mardi 30 mars 2021


Conte Jouin n° 12

J'étais assez lucide. D'ailleurs, 50 ans plus tard, le fond n'a guère changé. Hormis le fait que je n'ai jamais fumé et que je ne bois pas. Quant aux femmes...


Y’a pas qu’ moi dans c’ cas

 

Depuis que je suis né, je crois qu’ j’ marche à côté

Je n’ai pas bien compris à quoi servait la vie

Je voulais rigoler, profiter, m’éclater

Mais j’ai bien vite appris à freiner mes envies

Comme tous les copains je rame

Mais y’a pas d’ quoi en faire un drame

Il reste encor’ l’alcool, la cam’, les femm’, ça calme

 

Sitôt la maternelle on m’a noué des ficelles

Pour que je n’aille pas mettr’ mes pas où faut pas

Même si ma cervell’ joue parfois les rebelles

Je sais que j’ n’ai pas droit à des lois rien qu’à moi

Comme tous les copains je rame

Mais y’a pas d’ quoi en faire un drame

Il reste encor’ l’alcool, la cam’, les femm’, ça calme

 

J’ai pas été gâté par les institutions

Le bahut et l’armée ne m’ont pas fait flipper

Ce n’est pas la passion dans l’administration

Il faut pas s’alarmer, faut savoir s’évader

Comme tous les copains je rame

Mais y’a pas d’ quoi en faire un drame

Il reste encor’ l’alcool, la cam’, les femm’, ça calme

 

Je suis un’ marionnett’ mais j’ me cass’ pas la tête

Je sais que bonheur pass’ pas tous les quarts d’heure

Comme une savonnette, il se fait la jaquette

Ça ne me fait pas peur. En attendant mon heure

Comme tous les copains je rame

Mais y’a pas d’ quoi en faire un drame

Il reste encor’ l’alcool, la cam’, les femm’, ça calme

 

 


vendredi 26 mars 2021

Patrice Romain "Requiem pour l'Education Nationale"

 


Editions Cherche Midi

240 pages

17,50 €

 Sortie le 11 mars 2021

 

Sous-titré « Parents et professeurs doivent savoir ! », cet ouvrage est un véritable brûlot.

Instituteur, directeur d’école puis principal de collège, Patrice Romain, aujourd’hui à la retraite après 43 ans de service (dans le sens noble du terme), sait de quoi il parle.Amer et désabusé, mais lucide, il dresse tout au long de ces 240 pages un constat plus qu’alarmant sur l’état désastreux de notre Education nationale et de son système éducatif.Mais n’est-il pas déjà trop tard ? Le seul emploi dans le titre du terme « Requiem » signifierait-il que la messe est dite ? En tout cas, Monsieur le Principal décrit, tant sa peine est profonde (De Profundis), un douloureux enterrement de premières classes (et même des suivantes). Et il n’y va pas avec le dos du goupillon !

 Ce qu’il y a de fort dans ce faire-part de décès, c’est que chacun de ses chapitres est étayé de nombreux exemples et de moult anecdotes. C’est très argumenté. D’ailleurs, il le proclame lui-même, il ne s’appuie que sur « des faits, rien que des faits »… Rien que du vécu, donc ! La lecture de ces exemples qui abondent est édifiante, confondante, révoltante.

Patrice Romain se contente de constater. Il le fait avec la grande liberté que lui confère son statut de retraité. Sans aucune agressivité, avec même beaucoup d’humour (la politesse du désespoir), il énumère tous les cas qu’il a pu rencontrer. Ça fait parfois sourire puis, soudain, on réalise l’énormité des dysfonctionnements et, alors, notre sang se glace. C’est du présent et de l’avenir de notre jeunesse qu’il est question. C’est excessivement grave et inquiétant.

 Voici, en vrac, les faits les plus criants qui démontrent le déclin inexorable de notre système éducatif :

-          L’inégalité des chances ; la priorité aux « élites »

-          L’absentéisme

-          L’intrusion des parents et les intimidations qu’ils exercent sur le corps enseignant

-          Le manque de sanctions

-          Le recul de la laïcité

-          La complaisance et les compromissions vis-à-vis de l’Islam

-          La pression de plis en plus prégnante des familles musulmanes intégristes

-          Les petites magouilles pour obtenir un bon taux de réussite au DNB (Diplôme National du Brevet)

-          La lâcheté de la hiérarchie

-          La frilosité des hauts fonctionnaires

-          La pléthore de fonctionnaires détachés au détriment des enseignants

-          Le manque de personnel, de remplaçant

Et enfin et surtout :

-          La systémisation obsessionnelle du « Pas de vagues ». Ainsi l’Education nationale pourra rester un long fleuve tranquille…

Résultat :

-          Raréfaction des vocations

-          Niveau global en régression constante

 Moi qui, en raison de mon âge avancé, suis de la « vieille école » et heureux et fier de l’être, j’ai été attristé et choqué par le contenu de cet ouvrage. Le paquebot monstrueux de l’Education Nationale court sur son erre. Si on ne veut pas qu’il échoue lamentablement sur les rivages de l’inculture, y aura-t-il un Gouvernant qui sache en reprendre le gouvernail d’un main ferme et en redresser la trajectoire ?

Il y a un sacré travail... de Romain ?


Conte Jouin n°11

Poème écrit alors que j'étais fonctionnaire. Je m'évadais en fantasmant ardemment sur les jolies clientes qui se présentaient à mon guichet.

Administrativement vôtre

 Si vous êtes en mal d’amour

Vous pouvez m’appeler toujours

Mon nom se trouve dans l’annuaire

A la rubrique « Fonctionnaire »

Et du lundi au vendredi

Je me déplace jour et nuit

Je suis là pour votre secours

J’ suis un fonctionnair’ de l’amour

 

J’ai satisfait aux examens

Je les ai même eus haut-la-main

Puis j’ai eu deux ans d’ formation

Je fus major de promotion

Langu’ vivantes, travaux manuels

Théorie, pratiques sexuelles

Grâce à ma thèse sur l’onanisme

Je suis docteur ès érotisme

 

Pour les dames ou les demoiselles

Je ne crains pas l’excès de zèle

Je garantis le septièm’ ciel

J’ suis un amant professionnel

Je suis payé et bien payé

Mesdames pour que vous ayez

Les plus raffinés des plaisirs

Je réponds à tous vos plaisirs


 Ne voutes faites pas de tracas

Car il y a même des cas

Remboursés, je trouv’ ça normal

Par la sécurité sociale

Mais n’appelez pas le sam’di

Je m’offre deux jours de répit

En fait, tout’ les fins de semaine

Je les consacre à cell’ que j’aime

 

C’est le rêve comme boulot

Et j’y pense dans mon bureau

Si j’avais cette profession

J’aurais une autr’ motivation

Mais ce n’est qu’un rêve tout bête

Et en attendant la retraite

Je me content’ de prendr’ mon pied

Avec des cocottes… en papier


mercredi 24 mars 2021

 


J'ai dix ans

J'ai pas vu l' temps passer mais j'ai dix ans

J'ai beaucoup rêvé pendant dix ans

Critikator a grandi en dix ans

ça paraît bizarre mais

Ce blog-là, c'est ma récré...

Le 24 mars 2011, avec l'aide de mon ami David Pairé au graphisme, je procédais à la naissance de Critikator. 

Grand merci à vous tous qui m'avez fidèlement suivi.

Hâte que les activités théâtrales reprennent pour vous faire de nouveau partager mes coups de coeur !


mardi 23 mars 2021


Conte Jouin n° 10

Inspirée par une histoire vécue. Tout n'est pas vrai, heureusement. C'était en 1968. Je possédais alors une jolie crinière blonde. Si, si !


Les incompris

 

Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Que tu sortes avec moi, qu’on aille au cinéma

Je n’ comprends pas pourquoi il voit du mal à ça

Surtout qu’à chaque fois je te ramèn' chez toi

 

Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Que je prenne ta main pour traverser la rue

Il devait bien penser qu’il ne lui plairait pas

Qu’un chauffeur maladroit ou te blesse ou te tue

 

Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Que je prenne tes lèvres comme pour un baiser

Mais tu es si bavarde qu’il n’y a parfois

Plus que ce moyen-là qui te fasse t’apaiser

 

Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Quand dans la sall’ de bain je te frotte le dos

C’est seul’ment pout t’aider car tu n’arrives pas

Entre tes omoplates à bien laver ta peau

 

Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Lorsque tout doucement je caresse ton corps

Mais c’est pour te détendre quand tu rentres chez toi

Après une dure journée de travail et d’efforts


 Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Quand il rentre chez vous nous trouver dans son lit

Il sait très bien pourtant que tu n’ supportes pas

Qu’il y ait de l’orage ou même de la pluie

 

Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Alors qu’il est tout brun que vos enfants soient blonds

C’est vraiment un hasard car il y a des cas

Où l’hérédité saute une génération

 

Je n’ comprends pas pourquoi ton mari n’aime pas

Que l’on s’aime simplement sans faire beaucoup de bruit

Il devrait oublier ses principes bourgeois

Qui ne nous gênent pas mais l’embarrassent lui

 

 

 

 


vendredi 19 mars 2021

 


Conte Jouin n° 9

Un peu sur le même thème gentiment anti-MLF que le texte "Les Taupes", voici une réflexion teintée de nostalgie machiste datant de la fin des années 60

Le bon temps de la drague

 

La drague

C’était quand on d’mandait aux filles

Si ell’ vivaient chez leurs parents

Sachant d’avanc’ que c’était oui

Et qu’il faudrait être prudent

La drague

C’était on se tient par la main

On va ensemble au cinéma

Des bises, oui, mais copain-copain

A minuit faut qu’ je sois chez moi

La drague

La conquête durait des mois

Quand on avait droit à un sein

C’était le comble de l’émoi

Mêm’ qu’on en parlait aux copains

La drague

Quand on faisait enfin l’amour

On l’avait longtemps préparé

On en parlait depuis des jours

En plus, il fallait calculer

 

C’était le bon temps de la drague

Il fallait d’ la diplomatie

Les fill’ parlaient tout l’ temps d’ la bague

Rêvaient d’église et de mairie

C’était le bon temps de la drague

Fallait un’ patience infinie

Fallait être sérieux, pas de blague

Pour mériter d’aller au lit


 La drague

Maint’nant c’est le domain’ des filles

Elles ont bien retenu la leçon

A pein’ jaugé, jugé, choisi

Que l’on se retrouve en cal’çon

La drague

On n’ caus’ plus avant mais après

C’est ell’ qui ont leur garçonnière

Comm’ les scouts, faut êtr’ toujours prêt

On n’a plus l’ temps d’ fair’ des manières

La drague

Y’ a plus à poser de jalons

On peut pas dir’ qu’ell’ soient mesquines

Si ell’ sont fièr’ d’ leur étalon

Ell’ le présentent à leurs copines

La drague

M’sieur Ogino a fait faillite

Maint’nant il n’y a plus de carême

J’ te plais, tu m’ plais, viens tout de suite

T’es mêm’ pas forcé d’ dir’ je t’aime

 

C’est plus le bon temps de la drague

Y’a plus ce jeu entre elle et lui

Il n’y a plus ces promesses vagues

Qui nous faisaient rêver la nuit

C’est plus le bon temps de la drague

Faire la cour, c’était joli

Au fourreau faut laisser la dague

Pour la biche, y’a plus d’hallali

 

 

 

 

 

 


jeudi 18 mars 2021

Christophe Dominici "Bleu à l'âme"

 


Editions Le Cherche Midi

 362 pages

Cahier photos

18,90 €

 Sortie le 25 février 2021

 

La biographie de Christophe Dominici, parue en 2007, vient d’être rééditée suite à son décès survenu le 24 novembre 2020… La lecture de cet ouvrage nous permet d’apporter quelques réponses quant aux circonstances dramatiques de sa disparition, qu’elle ait été volontaire ou accidentelle.

Christophe Dominici n’a jamais été adulte. Il est resté toute sa vie un ado de 14 ans meurtri à jamais par le décès tragique de sa sœur Pascale, disparue à l’âge de 24 ans dans un accident de la route.D’ailleurs, il le reconnaît lui-même avec une franchise désarmante : « Je suis un homme-enfant » (page 115)… Et, tout au long du livre, on comprend combien il était resté à jamais dévasté par la mort de Pascale : idées autodestructrices (page 41), crises d’angoisse (page 41), manque de confiance en lui (page 64), inquiétude permanente (page 96), autant de problèmes psychiques qui l’amènent à décréter page 175 : « Je ne suis pas un homme heureux ».

 En fait, tout est synthétisé en une dizaine de lignes page 222 : « Je suis un jusqu’au-boutiste. Quand je fais des erreurs, j’ai besoin d’aller droit dans le mur… J’ai besoin d’être comme un funambule, sur le fil du rasoir. J’ai besoin de frôler les ravins, de jouer au poker, pour sentir monter le danger, la peur de tout perdre en une seule fraction de seconde, et l’adrénaline circuler dans mes veines. J’ai besoin de vivre sur un mode dangereux… pour trouver mon équilibre, même si je ne me considère pas comme une tête brûlée ». Tout est dit !

Pourtant Christophe Dominici, heureusement, n’était pas que ce client idéal pour psy. Il pouvait aussi être drôle. C’était un sacré chambreur doublé d’un meneur d’hommes, d’un gagneur. Il n’aurait pas réussi sa prestigieuse carrière de sportif de haut niveau sans ce tempérament contrasté. Chez lui, le yin et le yang se nourrissaient l’un l’autre, se tiraient la bourre à savoir lequel prendrait le dessus. Hélas, c’est le yin qui a emporté ce bras de fer qui aura duré 34 ans ; de ses fatidiques 14 ans à ses funestes 48 ans.

Continuellement à la recherche de la « performance absolue », il était aussi exigeant, sinon plus, avec lui-même qu’avec les autres… Afin de contrebalancer son manque de confiance en lui, il était obsédé par le désir de plaire : « Séduire est chez moi une seconde nature » (page 112). Charmeur, « Homme à femmes » proclamé, certes, mais aussi « terriblement macho » (page 104). On peut affirmer qu’il s’est systématiquement ingénié à détruire son magnifique premier amour. Lucide et autocritique, il raconte sans concession ses excès, ses abus, ses injustices. Il a tout fait pour être désaimé alors que son cœur battait à contre sens.


 A plusieurs reprises, il déclare que « tout est dans la tête ». Quand ça va psychiquement, tout va bien, il renverse des montagnes, il est vaillant, généreux, entreprenant, indestructible. Quand ça ne va pas, il sombre dans la dépression. C’est pourquoi, il avait si souvent recours à des médecins, des psy, à un kinésiologue. Mais cela n’aura pas suffi. Une ultime trahison va avoir raison de lui, anéantissant tous ses espoirs de rebond dans le monde du rugby. Il n’a pas eu la force d’un dernier raffut. Le moulin du club de Béziers a terrassé Dom(inici) Quichotte…

Quand on peut s’enorgueillir d’un palmarès aussi prestigieux que le sien (67 capes, deux Grands Chelems, cinq titres de champion de France…) la gestion de l’après-rugby n’est pas évidente : « Post coïtum animal triste ». Sans l’adrénaline des matchs et des enjeux, sans la fièvre de la compétition, sans les odeurs de vestiaires, sans l’esprit d’équipe, sans la gaillarde camaraderie inhérente à ce noble sport de combat, sans l’amour du public, si l'on n'a pas de projets forts et immédiats, on a tôt fait de se laisser envahir par le spleen.


Bleu à l’âme contient aussi énormément de pages consacrées au rugby. On peut y suivre année après année les paliers d’une incomparable carrière. Christophe était un guerrier au grand cœur. Il était aussi irritant qu’attachant. Il suffit de lire les témoignages de ceux qui l’ont côtoyé et aimé, Bernard Laporte, Fabien Galthié, Max Gazzini et Yann Delaigue, pour comprendre combien il peut manquer aujourd’hui au monde si fraternel et solidaire de l’Ovalie.

Et puis il y a la lettre. La lettre si émouvante que lui adresse son père, dans laquelle une immense douleur se le dispute à une profonde fierté.

 

mardi 16 mars 2021

 


Conte Jouin n° 8

25-26 ans... A fond dans mes délires fantasmés et ma pseudo-misogynie. 


Les flirts du mâle

 

 C’est sous les ciels de lit qu’ils vont s’épanouir

Ces idylliques flirts cueillis le long des rues

Ces féminines fleurs qui vont s’évanouir

Dans nos bras, dans nos draps, dans notre lit en crues

Car notre lit à nous, dragueurs de bonne mine

Est comme une rivière aux sourds débordements

Entraînant en ses flots les trop fougueux amants

Pour les rendre épuisés à la rive câline

 

La femme est un jouet dans nos bras exercés

Un bien joli jouet pour un jeu sans enjeu

Dans nos serments menteurs, ell’ ne voient que du feu

Le feu de leur amour qu’il nous faut attiser

Elles seules s’y brûlent ainsi qu’un papillon

Stupidement épris de la lampe éclatante

Et il ne reste plus de leur passion ardente

Que le goût fort amer de la désillusion


 Ces fleurs manquent de pot et perdent les pétales

Quand l’homme jardinier vient pour les respirer

Elles courbent la tête et s’offrant au vandale

Laissent l’une après l’autr’ leurs feuilles retirer

Et nous, bourreaux des fleurs, n’y voyons qu’une plante

Qui viendra s’ajouter au bouquet de conquêtes

Que l’on laisse faner, pâles et pantelantes

Dans le vase doré que Cupidon nous prête

 

 

 


vendredi 12 mars 2021


Conte Jouin n° 7

N'étant pas un conquérant-né, un séducteur patenté, rien de mieux que je jeter sur le papier une vie rêvée de Casanova. Avec, je l'avoue, une certaine prétention ! On ne va pas se gêner...

Les glandes découvertes

 

 Oui je suis le Christophe Colomb de l’amour

Je suis rev’nu au temps des grandes découvertes

Quand j’embrasse une fille en lui faisant la cour

C’est un nouveau voyage, c’est une porte ouverte

Un nouveau continent qui s’offre à mes regards

Une terre promise qu’il me faut conquérir

En efforts, croyez-moi, je ne suis pas avare

Quand je dois récolter les épices du plaisir

 

Découvrir l’Amérique de même qu’une fille

Est affaire de compas, de boussole et de chance

Si vous perdez le nord, vous trouvez les Antilles

Vous prenez une gifle, c’est là la différence

Mais si vous parvenez au pays recherché

La récompense est grande et vous pouvez alors

Sans perdre un seul instant vous mettre à défricher

Le vierge continent aux merveilleux trésors


 Il n’est rien de plus beau qu’être le premier homme

A déposer le pied ou un quelconque membre

Sur un sol virginal que n’aborda personne

Aussi blond que de l’or, aussi chaud que de l’ambre

Et chaque corps nouveau révélé à nos yeux

Est nouvelle contrée chaque fois surprenante

Hardi navigateur, conquistador heureux

Vogue ta caravelle sur des mers enivrantes

 

Et quand vous n’avez plus rien du tout à apprendre

Que le corps est conquis, soumis, colonisé

Il restera toujours des choses à entreprendre

Mêm’ s’il faut dix échecs pour un ou deux succès

Des continents nouveaux, il y en aura toujours

Tant qu’il y aura des filles il y aura du neuf

Les vieux Christoph’ Colomb rassasiés de l’amour

Apprendront à leurs fils à faire le coup de l’oeuf

 

 

 

 


mardi 9 mars 2021


Conte Jouin n° 4

Ce poème, écrit à 23-24 ans, appartient au registre du délire. En effet, je m'étais marié à 19 ans !


Funeste sauvetage

 

Au secours ! Je me noie, je sens que je m’enfonce

Je suis à bout de forces et ne me débats plus

Je vais abandonner, mes bras ne tiennent plus

Mes jambes se font lourdes ; il faut que je renonce

 

Pourtant sur le rivage il y a ce démon

Pour qui je fais la planche et pour qui je surnage

Et puis mon amour-propre, et l’orgueil, et la rage

Ce démon veut m’aider, mais je dis toujours non

 

Ce démon, c’est la femme, et l’eau le mariage

Si je tiens en surface, ô l’heureux résultat

Je pourrai à jamais, voué au célibat

Chasser la folle idée de me mettre en ménage

 

Mais tiendrai-je le coup ? je sens l’eau s’épaissir

Des algues d’oranger me tirent par les pieds

Je me sens délirer : le maire et le curé

Dans leurs plus beaux atours me font de grands sourires


 Et puis te revoilà et tu me tends la main

Tu tiens une bouée, une bouée bizarre

Qui a forme d’anneau ; je la contemple, hagard

C’est une énorme alliance, un objet inhumain

 

Non, non, je ne veux pas, ôte de mon regard

Ce symbole doré, signe de l’esclavage

Da l’avilissement et de la mise en cage

De l’homme libre et fier qui succombe et s’égare

 

Mais tu m’as envoûté, femelle diabolique

Et comme un automate aimanté par l’amante

La mante religieuse aux noces appétissantes

Je te la tends ma main en un geste tragique

 

A quoi sert de se battre et de lutter en vain

J’aurais dû moins souvent réagir à tes charmes

Au lieu de ça, tu vois, je plie et rends les armes

Je suis pour toi mon loup chèvre du vieux Seguin

 

J’incarne maintenant Prométhée enchaîné

Au poteau du mariage et tu es le corbeau

Au ramage si doux, au plumage si beau

Que j’aime comme un fou car tu m’as aliéné