mardi 27 septembre 2011

Le Paradis sur terre


Théâtre Edouard VII
10, place Edouard VII
75009 Paris
Tel : 01 47 42 59 92
Métro : Opéra / Madeleine / Auber

Une pièce de Tennessee Williams
Adaptée par Jean-Michel Déprats
Mise en scène par Bernard Murat
Décors de Nicolas Sire
Avec Johnny Hallyday, Audrey Dana, Julien Cottereau

L’histoire : Mississippi, années 60. Le cyclone menace. Dans une ferme du delta, deux demi-frères s’’affrontent. Ils se disputent la maison… et la femme. Tout autour, les eaux montent…

Mon avis : Avant d’aborder la prestation des comédiens proprement dite, parlons de la scénographie très originale qui sert de générique. On est au cinéma… Un homme, grand et brun, rentre chez lui à pied. En route, il croise un couple de fermier à bord d’une camionnette. Ils fuient le delta parce que l’inondation menace. Lui, il n’en a cure. Ce ne sera pas la première fois qu’il fera face aux éléments. Il tient à sa maison, pas question pour lui de l’abandonner, c’est son seul bien… Il pénètre chez lui. Et le film s’efface pour laisser place au théâtre…
Un jeune couple fraîchement marié – elle porte encore sa robe de cérémonie – entre à son tour dans un salon qu’en gloussant elle trouve très « raffiné ». Son compagnon ne semble pas partager son enthousiasme. Le garçon s’affale dans un canapé, apparemment épuisé. Il subit avec une totale indifférence l’extrême exaltation de sa jeune épouse. Elle, amoureuse et débordante de sensualité, cherche à le provoquer, à l’exciter. Mais il reste de marbre. Jusqu’à ce qu’un bruit parvienne de la cuisine interrompe le babil et les câlins de la jeune femme…
Et là, il faut parler du décor. Le salon pivote sur lui-même pour faire place à la cuisine. C’est aussi ingénieux qu’efficace. Car ces deux pièces, surmontées d’une chambre à coucher en mezzanine, vont aussi avoir leur rôle à jouer…

Le Paradis sur terre va voir s’affronter trois personnages totalement dissemblables dans un huis-clos violent et étouffant. Plusieurs menaces pèsent sur leurs têtes : l’inondation bien sûr, imminente, et la mort, car Loth, le jeune marié, est miné par la tuberculose. Il y a donc un sentiment d’urgence. Tiraillée entre les deux hommes, comment la jeune femme va-t-elle s’en sortir ?

Venons-en maintenant à ce qui fait que cette pièce bénéficie d’une attraction toute particulière : la présence de Johnny Hallyday pour la première fois sur les planches d’un théâtre… Et bien sans complaisance aucune, il tire formidablement son épingle du jeu. Il est en tout point impeccable et… crédible. Le seul reproche que je lui ferai c’est, parfois, de crier un peu trop fort (mais c’est peut-être là le vouloir du metteur en scène). Je crois qu’il serait encore plus menaçant s’il ne s’emportait pas. En dehors de cette infime remarque, il n’y a qu’à saluer une performance vraiment remarquable. Pour interpréter Chicken le Métis, Johnny s’est teint en brun. Ce qui lui permet aussi de s’éloigner de son image blonde de rock star. Très vite, j’ai oublié le chanteur pour ne plus voir qu’un acteur. Et un bon ! Il est sobre, il est juste, autant dans le ton que dans le geste. Il s’est véritablement approprié le personnage de Chicken. Dans sa violence (il se dégage de lui une force animale impressionnante et sans doute très attirante aussi pour une jeune femme), mais aussi dans la vulnérabilité que le sang noir qui circule dans ses veines lui a communiquée. Rejeté par la société, il n’a d’existence propre que dans SA maison. Une maison qui ne lui appartient hélas pas tout-à-fait. C’est là le nœud gordien de l’intrigue. Johnny a là un rôle à sa (dé)mesure. Sur une scène, il est sur son terrain de jeu de prédilection. C’est là qu’il se sent le mieux. Il est chez lui. Le voir ainsi évoluer aussi à l’aise, est une des très bonnes surprises de ce drame tennessien. On peut regretter qu’il ait pris quelques années car il serait fantastique dans la reprise de son spectacle musical Hamlet. Il en a aujourd’hui l’envergure et le potentiel…

En même temps, Johnny ne serait pas si bon s’il ne bénéficiait pas de la présence d’une comédienne proprement époustouflante en la personne d’Audrey Dana ! Quelle générosité ! Quel abattage ! Quelle prise de risques ! Elle est en permanence border line. Son personnage est un robinet à paroles. C’est comme ça qu’elle existe ; en parlant. Quitte à dire n’importe quoi et surtout des bêtises. Naturellement provocante dans ses tenues affriolantes, avec juste un poil de vulgarité, elle fait inévitablement penser aux starlettes des années 60… Plus encore que Johnny, elle est la vedette de cette pièce. Si elle n’est pas nommée pour les Molières, je n’y comprendrais plus rien.

Quant à Julien Cottereau, il est le parfait opposé de Johnny. Il campe un fi-fils à sa maman maniéré, souffreteux, fragile, et en même temps manipulateur. Il exerce sur sa jeune épouse un chantage éhonté. L’opposition entre les deux demi-frères est spectaculaire.

Avec le choix de ces trois comédiens, on ne peut que souligner la perfection du casting. Après l’avoir vue, on a du mal à imaginer cette pièce avec quelqu’un d’autre. On vit donc une fois encore – merci à cette belle rentrée – un grand moment de théâtre.

Maintenant, on ne peut passer sous silence la présence dans le public de dizaines de fans venus applaudir leur idole. A un moment, Johnny se met à fredonner une petite ritournelle en empoignant une guitare. C’est immédiatement l’hystérie. Certains font l’amalgame entre le personnage de Chicken et l’interprète de Toute la musique que j’aime. C’est une sacrée faute de goût. J’en ai vu aussi qui, malgré l’interdiction formulée avant le lever de rideau, qui ne pouvaient s’empêcher de sortir leur appareil photo pour immortaliser Leur Johnny dans ce nouvel exercice. En même temps, même si c’est parfois un peu irritant, il y a ce côté définitivement sympathique du lien qui unit Johnny à ses fidèles. Ils se méritent l’un et les autres car ils ne trichent pas. Ni lui, ni eux...

L'Ouest solitaire


Théâtre Marigny
Salle Popesco
Carré Marigny
75008 Paris
Tel : 0 892 222 333
Métro : Champs-Elysées Clémenceau

Une pièce de Martin Mc Donagh
Adaptée et mise en scène par Ladislas Chollat
Avec Bruno Solo (Valene), Dominique Pinon (Coleman), Pierre Berriau (le père Welsh), Elsa Rozenknop (Girleen)
Décors d’Emmanuelle Roy
Costumes de Christiane Chollat et Doby Broda

L’histoire : A Lennane, petit village perdu au Nord-ouest de l’Irlande, les deux frères Connor, Coleman et Valene, viennent d’enterrer leur père avec qui ils vivaient jusqu’alors. Sans réelles activités, si ce n’est celles de regarder la télé ou de feuilleter des magazines, sans aucune relation sentimentale ou familiale, ils se retrouvent face-à-face dans leur modeste maison pour gérer le quotidien.
Pour une raison encore mystérieuse au début de la pièce, à l’un, tout a été légué, à l’autre, rien.
La haine que les deux frères ressentent l’un pour l’autre depuis l’enfance éclate avec une telle force que le prêtre du village, le père Welsh, a bien du mal à empêcher le pire…

Mon avis : Voici une pièce particulièrement éprouvante dans laquelle, paradoxalement, on rit très fréquemment. Certes, ce n’est pas du grand rire frais à se taper sur les cuisses. Nous ne sommes pas dans la gaudriole. Cette balade irlandaise aux accents tragi-comiques nous confronte à travers ses quatre protagonistes à la vie étriquée et un peu sordide d’un véritable quart monde. Les deux frères Connor ne s’embarrassent pas de fioritures. Quand ils s’expriment, ils utilisent un langage direct, abrupt, cru et, involontairement, très imagé. Nourries sur le terreau de l’animosité, voire de la haine, les répliques sont assassines. Les insultes fusent. Et comme ils sont particulièrement limités, ce sont toujours les mêmes injures qui giclent. Leur préférée étant « espèce d’enculé de pédé de puceau ». Difficile d’être plus exhaustif !

Bien qu’adultes, Coleman et Valene sont restés deux sales gosses frustres er primaires. L’aîné, Coleman, est particulièrement teigneux et sournois. Il n’a que des défauts. On ne sent pas chez lui une once de générosité ou de commisération. Il n’aime que lui ; il ment comme il respire, cherche en permanence à faire le mal. Et lorsqu’il ne trouve plus d’argument, il n’a d’échappatoire que dans la violence… Valene est un peu plus ambigu. Il est affublé d’une bigoterie bizarre, quasi mystique, qui le pousse à collectionner les figurines saintes. Son plus gros vice, c’est la radinerie. Tout ce qu’il possède, il le marque d’un grand « V » au feutre indélébile. Indélébile comme l’est sa méfiance vis-à-vis de son propre-à-rien de frère.
On assiste à une espèce de combat de chiens avec, pour arbitre, le père Welsh, un prêtre doux, empli de doutes et totalement dépassé par la mentalité de ses ouailles, par autant de misère, par autant de méchanceté chronique.
Du début à la fin, j’ai été pris aux tripes par cet affrontement étouffant. Il faut dire que la prestation de Dominique Pinon et Bruno Solo vaut le déplacement. Pinon est complètement habité par son personnage. Il a adopté une voix éraillée, vulgaire, une gestuelle peu ragoûtante. C’est un vrai affreux. Une fois encore il est magistral… Bruno Solo, lui, compose donc un personnage plus nuancé. On ne dira pas plus sympathique car lui aussi ne vaut pas tripette. Il a un vrai mauvais fond. Il est calculateur, rancunier et vindicatif. Mais il est juste un degré en dessous de son frangin sur l’échelle de la méchanceté pure.

Coleman et Valene sont deux très beaux rôles pour des comédiens. Forts et éprouvants. Très physiques… Dans la salle retentissent ça et là des petits rires brefs et nerveux. Parfois on entend même un petit cri d’horreur à peine étouffé.
Pierre Berriau, dans le rôle du prêtre, joue sur le registre de la fragilité, de la sensibilité. Sa foi, qui est indéniable, est considérablement ébranlée par une sauvagerie ambiante qu’il ne comprend pas et rejette. Sa grande mansuétude est petit-à-petit érodée par la férocité aveugle de ces deux crétins. Il est tellement obnubilé par sa tentative de sauvetage de ces deux âmes perdues qu’il néglige l’appel au secours, l’appel à l’amour de Girleen. Sous son apparence dévergondée, derrière une vulgarité qui est en fait de l’autodéfense, se cache une fille perdue. Il en faudrait peu pour qu’elle soit sauvée. Mais dans cet ouest-là, dans ce no man’s land déshérité, le destin ne fait pas de cadeau.
Dans cette pièce, la tension ne cesse de monter. On se demande jusqu’où ces deux énergumènes vont aller pour résoudre leurs différends. Leur profonde amoralité est une sorte de cancer qui les ronge, qui s’offre une apparente rémission vers la fin de la pièce… Et puis… Et puis je ne vous en dirai pas plus.

Par la grâce de deux comédiens totalement investis, on vit un grand moment de théâtre dans la très agréable salle Popesco du théâtre Marigny ; agréable en raison de la proximité que l’on a avec les acteurs. Ils nous cueillent à bout portant… Bien sûr, mieux vaut aimer un certain humour noir et désespéré pour jouir pleinement de cette tragédie. Personnellement, je vous la recommande vivement.

vendredi 23 septembre 2011

André le Magnifique


Théâtre Michel
38, rue des Mathurins
75008 Paris
Tel : 01 42 65 35 02
Métro : Havre-Caumartin / Auber

Une comédie écrite par Isabelle Candelier, Loïc Houdré, Patrick Ligardes, Denis Podalydès, Michel Vuillermoz avec la complicité de Rémi De Vos.
Mise en scène par Didier Caron
Décors de Sébastien Barbaud
Costumes de Nathalie Cognoquatorze plus tard
Avec Didier Caron (André), Didier Constant (Alexis), Jean Fornerod (Norbert), Marie-Hélène Lentini (Janine), Xavier Letourneur (Jean-Pascal Faix)

L’histoire : Pour sauver leur petit théâtre de la destruction, le maire d’un village du Gers et sa femme décident de monter une pièce retraçant l’épopée héroïque du Chevalier Saint-Germaine. Ils engagent alors un comédien professionnel en provenance de Paris pour interpréter le rôle du Chevalier, aux côtés de comédiens amateurs qui sont les employés municipaux…

Mon avis : Attention succès ! Cette pièce créée en 1997 a remporté l’année suivante 5 Molières ‘Meilleur spectacle, Meilleure pièce, Meilleur auteur, Révélation féminine, Révélation masculine) et 2 nominations.
Très bonne idée donc que de la reprendre quatorze ans plus tard avec une toute nouvelle distribution car, de nouveau, la magie opère. Voir et entendre une salle secouée de rires incoercibles est un pur bonheur. Et si cette bouffonnerie hilarante fonctionne, elle le doit au quintette de comédiens qui assurent la relève de leurs glorieux aînés. Ils sont impayables ces cinq là. C’est plus leur jeu que l’histoire qui nous fascine. Chacun dans son registre exécute un numéro de haute voltige. Analysons-les dans l’ordre de leur entrée en scène.

Didier Caron, non content d’assurer la mise en scène, endosse le rôle délicat d’André. Pour le concrétiser il s’est construit de A à Z un personnage. Il marche les pieds en dedans, il est emprunté avec ses bras (il les croise souvent en signe de perplexité), il est hésitant, lunaire, il souffre d’un décroché de mâchoire chronique, mais en même temps c’est quelqu’un de scrupuleux, de foncièrement honnête et qui est plein de bon sens. Il ne faut pas chercher à lui en raconter ou à le mépriser… Dans sa candeur fragile, dans sa totale sincérité, il fait parfois penser à Bourvil.

Didier Constant apporte au personnage d’Alexis, le maire du village et auteur de la pièce, tout son sérieux. C’est un brave homme, profondément humain, tout entier investi dans sa mission. Par la force des choses, il est l’homme orchestre de cette opération sauvetage. Il est aussi très touchant. D’abord lorsqu’il entend les mots qu’il a écrits proférés par un acteur professionnel. Ensuite, quand il croit que son amour est menacé. Il déclenche en nous un réel sentiment de sympathie.

Jean Fornerod est Norbert. Des Norbert comme celui-ci on a tous rencontrés. C’est un employé municipal un peu simple, un homme à tout faire dévoué et plein de bonne volonté, en quête permanente de reconnaissance, mais qui est habité par une susceptibilité maladive. Par son souci d’exister, avec ses initiatives plus ou moins judicieuses, il est aussi énervant qu’attachant.

Xavier Letourneur ne joue pas Jean-Pascal Faix. Il EST Jean-Pascal Faix tant il est impressionnant de véracité (et de voracité). Quelle prestation ! C’est le cabot dans toute sa splendeur. Il est pédant, prétentieux, grandiloquent à en devenir insupportable. Tel un paon, il se gonfle d’importance. Il sait qu’il a une certaine prestance qui en impose à ces « ploucs ». Et puis il a cette voix, organe tumultueux et rugissant qui impressionne ces braves gens. Alors, sans scrupules, il va user et abuser de son aura… Néanmoins, quand il s’aperçoit qu’il a été trop loin, qu’il s’est montré trop odieux, il va parfois faire preuve d’une certaine fragilité.

Seule femme de la pièce, Marie-Hélène Lentini tient un rôle clé. Non seulement Janine est l’épouse du maire, mais elle est aussi la partenaire de Jean-Pascal Faix. Elle a un personnage tout en finesse. Même s’il lui arrive d’être troublée par la cour éhontée que lui fait son creux chevalier, elle garde les pieds sur terre. Avec sa tirade, dont je vous laisse le plaisir de la découverte, elle s’est vue offrir un sacré morceau de bravoure qui frise l’anthologie. On peut parler de véritable performance.

Cette pièce a des accents et des répliques dignes d’un Marcel Pagnol du Sud-ouest. Il y a et l’ezagération et la tendre humanité, le burlesque, le loufoque, et les sentiments. On peut aussi citer quelques effets spéciaux propres aux grosses productions, à savoir des changements de décors à vue et la présence sur scène d’animaux domestiques (une vache) ou sauvages (un ours). C’est dire le budget ! En tout cas, on se paye une sacrée tranche de rire, d’un rire frais et spontané de gamin qui fait vachement du bien. Mais quels comédiens !!!!... Et si les Molières 2012 remettaient ça ? Ce serait magnifique pour André...

Simplement complexe


Comédie de Paris
42, rue Fontaine
75009 Paris
Tel : 01 42 81 00 11
Métro : Blanche

Une comédie de Philippe Elno
Mise en scène par Pierre-François Martin-Laval
Avec Philippe Elno (Christophe), Denis Maréchal (Norbert), Fabienne Galula (Natacha)

Synopsis : Christophe a une vie palpitante… sur internet ! Il y a même rencontré l’amour. Seulement voilà, le « net » est en panne. Et Norbert, technicien chez simplecom.com, ne peut rien faire pour rétablir le contact. Emu par la détresse de son client, il va tout mettre en œuvre pour sortir du virtuel une histoire qui peut vivre et tenter d’aider le destin d’une rencontre sans point com…

Mon avis : J’avais déjà beaucoup aimé L’Abribus la précédente comédie écrite et interprétée par Philippe Elno. Cet homme a un univers très personnel, plein de tendresse, de poésie, de cocasserie aussi et surtout.
Pour moi, Philippe Elno est le fils caché que Pierre Richard aurait eu avec Pierre Etaix. Simplement complexe, c’est Le Distrait qui joue au Soupirant… Mais les temps ont changé. Les fantasmes, le romantisme s’expriment aujourd’hui sur le net. On communique, on se répand, on ose et on tombe amoureux sans se connaître du tout. Chacun peut se construire son double idéal et s’offrir des vies palpitantes par procuration.

C’est le cas de Christophe. A peine sorti de son divorce et installé dans sa nouvelle garçonnière mansardée, qu’il tente de reprendre le lien qu’il a tissé sur la toile avec Natacha. Las, son serveur, Simplecom.com, n’a pas enregistré son changement d’adresse. Et le pauvre est déconnecté de son irréalité. Après avoir tenté en vain de résoudre son problème par téléphone, c’est l’irruption de Norbert, un technicien en chair et en os qui va bouleverser ses plans les plus intimes.
Cette comédie ne cesse de monter en puissance au fur et à mesure que le plateau se peuple. C’est facile, on peut la diviser en trois parties : 1/ Christophe se débat dans un entretien kafkaïen avec les gens de Simplecom.com. 2/ Norbert tape l’incruste, se prend d’affection pour son client et prend carrément les choses en main. 3/ Natacha fait son apparition…
La situation est banale, toute simple. Christophe, Norbert et Natacha sont des gens comme nous, emberlificotés dans leur quotidien, dans leur petite vie chafouine. Ils sont tous les trois un peu paumés. Leur association va alors décanter la crise qu’ils vivaient sans trop en avoir conscience. Chacun va être un révélateur pour l’autre. Il y a beaucoup d’humanité dans cette pièce. On s’attache à nos trois antihéros, si gauches, si peu armés, si fragiles. Christophe le doux rêveur, et le pragmatique Norbert, vont se sentir soudain plus forts grâce à l’autre. Le duo fonctionne admirablement.

S’il fonctionne si bien, c’est par la grâce des comédiens. Pour jouer des gens aussi quelconques, il faut à la fois faire preuve de beaucoup de recul et de subtilité. Ils ne tombent jamais dans la caricature. Confondants de naturel, ils existent réellement. On s’attache tout de suite à eux tant ils sont sympathiques et touchants.
Philippe Elno et Denis Maréchal se livrent à un superbe numéro de duettistes qui n’est pas sans rappeler les meilleurs tandems du grand écran. Sauf que là, ce sont deux losers qui unissent leur vulnérabilité. Ils sont justes, ils n’en rajoutent pas pour faire des effets. Tout repose sur l’efficacité d’un texte truffé de bonnes répliques… Et puis il y a Fabienne Galula. Avec sa voix pointue, son manque d’assurance, ses gestes empruntés, sa candeur et son franc-parler involontaire, elle se met illico au diapason de ses deux partenaires. Et on se sent bien en compagnie de ces trois paumés en mal d’amour. Nous sommes entre gens normaux.
Simplement complexe est une des belles et bonnes surprises de cette rentrée pourtant très chargée. C’est frais, c’est poétique, c’est naturellement drôle. On sort avec la banane de la Comédie de Paris.
Enfin, si cette comédie est particulièrement réussie, la mise en scène de Pierre-François Martin-Laval (le PEF des Robins des Bois) y est pour beaucoup. Il faut dire que son univers est très proche de celui de Philippe Elno. Ces deux là parlent le même langage et cela se ressent.

jeudi 22 septembre 2011

Le Songe d'une nuit d'été


Théâtre de la Porte Saint-Martin
18, boulevard Saint-Martin
75010 Paris
Tel : 01 42 08 00 32
Métro : Strasbourg Saint-Denis

Une pièce de William Shakespeare
Mise en scène par Nicolas Briançon
Décors de Bernard Fau
Costumes de Michel Dussarat
Avec Lorànt Deutsch (Puck), Mélanie Doutey (Titania), Yves Pignot (Bottom), Marie-Julie Baup (Héléna), Davy Sardou (Démétrius), Nicolas Briançon (Obéron), Laurent Benoit, Ofélie Crispin, Dominique Daguier, Thibault Lacour, Léon Lesacq, Maxime Lombard, Thierry Lopez, Jacques Marchand, Elsa Mollien, Carole Mongin, Maurine Nicot, Jessy Ugolin, Anouk Viale, Floriane Vincent.

L’histoire : Lysandre veut épouser Hermia ; Hermia veut épouser Lysandre… Donc tout va bien. Et bien non… car Egée, le père d’Hermia, la destine à Démétrius, dont Héléna est amoureuse.
Pour échapper à Egée, Lysandre et Hermia s’enfuient dans la forêt, poursuivis par Démétrius, lui-même poursuivi par Héléna. Pendant ce temps, dans la forêt, Oberon, roi des Elfes, a ordonné à son fidèle Puck de verser une potion magique sur les paupières de sa maîtresse Titania pour la punir de sa désobéissance. Mais Puck se trompe et verse cette potion sur les paupières des jeunes amants… Ceux qui s’aimaient se détestent… Et vice-versa… Ajoutons à cela une bande de comédiens amateurs venus répéter leur pièce dans la forêt. S’en suit la confusion la plus totale. Puck va tout faire pour réparer son erreur et pour que tout rentre dans l’ordre.

Mon avis : Et bien, mon sentiment est partagé.
J’ai eu un petit problème. Autant mes yeux furent enchantés, autant mes oreilles ne le furent point… Je m’explique.
On va donc préalablement aborder ce souci et ensuite on ne parlera que de ce qui est franchement positif et emballant dans cette pièce… Paradoxalement, j’ai souffert avec le texte de Sir William. Trop riche, trop dense, trop foisonnant, trop allégorique, trop métaphorique. Les éléments, la faune, la flore, tout y est trop abondamment traité. Au détriment, bien sûr de l’action. Il y a quelques monologues – bien sûr superbement écrits et remarquablement dits – qui cassent le rythme. Niveau analyse de texte, c’est super, mais à cette époque où la zapette est reine, on aime bien aller à l’essentiel. Face à cette logorrhée, on a tendance à décrocher pour n’en retenir que la mélodie sans trop écouter les paroles. Mais, rassurez-vous, cela ne nuit aucunement à la compréhension. Même si l’histoire, faisant la part belle à la magie et au surnaturel, est quelque peu abracadabrantesque, on la suit sans effort et avec un certain amusement… Un critique pisse-froid reprochait à Mozart d’utiliser trop de notes, ici on peut faire grief à Shakespeare d’utiliser trop de mots…
Ce sera là ma seule critique négative à l’encontre de ce spectacle qui, sur le plan justement purement spectaculaire, m’a emmené au ciel.

Nicolas Briançon nous offre un formidable « wood movie ».
Dans une forêt joliment stylisée vont s’ébattre pour notre plus grand plaisir une vingtaine de personnages. L’action se passe à une époque franchement connotée : les années 70. Et là, il faut saluer bien bas l’esthétique des costumes recréés par Môssieu Michel Dussarat. C’est Courrèges qui a rencontré le Grand Magic Circus. D’ailleurs la mise en scène si follement créatrice et imaginative de Nicolas Briançon, Jérôme Savary ne l’eût point désavouée. Comme je l’ai signalé en préambule, on en prend plein les mirettes. Elle était vraiment superbe cette mode des Seventies. Surtout pour les femmes. Il y a également un clin d’œil assumé (l’affiche l’annonce) du côté de Chapeau melon et bottes de cuir. Quant à Obéron, que joue Nicolas Briançon lui-même, il a un petit côté Orange Mécanique qui donne le frisson… Sincèrement, les costumes sont très, très beaux.

Le premier tableau, dans une homogénéité de noir et blanc est aussi superbe qu’inattendu. On comprend plus tard qu’on a affaire à des fées.
L’histoire, que l’auteur a voulue confuse, se complète de façon gigogne par une pièce dans la pièce avec la présence d’une troupe de comédiens (très) amateurs. Leur première apparition, rideau baissé, est un grand moment de drôlerie car ces cinq gaillards sont particulièrement hauts en couleurs. Yves Pignot, dans le rôle de Bottom est à lui seul un spectacle. Quel prodigieux cabot ! Quelle présence et quelle autodérision. Du grand art.
Il y a une autre comédienne qui, à mon goût, tire magnifiquement son épingle du jeu. C’est Marie-Julie Baup, dans le rôle d’Héléna. Chacune de ses apparitions est un enchantement. Elle apporte un petit plus indéniable. Son naturel est confondant, son jeu très moderne.
Mais tous les protagonistes de ce Songe sont en tous points excellents.
Lorànt Deutsch, lutin bondissant et facétieux, est un Puck parfait. Mélanie Doutey est belle, fraîche et mutine à souhait. J’ai beaucoup apprécié le jeu très convaincant des acteurs qui incarnent Lysandre, Hermia et Démétrius (Davy Sardou). Nicolas Briançon, le prince noir de la Nuit, est aussi énigmatique que majestueux.

Le Songe d’une nuit d’été est un spectacle total, un judicieux mélange des genres. Le texte un peu vieillot est littéralement boosté par le rythme et la musique. Ça nous aide à le digérer. On passe du disco de Barry White à une délectable berceuse (Lulluby) interprétée en live, et on assiste même à un ballet digne de la grande époque des Folies Bergère. Les comédiens s’en donnent à cœur joie. C’est un maelström de trouvailles, un foisonnement d’idées. Un très grand et très beau show qui se termine en une énorme face jubilatoire.

lundi 19 septembre 2011

Didier Bénureau "Indigne"


Le Splendid
48, rue du Faubourg Saint-Martin
75010 Paris
Tel : 01 42 08 21 93
Métro : Strasbourg Saint-Denis

One-man show imaginé par Didier Bénureau
Textes de Didier Bénureau, Eric Bidaud, Dominique Champetier, Anne Gavard
Mise en scène de Dominique Champetier

Avant-propos : « J’étais énervé… C’est le spectacle d’un type énervé. Par tout : moi, l’actualité, la vie, les gens, tout ! Donc, quand on est énervé, on dit des choses qu’il ne faut pas dire. Quand on est énervé, on ne réfléchit pas. D’ailleurs, quand je réfléchis, il n’en sort jamais rien de bon. Il vaut mieux que je dise n’importe quoi ; bizarrement, c’est mieux.
Je me demande s’il n’y aurait pas en moi un petit homme colérique, plus malin que moi, plus méchant, plus grossier, plus tordu que moi, qui dirait des choses indignes et qui me forcerait à jouer ces choses indignes… Voilà. En fait, c’est ça. Moi je n’y suis pour rien. C’est pas moi, c’est lui. Ça ne peut pas être moi qui ai écrit des trucs pareils… »

Mon avis : Attention, cet homme est fou. Complètement barge. Irrémédiablement barré. Il nous entraîne dans son monde à lui, un univers peuplé de personnages lamentables, affligés de toutes sortes de vices et de turpitudes. Inutile n’énoncer toute une litanie de tares et de défauts car ils sont tous réunis dans ce spectacle réellement « indigne ». Pour ça, il porte bien son titre. Affreux, sales et méchants, les personnages que Bénureau incarne on les dirait tout droit sortis d’une BD de Reiser ou de Vuillemin. C’est dire s’il va loin. Très loin même. Il nous entraîne au-delà des limites de la bienséance ; il piétine et bafoue le politiquement correct avec une jubilation perverse. Il est fielleux, teigneux, ignoble, sadique, cynique, vicieux, et j’en passe. Ce type est carrément immonde. Et pourtant…
Pourtant, avec sa bonne bouille lunaire, son physique de moinillon jovial, il peut tout se permettre… On est effarouché, parfois révolté, on s’offusque… Et on aime ça. On a tous en nous un sale gosse qui raffole des horreurs. Et Bénureau nous en offre tout un florilège.
Bénureau ? Et si ce n'était pas lui ? On a l'impression que le Bénureau qui surgit sur la scène est un autre. On dirait le grand frère de la gamine de L'Exorciste. Cet homme-là est habité par le Malin. Sa voix change, prend des intonations inquiétantes, part dans les aigus, se fait vomissante... Et son corps aussi semble échapper à tout contrôle. Il se contorsionne, bondit, chaloupe... Ce dédoublement de la personnalité est véritablement impressionnant.

En pleine forme physique – il ouvre son show avec une chorégraphie carrément jacksonienne – il va, pendant une heure et demie, nous entraîner dans sa galerie de monstres. Le robinet à insanités est grand ouvert…
Ses trois premiers sketches sont directement inspirés par l’actualité. Il campe d’abord un ambassadeur français en Tunisie plus raciste que lui tu meurs, puis un chanteur lyrique légèrement abîmé par un séjour à Fukushima, avant d’aborder le thème de la Crise avec un mépris pour les pauvres pour lequel le qualificatif « indécent » est un doux euphémisme… Or, on ne peut toutefois s’empêcher d’y noter un fonds de vérité bien inquiétant.
Il enchaîne avec un sketch sur le fantasme particulièrement gonflé et osé. Mais, fraternité masculine oblige, aucun homme dans la salle ne pourrait se permettre de lui lancer la première pierre… Après un vibrant éloge d’une boucherie délicate et romantique, il s’amuse à brosser le portrait de l’homme et de la femme de droite et à analyser ce qui les oppose à la famille de gauche… Ensuite il campe un gamin qui s’exprime formidablement bien, qui a un avis sur le terrorisme et qui prend la défense de Julien Coupat, avant d’enchaîner avec un sordide écrivain cocaïnomane, et de terminer avec une femme de député alcoolique particulièrement croustillante et pathétique…
Entre temps, il s’est adonné à une autre de ses passions, la chanson. Il en interprète deux. Mais il est tout à fait inutile de lui réclamer son tube, Moralès, il restera sourd à vos demandes. Pour lui, la page est tournée (surtout que la majorité des gens dans la salle se trompaient en hurlant « Gonzalès » au lieu de Moralès, ce qui est une grave faute de goût)

Didier Bénureau est avant tout un sacré comédien. Dans ce spectacle entièrement nouveau, il nous impressionne par son incroyable éventail de jeu, par sa gestuelle unique, ses grimaces, ses silences, ses regards entendus. Il est vraiment unique dans ce registre. Bien sûr, il faut aimer l’humour noir, la gaudriole, l’irrévérence… Si tous les personnages de Bénureau sont délicieusement « indignes », sa performance d’acteur est, elle, parfaitement digne de respect.

dimanche 18 septembre 2011

L'Intrus


Comédie des Champs Elysées
15, avenue Montaigne
75008 Paris
Tel : 01 53 23 99 19
Métro : Alma-Marceau

Une pièce d’Antoine Rault
Mise en scène par Christophe Lidon
Décor de Catherine Bluwal
Costumes de Claire Belloc
Avec Claude Rich, Nicolas Vaude, Jean-Claude Bouillon, Delphine Rich, Chloé Berthier

L’histoire : Henri, savant spécialiste du cerveau, croit devenir fou quand il découvre à côté de lui dans son lit un étrange jeune homme qui lui propose un pacte diabolique : une dernière jeunesse et quelques instants de bonheur en échange de sa vie…

Mon avis : Il n’y a que le théâtre qui peut nous procurer des sensations aussi intenses. Lorsqu’il y a une parfaite alchimie entre un texte intelligent, une histoire aussi audacieuse qu’intemporelle, une mise en scène ingénieuse et des comédiens au sommet de leur art, on ressent un plaisir rare.
Dans L’Intrus, tous ces ingrédients sont réunis. L’histoire d’abord… S’amuser sans vergogne à parodier Faust, s’en servir comme d’un trampoline pour donner à l’action de multiples rebonds inattendus, lui donner légèreté et apesanteur et moderniser ce thème né au 16è siècle et devenu un grand classique, c’est à un exercice de style très brillant que s’est livré là Antoine Rault. Dire que c’est très « malin » peut être lu ici dans les deux acceptions du terme, l’adjectif et le substantif. L’aspect relativement abstrait du pacte passé avec le diable est habilement gommé par la menace bien concrète qu’est la maladie d’Alzheimer qui s’introduit sournoisement dans les synapses d’un savant qui a consacré sa vie à étudier… le cerveau. C’est-t-y pas un peu tordu, ça ?
Nous suivons en permanence les questions que se pose Henri (Claude Rich), cet éminent professeur. Ses doutes, ses assurances, ses regrets… Nous sommes dans sa tête et on comprend aisément qu’il soit totalement déboussolé par l’irruption de cet Intrus dans son intimité. D’abord étranger et mystérieux, il devient de plus en plus proche de lui jusqu’à en devenir le double parfait. A la fois le jeune homme qu’il a été et sa propre conscience. C’est de la haute voltige spirituelle.

Remarquable astuce de mise en scène, la présence de miroirs amène un surcroît de confusion tout en aidant à la compréhension et en apportant parfois une dimension onirique. Dans ce jeu de miroirs, les êtres se reflètent, disparaissent, se dédoublent, le présent et le passé se confondent. On n’est déstabilisé, mais jamais perdu… Il faut également saluer l’idée de la costumière d’avoir su jouer essentiellement avec trois couleurs : le blanc et, surtout, le rouge et le noir, qui symbolisent la mort et l’enfer.

Entre Henri et son double, à la fois Méphisto et Jiminy Cricket, s’installe une relation faite d’affrontements, d’esquives, d’attirance et de répulsion. Leurs conversations – souvent carrément métaphysiques – abordent des thèmes essentiels de l’existence comme Dieu, le Diable, la peur de la mort, ce qu’il y a après. Mais il y a aussi le bilan d’une vie. L’épouse, la fille, les femmes et le travail, le travail, le travail…

Evidemment pour interpréter un jeu aussi subtil, aussi retors, il faut de sacrés comédiens, des comédiens qui sachent osciller entre réalité et rêve, qui sachent rendre concret le fil de leurs réflexions. Ils ne sont que cinq, mais ils sont tous admirables. Comme il doit être agréable de donner la réplique à deux acteurs comme Claude Rich et Nicolas Vaude. Si plus de trente ans les séparent, ils sont de la même veine. On s’apparente assez facilement du personnage de Claude Rich car on comprend sa hantise de vieillir, son angoisse devant la menace de cette épée de Damoclès qu’est la maladie d’Alzheimer, de même que l’on se projette nous aussi à l’heure du bilan de notre vie. S’est-on toujours bien comporté ? A-t-on été ou non un bon mari, un bon père. N’a-t-on pas trop tardé à dire aux gens qu’on les aimait ?... Comme d’habitude, le jeu de Claude Rich est, sans jeu de mot, d’une richesse incommensurable. Quelle finesse de jeu ! Sa voix est une douce musique qui sait faire passer tous les sentiments, tous les états d’âme. Et son œil ! Toujours éclairé d’une lueur de malice.
Quant à Nicolas Vaude, une fois de plus, il est époustouflant. Ce rôle est fait pour lui. Il y est comme un poison dans une fiole. Elfe obscur et virevoltant, manipulateur démoniaque, négociateur cynique, il est réellement… diabolique.
Au côté de ces deux seigneurs de la scène, on ne peut que louer la performance de leurs trois complices, Jean-Claude Bouillon en tête. A eux trois, ils jouent plusieurs personnages et ils y apportent une générosité telle qu’on frise la performance.

Très honnêtement, L’Intrus est une pièce d’une grande intelligence, jamais chiante et prétentieuse. On y rit énormément. Et on s’y intéresse d’autant plus qu’elle aborde des thèmes éternels qui nous concernent bigrement. Un véritable enchantement.

mercredi 14 septembre 2011

Collaboration


Théâtre des Variétés
7, boulevard Montmartre
75002 Paris
Tel : 01 42 33 09 92
Métro : Grands Boulevards / Bourse

Une pièce de Ronald Harwood
Texte français de Dominique Hollier
Mise en scène de Georges Werler
Avec Michel Aumont (Richard Strauss), Didier Sandre (Stefan Zweig), Christiane Cohendy (Pauline Strauss), Stéphanie Pasquet (Charlotte Altmann), Patrick Payet, Sébastien Rognoni, Eric Verdin

L’histoire : Deux artistes au sommet de la gloire, deux géants : Richard Strauss et Stefan Zweig ! Le premier, proche du régime nazi et se croyant tout puissant et intouchable, non concerné par la politique. Le second craignant au contraire cette politique et la violence qu’elle allait secréter... Ils s’admiraient. Ils créeront ensemble un opéra bouffe inspiré de Ben Johnson, La Femme silencieuse, immense succès arrêté par le régime nazi dès la seconde représentation, le nom d’un juif étant resté sur l’affiche malgré l’interdiction…

Mon avis : Quelle pièce ! Quelle intensité ! Quelle profondeur ! Et quels acteurs !...
La pièce commence en 1931. Nous sommes à Garmisch, en Bavière, dans l’appartement du célèbre compositeur Richard Strauss. Une sommité, une star. Et qui le sait, et qui s’en rengorge. Bien qu’il se lamente devant la maniaquerie de sa femme Pauline question propreté d’être « plus un « mari » qu’un grand compositeur ». Car c’est un sacré personnage la Pauline, une femme très perspicace et qui n’a pas sa langue dans sa poche. Elle le connaît par cœur son brillant époux et elle ne se prive pas de le taquiner tout en lui apportant un soutien et une aide aussi aimants qu’efficaces. Cette relation, dans laquelle aucun des deux n’est dupe, permet beaucoup d’humour – et d’amour – dans le couple…
Pour son prochain opéra, Richard a pour rêve absolu d’avoir le fameux écrivain Stefan Zweig. Mais il le juge inaccessible. Heureusement, Pauline est là qui sait le pousser à tenter sa chance. Et Zweig accepte. Et Zweig vient leur rendre visite…
C’est la rencontre de deux hommes qui nourrissent un immense respect l’un pour l’autre. Mais qui sont terriblement dissemblables. Zweig, c’est l’élégance faite homme. Une élégance tant physique et vestimentaire que morale. Il est franchement austère et un tantinet misanthrope. Strauss est plus rustre, c’est un faux modeste, un excessif, un ogre. Alors que Zweig, très humble, se montre en permanence dans le doute. Plus il hésite et plus Strauss, toujours sûr et content de lui, se montre exigeant et directif. Mais, heureusement, leur talent respectif les réunit et cimente une réelle amitié…

Le premier tiers de la pièce repose sur cette approche, sur la façon dont ces deux monstres sacrés vont pouvoir cohabiter, se comprendre et travailler ensemble. C’est une sorte de round d’observation très bavard, saupoudré de quelques réflexions savoureuses, mais, avouons-le, dans lequel il ne se passe pas grand chose. Pourtant, ce premier tiers était indispensable pour poser la psychologie des deux principaux protagonistes et de jauger le rôle important que tenait Pauline auprès de son mari. Mais j’ai quand même vu un couple, profitant d’un baisser de rideau, s’éclipser en douce. Ils ont eu franchement tort de ne pas attendre l’année 1933 sur laquelle le rideau se rouvrait…

C’est là que la pièce prend soudain une toute autre dimension. En effet, la grande Histoire y fait soudain irruption à travers l’agression que subit Charlotte, l’assistante de Zweig, molestée dans la rue par deux adolescents. Tout simplement parce qu’elle est juive. Très lucide, l’écrivain sait qu’avec la montée du nazisme, son pays entre de plain-pied dans une nouvelle ère. Il essaie de le faire comprendre aux Strauss, mais ceux-ci sont trop tournés vers eux-mêmes, trop égoïstes, trop gâtés pour se sentir concernés. Devant le désir de Zweig d’ « agir selon une exigence morale », Strauss promet de ne jamais le lâcher quoi qu’il arrive. Hélas, les ukases anti-juifs vont bientôt les rattraper et un immonde chantage oblige Strauss à accepter à contrecœur le poste de Président de la Chambre de Musique du Reich. Il est d’autant plus coincé qu’on lui a fait comprendre qu’en cas de refus sa belle-fille, juive elle aussi, pourrait en pâtir…
En dépit de son statut et de l’admiration que lui porte Hitler, Strauss n’a plus aucune marge de manœuvre. Il a beau clamer que « la musique n’a que faire des régimes politiques », il lui faut subir les diktats du nazisme et… collaborer.
La pièce devient alors l’histoire de ces deux hommes face à la grande Histoire. Pour un Zweig intègre, révolté et… juif, c’est à la limite plus facile. Il se sait exposé, il vomit ce régime et ses exactions, il peut au moins se résoudre à l’exil. Mais Strauss est immergé dans le système. Même s’il n’y a que « composer » qui compte pour lui, il est piégé. Ce qu’on lui impose devient kafkaïen. Il a bien quelques sursauts, car c’est foncièrement un honnête homme, mais il est impuissant.
Cette fois, nous sommes totalement happés par les drames qui se nouent devant nous. On comprend ces deux hommes, on les estime et on les plaint. Ce sont des victimes.
Avec eux, nous allons traverser les années de guerre. 1934, 1935, 1942, 1945… pour nous retrouver enfin à Munich en 1948.

Portée par un formidable duo Aumont-Sandre, remarquablement épaulé par une brillante Christiane Cohendy, cette pièce se révèle très, très forte. D’abord parce que ces personnages ont existé et que l’auteur a su rester fidèle à l’histoire. Ensuite parce qu’elle met en scène deux monstres sacrés, deux immenses talents, un dans la musique, Strauss, l’autre dans la littérature, Zweig. La différence de style de ces deux hommes, tant physique que morale, est la colonne vertébrale de cette tragédie. Car c’en est une, et une terrible. Didier Sandre, tour à tour frémissant et exalté donne à Stefan Zweig un formidable épaisseur. Michel Aumont apporte sa générosité et son tempérament pour nous faire comprendre et finalement aimer un Strauss particulièrement haut en couleurs.
Il faut voir Collaboration. Un titre qui se lit dans deux sens : il y a la collaboration purement professionnelle entre Strauss et Zweig, et il y a la collaboration contrainte et forcée du musicien avec le régime nazi. On sort du théâtre des Variétés ému et bouleversé. Et on se surprend, à travers ces deux destins, à croire encore en l’homme.

lundi 12 septembre 2011

Fume cette cigarette


Théâtre des Mathurins
36, rue des Mathurins
75008 Paris
Tel : 01 42 65 90 00
Métro : Havre-Caumartin / Auber

Une comédie d’Emmanuel Robert-Espalieu
Mise en scène par Edouard Molinaro
Assisté de Joëlle Benchimol
Avec Axelle Laffont et Vincent Desagnat

L’histoire : La vie à deux est-elle le premier degré de l’apprentissage de la démocratie ? Ou, au contraire, la prise de pouvoir par l’un ou par l’autre est-elle la conséquence inévitable de la tendre guerre au sein d’un couple en formation ? Fume cette cigarette s’efforce de ne pas répondre à ces questions…

Mon avis : En fait, il ne m’aura fallu que quelques minutes pour comprendre le sens du titre énigmatique de cette pièce. Bon sang ! Mais c’est bien sûr… Il vient de la passion exacerbée que nourrit le héros à l’égard d’Eddy Mitchell, passion qu’il est tout fier d’annoncer à la jeune femme en la compagnie de laquelle il se retrouve pour la toute première fois au restaurant. Occasion de faire plus ample connaissance…
Très vite les deux caractères se dessinent. Autant IL est gauche, timide, gaffeur, maniaque et… exclusif, autant ELLE est fine, malicieuse, enjouée, provocante… et accro à la cigarette. D’ailleurs la conversation va bientôt se focaliser sur cette addiction. Comme ils n’en sont qu’au tout début de leur histoire, il va s’efforcer de se montrer conciliant même si l’on sent que c’est contre nature. En même temps, sans qu’il s’en rende bien compte, sa maladresse, son ton hésitant, sa façon de s’emberlificoter dans ses explications le rendent touchant aux yeux de la jeune femme. Elle, elle sait ce qu’elle veut. Elle a un petit côté amazone et elle n’est pas très encline à s’embarquer dans une aventure avec un mec qui l’empêcherait de respirer… Or, ce mec lui plaît vraiment. Et elle va tenter le coup. Malgré sa dérive intégriste face à une clope dont elle ne peut se passer…

La comédie est fort bien agencée. A travers une succession de saynètes, on suit leur évolution. Soit on assiste à une sorte de noria dans laquelle ils viennent à tour de rôle nous livrer leurs confidences, soit on est les témoins de leurs conversations au fil de leur vie plus ou moins en commun. Du premier désaccord né lors d’un week-end à Bruges à l’inévitable séparation on subit la lente dégradation de leur couple. Et pourtant, grâce aux quelques séquences où ils apparaissent en solo, on sait qu’ils s’aiment. Qu’ils s’aiment vraiment.
Hélas, il ne peut pas supporter d’avoir une rivale. Un paquet de rivales même… Le suspense de la pièce est donc de savoir si l’amour va être plus fort que la névrose. Si leur liaison va avancer « clopin-clopant » jusqu’à partir en fumée, ou si leurs sentiments vont faire un tabac.

Toute la finesse de Fume cette cigarette repose sur cet antagonisme. Le problème n’est pas de savoir s’ils s’aiment, c’est de savoir s’il va réussir à traverser cet écran de fumée qui l’empêche de voir clair et d’être objectif. Pour jouer un jeu aussi subtil, il faut deux comédiens à la fois dissemblables et complémentaires, et surtout très complices. Et là, l’alchimie fonctionne parfaitement. Ils sont vraiment épatants ces deux là, chacun dans un registre propre. Même si on les connaissait déjà, elle pour ses passages délirants à la télévision, lui pour ses prestations au cinéma ou au côté de Michaël Youn, on peut parler de révélation. Le théâtre, ce n’est pas pareil. On n’y a pas droit à l’erreur. Et on peut affirmer qu’ils sont tous les deux armés pour y faire une bien jolie carrière.
Axelle possède de nombreux atouts. Elle est fraîche, mutine, elle a un sourire absolument craquant et elle est très à l’aise avec son corps, ce qui lui permet d’exprimer une sensualité saine et assumée. C’est une féline, à la fois chatte et panthère. Elle peut tout jouer, la drôlerie comme l’émotion. Elle apporte à son personnage une totale crédibilité.
Vincent joue sur un tout autre registre. Il n’abuse jamais de son charme viril. Il aime mettre en avant une certaine fragilité. Son jeu est très, très fin. Autant Axelle se révèle lumineuse et positive, autant il aime jongler avec ses doutes, avec ses hésitations. Ce qui, j’en suis convaincu, a pour effet de le rendre extrêmement attachant aux yeux des dames. Sa palette de jeu est très large. On le savait très friand de gaudriole (Youn oblige), on le découvre tout-à-fait capable de jouer des personnages complexes. Ce gars-là peut sans problème lorgner du côté des personnages shakespeariens ou dostoïevskiens. Il a sans nul doute un sacré potentiel.

Il faut donc le talent conjugué de ces deux comédiens pour nous faire apprécier cette petite comédie d’apparence banale et anodine qui tourne autour du couple et de ses concessions et qui nous en dit mine de rien beaucoup sur les relations hommes-femmes. On n’y rit jamais aux éclats, mais nous sommes en permanence dans le sourire. Ce qui n’est pas plus mal. Enfin, on ne va pas mégoter sur une mise en scène signée Edouard Molinaro. C’est tout de même un sacré gage de qualité, non ?

Charles Aznavour "En toute intimité"


L’Olympia
28, boulevard des Capucines
75009 Paris
Tel : 08 92 68 33 68
Métro : Madeleine / Opéra / Auber

A 87 ans, Charles Aznavour foule de nouveau la scène de l’Olympia 55 ans après y avoir effectué ses débuts. Il s’y installe pour un mois, du 7 septembre au 6 octobre avant d’entamer une longue tournée – a priori sa dernière - à travers la France.

Le mercredi 7 septembre, la foule des grands soirs se pressait donc pour assister à ce tout premier rendez-vous. Côté célébrités, il y avait du beau monde : Daniel Auteuil, Stéphane Bern, Jean-Claude Camus, Petula Clark, Annie Cordy, Gilbert Coullier, Mireille Darc, Mireille Dumas, Jean-Pierre Foucault, Laurent Gerra, Robert Hossein, Serge Lama, Michel Leeb, William Leymergie, Daniela Lumbroso, Enrico Macias, Frédéric Mitterrand, Nana Mouskouri, Orlando, Line Renaud… Il y avait de l’hommage et du respect dans l’air…

Son entrée, Charles Aznavour nous l’a jouée facétieuse. Tout de noir vêtu, il s’est illico juché sur un grand tabouret pour interpréter d’affilée deux chansons de son dernier album Aznavour toujours. Entouré de onze musiciens et de deux choristes, il a d’emblée annoncé le ton : l’ambiance générale allait être jazzy. Voulu ou non, le premier titre, très swinguant, a été un peu noyé dans le son. Mais, dès le deuxième, plus lent, on retrouvait avec bonheur cette voix au timbre unique, inaltérable, à la fois mélodieuse et puissante. Et il était toujours sur sa grande chaise… En réalité, il s’agissait d’un leurre. Toujours aussi espiègle, notre sémillant octogénaire reprenait sa verticalité pour nous annoncer qu’il feintait, qu'il voulait nous faire accroire en un quelconque signe de faiblesse. Même s’il était acquis qu’il obtienne son succès « dans un fauteuil », pas question pour lui d’effectuer son tour de chant assis. Et c’était le vrai départ d’un formidable récital qui allait durer deux heures. Paris au mois d’août et Pour faire une jam nous étaient distillés avec une fougue et un entrain véritablement bluffants. Dans une forme sidérante, Aznavour se permettait même de monter régulièrement en puissance pour nous gratifier d’un spectacle total, tout-à-fait exaltant. Quel métier ! Quelle leçon et quel exemple pour les jeunes générations !

Ce qui est étonnant chez lui, c’est cette faculté de toujours renouveler des chansons que l’on connaît par cœur depuis des décennies. Il donne à chaque fois l’impression de les chanter pour la première fois. C’est vraiment un interprète hors pair. Et puis il a en lui un art consommé du geste juste. Ses traits ont vieilli bien sûr, mais la voix est là, le geste est précis, il a du ressort… Charles Aznavour, c’est le music-hall incarné. On le craignait amoindri, voire affaibli, or il a surpris tout le monde par sa vitalité, sa joie et son plaisir d’être sur scène. Tombant la veste pour nous faire découvrir une fort seyante paire de bretelles, il s’est même amusé à esquisser quelques petits pas de danse.
Evidemment, à la fin du show – car c’en fut un, et un sacrément bon - il a fait un succès si fort que les gens l’acclamaient debout… A la sortie, ou autour du bar où une collation était offerte aux invités de marque en présence du « Maître », les commentaires, dénués de toute hypocrisie, étaient unanimes dans l’éloge et l’admiration. Chacun des artistes présents, s’accordant à saluer une prestation frisant la perfection, se sentait dans l’état d’esprit d’un vassal devant son « grand pair ».
Je ne puis donc que vous recommander d’aller assister à ce tour de chant donné « en toute intimité » par un sacré performer (dans le sens anglo-saxon du terme)… Eternel Aznavour, Aznavour toujours…

jeudi 1 septembre 2011

Pauvre France !


L’Alhambra
21, rue Yves Toudic
75010 Paris
Tel : 01 40 20 40 25
Métro : République / Jacques Bonsergent

Une comédie de Ron Clark et Sam Bobrick
Adaptée par Jean Cau
Mise en scène par Bernard Ménez et Fabrizio
Avec Bernard Ménez (Victor Tabouré), Karine Lyachenko (Béatrice Tabouré), Fabrizio (José), Xavier Bernard (Michel Tabouré), Elisa Ménez (Martine)

Ma note : 6/10

L’histoire : Victor Tabouré, teinturier à Limoges, est bien malheureux : sa femme, Béatrice, vient de le quitter pour son propre frère… Pour se consoler, il monte à Paris rendre visite à son fils Michel. Il découvre alors avec stupeur que celui-ci vit avec un autre garçon, José, homosexuel extraverti et virevoltant. Dépassé par les événements, Victor va tout faire pour tenter de modifier le comportement de son fils d’abord, de José ensuite…

Mon avis : Quarante ans après sa création, Bernard Ménez reprend le rôle de Victor Tabouré, immortalisé par Jean Lefèbvre au début des années 80. Cette pièce avait marqué également les premiers pas au théâtre de Bernard Giraudeau.
Quatre décennies plus tard, le thème de cette comédie vaudevillesque n’a pas pris une ride. Ce qui pourrait sembler quelque peu paradoxal avec la banalisation de l’homosexualité. On peut donc en définir que la société n’a pas tellement évolué face à cette question lorsqu’on y est soi-même confronté.

Bernard Ménez, en provincial grand teint, naïf et foncièrement réac, est aisément entré dans le costume du sieur Tabouré. Pas besoin d’être or(Le)fèvre en la matière pour décréter que ce rôle lui va comme un gant. Pourtant, à la fin de la représentation, j’ai ressenti la sensation bizarre que notre pseudo teinturier limougeaud avait joué en demi-teinte, qu’il en avait gardé sous la semelle. Il lui manque ce petit grain de folie qui fait basculer une pièce dans une franc délire. Là, on ne reste que dans la drôlerie. Mais peut-être est-ce voulu par le comédien lui-même puisqu’il cosigne la mise en scène. Peut-être a-t-il voulu ne pas tomber dans la pitrerie gratuite pour jouer plus sur la corde sensible…
Bernard Ménez est fort bien entouré. Il n’y a rien à dire sur un casting où chacun est parfaitement à sa place avec, toutefois, une mention particulière pour Fabrizio qui, en dehors de quelques emprunts un peu lourds au Michel Serrault de La cage aux folles, est vraiment très bon, très convaincant. Il se dégage en outre de sa personne un charme indéniable et un sens de l’autodérision qui le rendent sympathique… Mention spéciale aussi à Karine Lyachenko. Dès qu’elle arrive, assez tard dans la pièce, elle apporte aussitôt ce fameux grain de folie qui lui manquait. Totalement farfelue, grâce à son métier, elle évite de tomber dans l’écueil de la grosse farce. Elle fait rebondir le rythme jusque là un peu plan-plan. Ce qui permet à la pièce de finir sur une bonne note… La jeune Elisa Ménez, en dépit d’un petit rôle, tire agréablement son épingle du jeu. Elle offre à son personnage nunuche de Martine une gouaille toute parisienne qui lui sied à merveille. Elle fait déjà preuve d’une jolie présence.

Bref, nonobstant quelques facilités et quelques lourdeurs, la pièce se laisse voir sans déplaisir. D’autant que, ça et là, histoire de faire oublier qu’elle date de 1971, l’idée a été judicieuse de la saupoudrer de petits clins d’œil à l’actualité…