lundi 11 janvier 2010

Une petite zone de turbulences


Un film d’Alfred Lot
D’après le roman de Mark Haddon, « Une situation légèrement délicate »
Scénario, adaptation et dialogues de Michel Blanc
Avec Michel Blanc (Jean-Paul), Miou-Miou (Anne), Mélanie Doutey (Cathie), Gilles Lellouche (Philippe), Cyril Descours (Mathieu), Yannick Rénier (Olivier), Wladimir Yordanoff (David)…

Ma note : 6,5/10

Synopsis : Jean-Pierre, récemment retraité, est hypocondriaque… Anne, sa femme, le trompe avec un ancien collègue de bureau… Sa fille Cathie, divorcée et mère d’un petit garçon de 5 ans, vit avec Philippe, un « brave » garçon que Mathieu, le frère homo de cathie, appelle « Bac moins 6 »…
Quand Jean-Pierre découvre une petite tache sur sa peau au niveau de sa hanche droite, que Cathie lui annonce qu’elle a décidé d’épouser « Bac moins 6 », que Mathieu se fait larguer parce qu’il hésite à présenter son amant au mariage de sa sœur et que Jean-Pierre apprend fortuitement que sa femme le trompe, l’équilibre familial implose…

Mon avis : D’abord, la propriété qui va être agitée par une « petite zone de turbulences » est à tomber par terre tant elle est à la fois magnifique et originale. Son heureux propriétaire, Jean-Paul, a dû très bien gagner sa vie pour s’offrir un tel luxe. Aujourd’hui, il a le temps de bien en profiter car il est à la retraite. Très vite, à certains petits signes, on comprend qu’il est terriblement hypocondriaque. Et légèrement misanthrope aussi. Il faut bien dire qu’il ne manque pas de raisons pour se replier dans sa coquille et pour bougonner dans son coin : sa fille lui impose un futur gendre plutôt brut de décoffrage et il a beaucoup de mal à accepter l’homosexualité de son fils et, surtout, de la voir matérialisée par l’intrusion de son amant… En plus, son épouse, gentille, patiente et adorable, ne prête guère qu’une oreille distraite à ses incessantes jérémiades. Elle a tendance à le traiter comme un petit garçon. De toute façon, elle peut se montrer patiente avec lui car elle a largement de quoi compenser puisqu’elle a un amant en la personne d’un ancien collègue de travail de Jean-Paul…

Ce film est estampillé à 100% Michel Blanc. Depuis Marche à l’ombre, il excelle dans ces rôles de gugusse plaintif et obsédé par la maladie. Il y a également son immense talent de dialoguiste. On est vraiment gâté au niveau des répliques ironiques et cinglantes.
La première moitié du film nous permet de passer un excellent moment avec cette comédie bien française, interprétée par des personnages attachants, émaillée de situations drolatiques et truffée de bons mots. Michel Blanc, on l’a dit, est pathétique avec son hypocondrie. Miou-Miou amène avec son personnage une jolie note de légèreté tout en se révélant être le personnage le plus équilibré et le plus sensé de la maisonnée. Mélanie Doutey, comme toujours, est absolument craquante de naturel, adorable ; elle est très convaincante en jeune femme tiraillée entre ses sentiments et ses incertitudes et fragilisée par les attitudes des siens face l’homme qu’elle aime. Dans le rôle de cet homme-là, Gilles Lellouche ne fait que confirmer la magistrale étendue de son talent. Il réussit en effet l’exploit de se faire aimer en étant très con.

Et puis, uniquement à cause de la psychose maladive de Michel Blanc, la "petite zone" atteint des rivages qui nous passionnent un peu moins. A un moment, trop c’est trop. Certains comportements de Jean-Paul deviennent réellement peu crédibles tant ils sont excessifs et exagérés. Il en fait des tonnes et il enquiquine vraiment tout le monde, spectateurs y compris. Le film bascule alors vers l’absurde et c’est dommage.
Reste quand même une gentille comédie qui traite plutôt bien des relations de couples et des relations parents-enfants. La peinture des sentiments chez les autres protagonistes du film est fort bien dessinée ; il y a une excellente brochette de comédiens. Le couple Doutey-Lellouche fonctionne à merveille. Mais il y a cette fâcheuse "petite zone de turbulences" au niveau du scénario qui, en devenant trop outré, nous interdit d’adhérer totalement et tranquillement à une histoire somme toute plaisante.