vendredi 17 février 2017

Silence, on tourne !

Théâtre Fontaine
10, rue Pierre Fontaine
75009 Paris
Tel : 01 48 74 74 40
Métro : Blanche / Saint-Georges / Pigalle

Une comédie de Patrick Haudecoeur et Gérald Sybleiras
Mise en scène par Patrick Haudecoeur
Décors de Jean-Michel Adam
Costumes de Juliette Chanaud
Lumières de Marie-Hélène Pinon
Bande-son et bruitages de François Peyrony

Avec Isabelle Spade, Philippe Uchan, Patrick Haudecoeur, Nassima Benichou, Jean-Pierre Malignon, Stéphane Roux, Véronique Barrault, Adina Cartianu, Gino Lazzerini
Musiciens : Patricia Grégoire, Jean-Louis Diamant, Jean-Yves Dubanton

L’histoire : Une équipe de cinéma a investi un théâtre pour le tournage d’un film. Aujourd’hui, on tourne la séquence du mari trompé qui interrompt une représentation pour tuer l’amant de sa femme. Au cours du tournage, on va découvrir que le producteur est véreux, que le réalisateur, amoureux de la jeune actrice et dévoré par la jalousie, s’est promis de démasquer son rival pour lui faire la peau. L’éternel second rôle, quant à lui, est prêt à toutes les crapuleries pour faire décoller sa carrière et l’assistant-réalisateur doit ménager les uns et les autres d’autant qu’il rêve de réaliser son premier film avec la jeune actrice dans le rôle principal…

Mon avis : Succès garanti ! Une fois encore la mécanique théâtrale parfaitement huilée de ce bidouilleur fou qu’est Patrick Haudecoeur fonctionne à merveille.
Quand on connaît ses précédentes créations, et plus particulièrement Thé à la menthe ou t’es citron ?, on sait à peu près parfaitement à quoi s’attendre. Et malgré tout, tout en restant dans le même registre, il réussit encore à nous surprendre et à nous faire hurler de rire. Les ressorts sont simples : sous le prétexte de nous faire assister à l’enregistrement d’une scène de tournage, il réunit une bande de comédiens tous plus déjantés les un(e)s que les autres et il les lâche dans un scénario où rien de ce qui devrait logiquement arriver ne se passe.


Chacun de ses personnages est spécial. Chacun a quasiment une double personnalité car il doit essayer de composer à la fois avec la tâche professionnelle qu’il doit accomplir et les aléas de sa vie personnelle. Tous deux étant en permanence totalement imbriqués. En ce sens, alors qu’ils nous paraissent complètement loufoques, ces personnages possèdent un profil psychologique très finement dessiné. Ils sont tout le temps dans le double « Je » et dans le double jeu.
Cette réunion de bras cassés, tour à tour exaltés, déprimés, agressifs, sournois, menteurs, mytho, jaloux, arrivistes, et j’en passe, est on ne peut plus réjouissante. Tous les comédiens sont excellents car ils ont laissé dans leur loge tout amour-propre. Ils se foutent royalement de leur quant-à-soi. Ils jouent de leur médiocrité avec un tel naturel qu’ils ne sont jamais ridicules. Ils sont tellement vrais qu’ils en deviennent touchants et que l’on ressent pour eux plus d’attachement que de moquerie.


Le casting de ce tournage lamentable est parfait. Autour ce génial hurluberlu qu’est Patrick Haudecoeur, il se dégage un réel esprit de troupe. Ça a l’air de partir dans tous les sens, or c’est formidablement maîtrisé. Les gags sont millimétrés. Ils nous surprennent sans cesse. La salle hoquète littéralement de rire. Comique de répétition, cascades, effets spéciaux, objets incontrôlables, bagarres, numéro de claquettes, poème improbable, répliques incisives… Pris au cœur d’un véritable cartoon interprété en live, nous sommes en décalage et en jubilation permanents.


Difficile de mettre un comédien en exergue tant chaque personnage est essentiel à la dramaturgie. Ils sont vraiment tous épatants. Petites mentions spéciales néanmoins à Patrick Haudecoeur, à la fois maître de cérémonie et premier assistant empêtré avec ses ambitions d’auteur et ses sentiments ; à Stéphane Roux, impayable en rayonnant invisible ; à Véronique Barrault, tornade autoritaire et seul élément solide de l’équipe de tournage ; à Philippe Uchan absolument irrésistible dans le rôle du producteur odieux, veule et totalement égocentré…

Lorsqu’on voit l’ambiance qui règne dans la salle, lorsqu’on assiste à la folle interaction existant entre la scène et le public, on ne peut que prédire à Silence, on tourne ! le même succès qu’à Thé à la menthe ou t’es citron ?...

Gilbert « Critikator » Jouin

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