vendredi 20 novembre 2015

Baptiste Lecaplain "Origines"

Petit Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 74
Métro : Edgar Quinet / Gaîté / Montparnasse

Seul en scène écrit par Baptiste Lecaplain, Benjamin Guedj
Mis en scène par Aslem Smida

Présentation : « Si j’étais fort en résumé, je ne ferais pas des spectacles d’une heure et demie ! Alors, venez voir Origines. C’est mieux, on aura plus de temps »…

Mon avis : Hier soir, le Petit Montparnasse était, pour le cas, plein comme un œuf pondu par une poule élevée en liberté dans le bocage normand. L’envie de rire et de partager était la plus forte. Et, dans ce domaine, j’ai été comblé au-delà de tout. En remontant à ses Origines, en nous racontant sa prime jeunesse, Baptiste Lecaplain réveille en nous notre part d’enfance. Le fait est que, pendant pratiquement deux heures, j’ai ri comme un gamin à l’évocation de ses souvenirs et à sa façon complètement surréaliste et cartoonesque de les narrer.
Dire que Baptiste Lecaplain bouge bien est un doux euphémisme. Il occupe la scène comme personne. Sa débauche physique est impressionnante. Sa gestuelle est aussi efficace que ses mots. Pas étonnant qu’il possède une ligne et un tonus de sportif de haut niveau. Il n’a pas besoin de passer au sauna pour éliminer.



C’est un petit garçon que nous avons devant nous. Dans tout ce qu’il raconte, il y a indubitablement une grande part de vécu, raison pour laquelle on s’intéresse vraiment à ses propos. Son spectacle est admirablement construit ou, plutôt, déconstruit. Son sens de la rupture est étourdissant. Avec un sens très abouti de la rupture, il jongle avec les évidences en les déformant soudain, en les maltraitant. A lui tout seul, il est plusieurs. Il crée des dialogues aussi réalistes que farfelus. A tout moment, le burlesque fait irruption. Il nous entraîne dans des digressions invraisemblables, tient des propos saugrenus, utilise des images ou des métaphores extravagantes.

Il y a de nombreux personnages dans Origines : ses parents, bien sûr, la boulangère, un prof machiavélique et pervers, une petite copine, un camarade bien déjanté, une psy, etc… Il les campe tous, les fait vivre devant nous à un rythme fou. Mais il va encore plus loin. Dans son spectacle, il y a un invraisemblable bestiaire. J’espère qu’il y a un préposé à sa ménagerie dans les coulisses. En effet, il fait apparaître à ses côtés un chat, un lion, un zèbre, une taupe, des éléphants, un kangourou, des vaches, un chien, une souris, un crabe, et j’en oublie… Et, le pire, c’est qu’on les voit se matérialiser et qu’on y croit. Il y a par exemple cet inénarrable discussion totalement absurde avec un cobra qui fait hurler la salle de rire ; à un point tel que l’on ne parvient même plus à comprendre ce qu’il dit. C’est d’autant plus surréaliste et barré qu’il semble en pleine improvisation.


Un vrai gamin vous dis-je. Mais pas un sale gosse. Il y a tellement de tendresse, de candeur, de fraîcheur, d’humilité, d’honnêteté et, surtout, d’autodérision qu’on a en face de nous un personnage réellement attachant. Timide, bègue, amoureux transi, rebelle de pacotille, rêveur impénitent, comment ne pas l’aimer ? On pense parfois à l’univers du Petit Nicolas.

Origines est un spectacle total, très, très visuel. Il donne l’impression parfois de partir dans tous les sens, alors qu’il est parfaitement maîtrisé. Il est remarquablement écrit avec une utilisation aussi savoureuse qu’efficace de gimmicks et de clins d’œil. Et surtout, il ne cesse d’aller crescendo jusqu’à un final hallucinant.
Avec une folle générosité, en prise directe avec le public, Lecaplain nous fait rire non stop pendant près de deux heures. Son humour, ses mimiques, ses déplacements sont très personnels. Il a vraiment son propre univers. Ce Baptiste-là, je m’en ferais bien une religion.

Gilbert « Critikator » Jouin

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