il faut être objectif, l’amour est tout de même plus vendeur que la mort pour une comédie, aussi grinçante fut-t-elle.
Parallèle avec le clin d’œil adressé à la célèbre émission de M6, « L’amour est dans le pré », il est ici beaucoup plus question d’amour vache que d’amour romantique. Tout tourne autour des relations hommes-femmes, relations qui tiennent plus de l’affrontement que de l’harmonie.


Fidèle à mon engagement, je veux exprimer le plus honnêtement possible mon ressenti en découvrant cette pièce. J’ai trouvé le début plutôt poussif et un tantinet bavard. J’étais même navré devant les blagues à deux balles, faciles et éculées, de l’employé des pompes funèbres. J’étais d’ailleurs sur le point d’arrêter de prendre des notes lorsqu’est survenue la scène entre Suzanne, sa fille Carole et son gendre. D’un seul coup, l’humour a monté d’un cran. J’ai été tout de suite émoustillé par la personnalité de cette belle-mère indigne, son franc-parler, son cynisme. La prestation très convaincante d’Emmanuelle Clove m’a fait reprendre mon stylo.


A partir ce cette scène-règlement de comptes, la pièce n’a plus cessé de monter en puissance. Les caractères et les motivations différents protagonistes ont commencé à s’affirmer. On découvre une Fanny exigeante, manipulatrice, brutale parfois… Alex se vautre dans la mauvaise foi avec un naturel confondant et on devine que les textos qu’il ne cesse d’échanger ne sont pas aussi professionnels qu’il le prétend… Carole piétine soudain sa soumission chronique pour se métamorphoser en séductrice affamée…
Il n’y a que le patron qui, pour moi, reste une énigme avec son comportement bizarre et sa façon de vouloir être à la fois juge et arbitre dans les relations sentimentales de ses associé et employé. Je ne comprendrai les raisons de cette attitude qu’à la toute fin de la pièce (respect à Alexandre Pesle pour sa talentueuse duplicité).


Se succèdent alors deux tableaux qui, à eux seuls, constituent deux vrais grands moments de drôlerie, tant dans le jeu des comédiens que dans l’inventivité de la mise en scène : celui du restaurant, propice à nous offrir un rebondissement assez inattendu ; et celui de la parodie du combat de boxe. Cette scène est tellement riche en trouvailles qu’elle frise l’anthologie. C’est un véritable sketch, très visuel, très rythmé et parfaitement maîtrisé par des combattants qui se rendent coups pour couples et pour qui la fin justifie les (poids) moyens.

Et puis survient l’ultime révélation ! J’ai alors compris que je m’étais bien fait avoir, que j’avais été mené par le bout du nez par un scénario particulièrement retors. D’un seul coup, je me suis mis à rembobiner tout le spectacle et tout m’a paru plus clair. Malin, l’auteur ! Vicieux, même... Vue cette fois dans sa globalité, sa pièce prend une toute autre tournure. Et lorsque le rideau est tombé (c’est une image car il n’y a pas de rideau), on se surprend à réfléchir assez longtemps au message contenu dans cette comédie humaine. C’est assez rare pour être souligné.


Lorsqu’on aura dit que les quatre chaises devraient être citées au générique pour leur implication dans les scènes les plus importantes, que la mise en scène est nerveuse, originale et inventive, que, comme d’habitude les femmes sont vraiment plus fûtées et que les hommes sont agaçants de naïveté, on peut se permettre de conclure que, dans cette pièce, l’humour (noir) est aussi dans le prix…

Gilbert « Critikator » Jouin

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