mercredi 14 octobre 2009

Rose & Noir


Un film de Gérard Jugnot
Scénario et dialogues de Gérard Jugnot et Philippe Lopes Curval
Avec Gérard Jugnot (Pic Saint-Loup), Bernard Le Coq (Castaing), Juan Diego (Poveda), Assaad Bouab (Flocon), Stéphane Debac (Myosothis), Saïda Jawad (Amalia), Patrick Haudecoeur (Sergio), Raphaël Boshart (Frédéric), Aixa Villagran (Margarita), Athur Jugnot (le roi Henri III), Philippe Duquesne (un inquisiteur), Thierry Heckendorn (un inquisiteur), Hubert Saint-Macary (l’avocat), Roland Marchisio (l’artificier)…
Sortie le 14 octobre 2009-10-12

Ma note : 7/10

L’histoire : En 1577, Pic Saint-Loup, grand couturier sur le déclin, se voit confier par le roi Henri III une mission diplomatique : il doit confectionner sa plus belle robe de cérémonie pour le mariage arrangé d’un de ses neveux avec la fille d’un Grand d’Espagne.
Dans une Espagne catholique intégriste qui traque protestants, maures, juifs et homosexuels, Saint-Loup (fort peu hétéro) va se mettre en chemin entouré de ses gens. Ce qu’il ignore, c’est qu’il part avec un protestant, son fidèle secrétaire, bien décidé à cacher une bombe dans la robe pour venger les siens de la sanglante Saint Barthélémy. Il part également avec son « nègre », un maure qu’il doit transformer en blond normand ; avec son parfumeur, son « nez », un juif marrane, ainsi que son coiffeur, une folle perdue.
Tout ce joli monde « persona non grata » va se retrouver chez le père de la fiancée, qui n’est autre que le grand inquisiteur de Séville…

Mon avis : Et bien, encore une fois, je me retrouve avec un certain décalage vis-à-vis de quelques confrères chroniqueurs télé ou plumitifs qui marquent un certain dédain pour le dernier opus de Gérard Jugnot. Et je commence à me poser des questions. Serais-je trop complaisant, trop bon public ? Je m’inquiète, car moi j’ai bien aimé ce film. Je trouve que c’est une excellente comédie, qui nous en met plein les mirettes avec ses riches costumes, ses beaux décors, ses fards et des personnages dont le moins qu’on puisse en dire c’est qu’ils sont très hauts en couleurs.
Comme on commence à en avoir l’habitude avec Gérard Jugnot, on se plaît à chercher le deuxième niveau de lecture car il parsème systématiquement ses histoires de messages. Rose et Noir a beau se passer au 16è siècle, il est néanmoins truffé de clins d’œil et de références à notre actualité. Jugnot, on le sent, on le voit, est un humaniste, mais un humaniste discret, qui suggère plus qu’il ne souligne. Et finalement, ce n’est pas plus mal car l’effet en est plus insidieux, donc plus durable. Entre les gros traits de la comédie, il écrit son manifeste en petites lignes. Et ça évoque les sans papiers, ça parle du racisme, des antagonismes que suscitent les religions… Ce n’est tout de même pas anodin, que diantre !
En marge de ces messages, ce film est une bonne comédie. Tout y est parodique, tout est prétexte à s’amuser et à distraire. Si ce n’est pas louable, ça, par les temps qui courent ! Nombreux sont ceux qui s’ingénient à mettre ce film en parallèle avec La folie des grandeurs. Bien sûr qu’il y a quelques analogies, l’époque, donc les costumes, l’Espagne du temps de l’Inquisition… C’est à peu près tout. Ici, on a plutôt affaire à la grandeur des folles. Et, à ce propos, il faut souligner la qualité de la distribution avec ces personnages réellement croquignolets que composent Jugnot, Stéphane Debac et Patrick Haudecoeur. Et pourtant, quand on y regarde bien, ils ne sont pas si caricaturaux que cela… A leurs côtés, chacun joue sa partition avec un égal bonheur, de Bernard Le Coq à Juan Diego, de Saïda Jawad à Arthur Jugnot, sans oublier les apparitions toujours savoureuses d’un Roland Marchisio.
Comme dans Monsieur Batignole, Gérard Jugnot y va de son morceau de bravoure. Les deux scènes sont similaires. Que ce soit face à la Gestapo ou face à l’Inquisition, il sait qu’il risque d’y laisser sa peau. Mais son indignation, sa révolte, sont trop forts. Perdu pour perdu, il faut que ça sorte. Et il y va de son petit couplet sur la tolérance, sur la justice, sur le respect de l’autre. Il est convaincant dans ce registre… Et puis il y a la toute dernière image du film, celle qui nous scotche à notre fauteuil. Là, il y est allé fort le Jugnot dans la dimension philosophico-sociologique. Ah, tout n’est décidément pas « rose » sur notre petite planète bleue…
En conclusions, et n’en déplaisent aux grands inquisiteurs des grands médias presse et télé, j’ai pris beaucoup de plaisir avec ce film.

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