vendredi 30 août 2019

J'ai envie de toi


Théâtre Fontaine
10, rue Pierre Fontaine
75009 Paris
Tel : 01 48 74 74 40
Métro : Blanche / Saint-Georges / Pigalle

Une pièce de Sébastien Castro
Mise en scène par José Paul
Décors de Jean-Michel Adam
Costumes de Juliette Chanaud
Lumières de Laurent Béal
Son de Virgile Hilaire

Avec Sébastien Castro (Youssouf), Maud Le Guénédal (Sabine), Guillaume Clérice (Guillaume), Anne-Sophie Germanaz (Christelle), Astrid Roos (Julie), Alexandre Jérôme (Gaël)

Présentation : Il vous est sûrement arrivé de vous tromper de destinataire en envoyant un texto... 
Ce soir, c’est à Guillaume que ça arrive. Alors qu’il pense adresser “j’ai envie de toi” à Julie, sa nouvelle conquête, le texto est envoyé par erreur à Christelle, son ex… La soirée, bien mal partie, dérape définitivement quand son voisin s’invite chez lui après avoir abattu la cloison qui sépare les deux appartements.

Mon avis : On ne va pas ratiociner à l’infini : cette pièce a été écrite pour faire rire, uniquement pour faire rire. Et ce but est largement atteint.
Pour avoir joué dans un grand nombre de (très bonnes) comédies, Sébastien Castro, qui signe avec J’ai envie de toi, sa première pièce, connaît parfaitement tous les ressorts et toutes les subtilités du genre.
Tout part d’une affreuse erreur de manipulation. Au lieu d’adresser son texto à sa Julie, sa nouvelle conquête, une proposition on ne peut plus explicite, “J’ai envie de toi”, Guillaume l’envoie à Christelle, son ex, une jeune femme qu’il ne veut surtout plus revoir… Il faut dire à sa décharge qu’il ne se trouve pas à ce moment-là en pleine possession de tous ses moyens car il est un tantinet perturbé par un voisin fâcheusement intrusif. D’où cette malencontreuse précipitation.

Ce voisin, cet empêcheur de pianoter en rond sur son clavier, c’est Youssouf. Lorsqu’un énergumène de cet acabit fait irruption dans votre vie, c’est l’équivalent d’un tsunami qui vient balayer votre quotidien. Youssouf, c’est un peu le François Pignon du Dîner de con. Mais avec, en plus, une réelle dose de cynisme. C’est à dire que, tout en étant aussi gaffeur et interventionniste que le héros de Francis Weber, il se révèle également totalement dénué de scrupules. Cette double mentalité en fait un personnage à la fois imprévisible et redoutable. Omniprésent, Sébastien Castro s’en donne à coeur joie. Tout son registre, dont l’éventail est très, très large, y passe. Face à ses mimiques, à son timbre de voix “droopyesque” si particulier, sa gestuelle hésitante, ses regards tour à tour effarés ou entendus, ses silences aussi, la salle ne résiste pas. Plus les situations sont folles, plus les rires se mettent au diapason et deviennent fous à leur tour.


Grâce à une mise en scène de José Paul nerveuse et millimétrée, J’ai envie de toi nous emporte comme un tourbillon. Le rythme, effréné, ne faiblit jamais. Les gags, les quiproquos, les malentendus, les imbroglios s’enchaînent. Les scènes entre Youssouf et Guillaume ont parfois un tel niveau de virtuosité absurde qu’elles en deviennent paroxystiques. Comique de répétition, humour parfois trash (je vous laisse découvrir à quels moments), situations improbables… L’appartement lui-même, avec sa fameuse cloison amovible, est un plus qu'un décor, c'est un élément de jeu à part entière. Il y a aussi une inénarrable trouvaille d’écriture avec le personnage de Gaël, l’homme qui ne finit jamais…

Sébastien Castro et José Paul ont su insuffler un authentique esprit de troupe. Chacun des six protagonistes de cette loufoquerie jubilatoire, joue sa partition avec précision et, surtout, avec le plus grand sérieux. Ce qui, pour une comédie, amplifie les effets comiques.
J’avais derrière moi un ado d’une quinzaine d’années, dont les éclats de rire, frais et spontanés ajoutaient à mon amusement. Et dans la rangée devant, c’étaient deux jeunes filles, très complices, accompagnées de leurs parents, qui ne cessaient de se regarder, de se prendre à témoin, et de s’esclaffer en choeur. J’ai envie de toi est une comédie tous publics. Quel que soit son âge, on y trouve son compte. Et un conte à dormir debout même car cette pièce n’est qu’une formidable farce. C’est Feydeau qui aurait bouffé du lion… le lion de Tex Avery ! Il ne faut pas y chercher de crédibilité ; il faut laisser son cartésianisme au vestiaire, et se préparer à souffrir des zygomatiques tant ils vont être sollicités.

Gilbert "Critikator" Jouin




lundi 5 août 2019

Les Petites Canailles chantent "Salut les Copains"


Disques MCA
Sortie le 9 août 2019

Carla, Ermonia, Hindy, Lilian et Madison sont tous les cinq issus de l’édition 2018 (saison 5) de l’émission The Voice Kids. Ils sont également tous musiciens. Ils ont été réunis pour former le groupe des Petites Canailles qui reprend une douzaine de tubes qui ont enchanté et fait danser les baby-boomers pendant les fameuses années « Salut les Copains ».
Quand, soixante après, la Génération Z rencontre celle des Yé-yés, l’idée est maline… Il est amusant de penser que leurs parents eux-mêmes n’ont vraisemblablement pas connu cette époque.


Cet album est un véritable bain de jouvence ! Tout du moins pour les plus anciens ; dont je fais partie. Mais, que l’on se rassure, le résultat est tellement probant que cet opus est à mettre entre toutes les oreilles de 7 à 97 ans.
Personnellement, j’ai été bluffé. Et par la qualité vocale de ces ados et par l’efficacité des arrangements. Cet album est superbement réalisé. Les voix, fraîches et juvéniles, pleines d’énergie, s’entrecroisent, se doublent ou se triplent, se muent en chœurs. Leur jeune âge leur permet de passer avec une facilité naturelle en voix de tête. En plus les cinq timbres, aisément identifiables, sont tout à fait complémentaires… C’est un véritable régal acoustique.
Et puis, il faut le souligner, grâce à une parfaite compréhension des textes, leur interprétation est intelligente. Ce qui, en corollaire, est la preuve chantante de la totale intemporalité de certains titres.

Au générique de cet album, à tous seigneurs tout honneur, clin d’œil des Petites Canailles en hommage à leurs glorieux aînés, les trois Vieilles Canailles Eddy Mitchell, Jacques Dutronc et Johnny Hallyday avec les reprises de Be Bop A Lula, Fais pas ci, fais pas ça et Pour moi la vie va commencer.


Pour ce qui me concerne, il y a deux versions 2019 que je trouve meilleures que leurs modèles : Je t’attendrai (le fait d’avoir ralenti la mélodie la rend plus en phase avec son intention. C’est moins trépidant, donc plus fidèle au sens du texte) et Da Dou Ron Ron dont je n’ai jamais aimé les interprétations qu’elles soient de Sylvie Vartan ou de Johnny Hallyday. Les Petites Canailles lui apportent la légèreté et une forme d’esplièglerie qui conviennent mieux à ce titre. Et quel solo de sax !

Sinon, en vrac, j’ai vraiment apprécié les interprétations et les arrangements des Marionnettes de Christophe ; la version pleine de sensibilité de Bang Bang (Sheila), habilement traitée sous forme de dialogue ; la reprise impeccable de Loco Motion (Little Eva) avec ce jeu avec les chœurs et sa partie de saxo ; la superbe réalisation de J’entends siffler le train (Richard Anthony) délicatement agrémentée d’une ambiance country soft, ce qui la rend très agréable à écouter ; la version de Be Bop A Lula (Eddy Mitchell) façon big band, elle aussi judicieusement ralentie et qui monte progressivement en puissance sous l’impulsion des cuivres.


La seule adaptation qui, à mon goût, n’apporte pas grand chose, c’est Pour moi la vie va commencer (Johnny Hallyday). Bien sûr, ce titre fait référence au jeune âge des Petites Canailles pour qui, effectivement, la vie, et personnelle et artistique, en est à ses tout débuts… Je comprends donc aisément ce choix. Mais, et ceci n’engage que moi : puisque le texte de Pour moi la vie va commencer a été écrit par Jean-Jacques Debout, j’aurais aimé trouver au générique de cet album les émouvants Boutons dorés dont cette année marque le 60ème anniversaire. Je suis certain que ces cinq jeunes gens auraient pu en faire quelque chose de fort. Ceci dit, il y aura peut-être un second album…

En tout cas « Les Petites canailles chantent Salut les Copains » est une absolue réussite, un quasi sans-faute.

Gilbert « Critikator » Jouin