vendredi 27 février 2009

Belle(s) famille(s)


Comédie Bastille
5, rue Nicolas Appert
75011 Paris
Tel : 01 48 07 52 07
Métro : Richard Lenoir

Une pièce d'Alain Cauchi
Mise en scène par Eric Civanyan
Décor de Thierry Benoist
Avec Isabelle Caubère (Marie-Rose Portellino), Alain Cauchi (Victor Portellino), Félicien delon (Toni Portellino), Thierry Heckendorn (Edouard d'Hublay), Mélodie Orru (Mathilde d'Hublay), Annick Roux (Jeanne-Marie d'Hublay)

Ma note : 7/10

L'histoire : Etouffé par l'amour des siens, Toni a décidé de quitter Marseille. A Paris, il rencontre Mathilde, une jeune fille de bonne famille, qui a, elle aussi, de sérieux soucis avec ses parents... Pour matérialiser leur bonheur et affronter la vie, ils achètent une maison à la campagne et décident de s'unir pour le meilleur. Pour le pire, ils prennent une très mauvaise initiative : inviter leurs parents un week-end pour leur annoncer la bonne nouvelle...
Victor Portellino ferme décharge municipale. Le professeur Edouard d'Hublay, son cabinet médical. Marie-Rose Portellino fait sa couleur. Et Jeanne-Marie d'Hublay accepte de revoir sa fille...

Mon avis : C'est dans le superbe décor d'une maison de campagne que vont s'affronter les familles Portellino et d'Hublay. A ma gauche, les parents de Toni, Victor et Marie-Rose Portellino, un couple d'extraction modeste, haut en couleurs, et affublé d'un très solide accent marseillais... A ma droite, les parents de Mathilde, Edouard et Jeanne-Marie d'Hublay, bourgeois hauts de gamme, aisés et érudits avec, pour la mère, une propension à préciosité qui frise le ridicule.

Les deux jeunes gens, après quelques années d'errance affective, ont retrouvé l'équilibre grâce à la profondeur de leur amour. Forts de la certitude de leurs sentiments l'un pour l'autre, avec la noble intention de prouver à leurs parents respectifs qu'ils sont sortis de crise, ils les convoquent dans leur maison de campagne pour leur annoncer leur mariage.
Le problème, toute louable que soit cette initiative, c'est qu'il existe de part et d'autre de conséquents contentieux. Mathilde, ex-toxicomane, avait rompu tout contact avec une mère futile et égocentrique. Toni, compètement étouffé par l'amour maternel, a tout fait pour exister par lui-même au risque de dégâts colatéraux...

Voici la première couche. La seconde, c'est que chez les parents Portellino comme chez les parents d'Hublay, les couples battent de l'aile. Marie-Rose a même viré Victor pour un sombre trafic de cuivre. Et Edouard d'Hublay semble s'être gentiment construit une vie affective parallèle pour échapper à une épouse acariâtre. Du coup, rien ne va être simple. Et nous allons être les témoins interdits d'une longue scène de ménage(s) ; et aussi de l'affrontement de deux mondes qui ne sont a priori absolument pas solubles l'un dans l'autre... On rit beaucoup, mais le plus souvent jaune. Parfois, c'est même (verbalement) très violent. On n'est ps toujours à l'aise devant ces règlements de compte. Heureusement que les comédiens sont excellents, sinon on risquerait de ne pas sortir indemne d'un tel combat. C'est que tout le monde en prend pour son grade et les quelques vérités que les protagonistes se lancent à la face peuvent parfois faire écho à notre propre vécu. C'est cinglant, grinçant, amer, éprouvant et, en même temps, il y a de la vie. Et comme dit le dicton : "Tant qu'il y a de la vie..."

Sur scène évolue un épatant sextuor de comédiens.
Mathilde est touchante de fragilité. Face à sa mère, elle manque d'assurance. Elle ne puise son courage que dans l'amour qu'elle partage avec Toni. Mais elle a du caractère et elle ne se laisse pas marcher sur les pieds. Le problème, c'est qu'elle est encore en convalescence, donc très vulnérable.
Toni, c'est un peu le même genre en version masculine. Sa mère l'a tellement couvé qu'il a un mal fou à essayer de devenir adulte. Il a beaucoup à prouver. Et son père n'est pas le meilleur exemple qu'il ait eu pour s'affirmer. Lui aussi est hypersensible à toute forme d'agression.
Victor Portellino est un brave homme. Il est simple, nature, plein de bon sens. Mais il est aussi très curieux et a un peu tendance à se mêler de la vie des autres. C'est l'éléphant dans le magasin de porcelaine. Il aime son fils, mais lui aussi a été victime du protectionnisme exacerbé de son épouse vis-à-vis de leur rejeton. Si bien qu'il n'a pas pu lui donner toutes les preuves de cette réelle affection.
Marie-Rose Portellino, qui forme avec son mari un couple véritablement pagnolesque, est une sorte de mama à l'italienne, envahissante et grande gueule, excessive en tout. Il n'y a que le bien-être de son petit qui compte et elle en perd toute retenue et toute lucidité. Une sacrée présence même si, parfois, il lui arrive de crier un peu trop fort.
Edouard d'Hublay est lui aussi un brave homme. C'est un intellectuel au grand coeur. Il a appris à être placide et conciliant. C'est une sorte de blockhaus impavide face aux déferlantes. Il est vrai qu'il lui faut avoir le coeur bien accroché pour résister aux assauts incessants et incongrus de son ingérable épouse. Et, surtout, il adore sa fille et sait le lui montrer.
Et, enfin, il y a Jeanne-Marie d'Hublay ! Quelle numéro de comédienne! C'est elle la grande attraction. Avec sa diction précieuse et affectée, sa bêtise incommensurable, son égocentrisme, sa psychorigidité, sa gestuelle emphatique, ses réactions hystériques, c'est un bonheur ! Pour le spectateur, s'entend... C'est une bonne chose que ce personnage existe car il permet, par son comportement ubuesque, de désmorcer nombre de situations un peu trop tendues.

Voilà, vous êtes prévenus. Belle(s) famille(s) n'est pas une franche comédie. Beaucoup de vérités sont dites et il y a des leçons à en retenir. La morale de cette histoire, c'est que si on y met du coeur, on peut arriver à trouver des compromis qui arrangent finalement tout le monde. Mais il y a du boulot, il ne faut pas ménager sa peine et savoir aussi mettre son ego de côté.

jeudi 26 février 2009

Jérôme Daran


Splendid Saint-Martin
48, rue du Faubourg Saint-Martin
75010 Paris
Tel : 01 42 08 21 93
Métro : Strasbourg Saint-Denis

Spectacle mis en scène Grégoire Dey

Ma note : 8,5/10

Après avoir triomphé au Point-Virgule (deux saisons), puis au théâtre Trévise le temps d'une gestation, Jérôme Daran, le complice de Florence Foresti (il a coécrit ses sketches de On a tout essayé et de On n'est pas couché), gravit une marche supplémentaire en investissant la salle très "Bronzés" du Splendid.

Mon avis : Je me suis régalé ! Pendant plus d'une heure, j'ai bu du petit lait ; mais du petit lait parfumé au vinaigre. Il a bien longtemps qu'un humoriste ne m'avait autant réjoui. J'avais déjà entendu beaucoup de bien de ce lascar, j'avais apprécié sa verve dans ces sketches impayables coécrits avec Florence Foresti, et je trouvais ses chroniques sur France Inter au Fou du Roi particulièrement bien écrites. J'étais donc très heureux de découvrir son spectacle à lui, un spectacle sur la longueur, au cours duquel il peut planter son décor et nous entraîner dans son univers.

Et bien, je n'ai pas été déçu. Au contraire. Rien que le fait de voir tressauter de rire les épaules de la personne devant moi, (non, non, ce n'était pas Sarkozy, c'était un sexagénaire dégarni), c'était du plaisir complice partagé.
En plus de vingt ans de café-théâtre et de one-man show, j'en ai vu des humoristes ! J'ai vu débuter ceux qui tiennent le haut du pavé aujourd'hui. Et bien je peux affirmer que ce Jérôme Daran est un un tout bon, un très bon.
Son spectacle est incroyablement riche et varié. C'est une auberge espagnole où les tapas côtoient les plats consistants. Il est capable de passer du jeu de mot le plus vaseux (mais pas si mauvais que ça !) au sketch avec accent super bien élaboré.
Il est très fort le garçon. Il vous emmène dans une direction, on est content d'y aller avec lui quand soudain il bifurque, en prend une autre, offre une chute, on croit que c'est fini mais ce n'est pas la bonne, et il nous en sort une autre qui nous cloue littéralement. Un rebondissement chasse l'autre, une saillie se rajoute à une autre, c'est vachement balèze. Il a l'rt de pratiquer l'effet de la double lame de rasoir. Résultat : on se poile deux fois plus !

Jérôme Daran a dépassé le stade du sale gosse pour endosser celui du sale pseudo adulte. Il est comme la majorité de ses congénères, les trentenaires : encore au pied du mûr. Et il est bien trop velléitaire pour le franchir de sitôt. Il faut déjà qu'il assume certains traits de caractères assez répandus dont les plus glorieux sont la lâcheté, la mauvaise foi et la pusillanimité. Il en est parfaitement conscient, mais il s'arrange complaisamment avec. Car il y a énormément d'autodérision dans tout cela. Nous autres, les mâles plus dominés que dominants, nous n'avons de cesse que de composer avec les événements en cherchant le plus possible à ne pas prendre nos responsabilités. Il s'empêtre dans es mensonges et dans ses gaffes. Surtout, ne cherchons pas l'affrontement de face. Biaisons...

Le personnage qu'interprète en fil rouge Jérôme Daran, c'est lui, c'est un ami, c'est nous. C'est un glandeur magnifique, un loser chronique, qui voudrait jouir en même temps de tous les plaisirs : les matchs de foot devant la télé avec les copains, les petites mousses au troquet du coin, tout en rêvant d'avoir une vie de couple idyllique avec Sophie. Mais on le sait, elles ont de ces exigences !
Jérôme Daran sait tout faire. C'est un excellent comédien, il prend les accents à la perfection, il chante remarquablement bien. Au fil de son show, il compose une galerie de personnages particulièrement irrésistibles : son grand-père, Jean-Gabriel, le copain un peu affecté, le barman-qui-louche, sa concierge et son sabir incompréhensible, la prof (quels sketch formidable !), Jean-Barnabé, celui qui déclare ingénument "Je tuerais père et mère pour avoir une famille", Daniel, l'animateur ultra ringard... On n'a pas le temps de souffler.
Dans sa façon de raconter ses sketches, de les construire, et de les jouer, l y a parfois du Coluche dans ce gars-là. Et je pèse mes mots. En plus, je ne suis pas le seul à l'avoir remarqué (je l'ai entendu dire à la fin du spectacle).

Nathalie


Théâtre Marigny
Salle Popesco
Carré Marigny
75008 Paris
Tel : 01 53 96 70 20
Métro : Champs-Elysées Clémenceau

Une pièce de Philippe Blasband
Mise en scène par Christophe Lidon
Avec Maruschka Detmers (Sonia), Virginie Efira (Nancy/Nathalie)

Ma note : 7/10

L'histoire : Sonia, une cantatrice en instance de divorce, recrute une prostituée, Nancy.
Le contrat est simple : en échange d'une grosse somme d'argent, Nancy, rebaptisée Nathalie Ribout, doit séduire son ex-mari, Jean-Luc, entretenir avec lui une relation pendant un mois, et tenir Sonia au courant de tous leurs faits et gestes dans le moindre détail...

Mon avis : Le décor, très clair et relativement succinct, ne sert en fait que de cadre aux rendez-vous successifs que vont avoir Sonia et Nancy, les deux protagonistes de cette histoire. Car, après tout, c'est tout ce qui compte. Au moins notre attention n'est-elle pas dispersée et l'on peut à loisir se concentrer sur l'évolution des relations entre les deux femmes et se prendre au jeu d'essayer de deviner comment cette machination va bien pouvoir se terminer...
Le choix de Maruschka Detmers et de Virginie Efira est absolument parfait. Si l'on pouvait émettre quelques doutes en amont sur la présence de l'animatrice de Canal+ - pas si néophyte que cela en la matière puisqu'elle avait déjà foulé les planches en Belgique (La chatte sur un toit brûlant, entre autres) - les appréhensions ont été bien vite levées. Le contraste entre les deux femmes permet une lecture limpide. Sonia est brune, plus mûre, élégante, raffinée, cultivée, socialement installée, elle possède un timbre grave du plus troublant effet. Nancy est blonde, jeune, moderne, primesautière, ses habits de "travail" l'obligent à être provocante, elle n'est pas encombrée par la culture mais elle est pleine de bon sens, et elle possède une voix légère et flûtée... Physiquement, culturellement et socialement, elles sont donc aux antipodes l'une de l'autre. Mais, à elles deux, elles sont pratiquement toutes les femmes !

Maintenant, il y a ce fameux contrat qui les lie... Moyennant un joli petit pactocle, Nancy, devenue pour les besoins de la cause "Nathalie Ribout", va devoir séduire le futur ex-mari de Sonia. Celle-ci, après lui avoir donné toutes les clés pour le faire craquer, exige d'elle des compte-rendus très détaillés de leur relation ; y compris de leurs débats amoureux. Le fait que Nancy soit une professionnelle de l'amour, simplifie la chose car elle ne s'embarrasse pas de fioritures pour les descriptions. Pour elle, tout cela c'est de la routine. Evidemment, elle appelle un chat un chat. Oreilles chastes, s'abstenir. Mais jamais on ne tombe dans la vulgarité. De toute façon, cette abondance de détails est absolument nécessaire pour faire avancer l'action et aussi pour que Sonia, prise à son propre piège, en souffre...

Je n'en dirai pas plus. La construction de cette pièce est un habile mécano. Même si, par la volonté de l'auteur, on ne comprend pas toujours où l'on veut nous emmener, on s'attache à ces deux femmes. Chacune est aimable". On n'a pas envie que ça termine mal pour elles. Dans ce raccourci de vie, dans cette parenthèse d'un mois, nous avons tout un concentré de sentiments. On est intrigué, on rit, on est choqué, on est ému.
Maruschka Detmers joue plus dans la nuance. C'est son personnage qui le veut. Elle doit se montrer à la fois autoritaire (c'est elle qui dirige les débuts et les débats) et retenue (c'est son éducation doublée de sa frustration de femme qui l'exigent). Elle pratique un peu la pêche au gros avec Nathalie pour appât. Parfois, il faut laisser filer la ligne, parfois il faut ferrer. C'est avec cette stratégie que le gros poisson, Jean-Luc, mordra à l'hameçon. Au fur et à mesure que la pièce avance, on suit le cheminement de ses sentiments. Et elle joue réellement bien cette évolution. Jusqu'à cet impressionnant monologue où elle exhale soudain toute sa douleur..
Virginie Efira - la grande révélation de ce two-women show - a hérité avec ce personnage d'un rôle à prendre avec des pincettes. Elle campe une Nancy confondante de naturel, consciente de ses lacunes et du désastre qu'est sa vie, mais avec une luminosité réjouissante. Elle se dit résignée, mais elle n'est pas encore vaincue. C'est vraiment une brave fille. Le marché que lui propose Sonia constituera-t-il sa rédemption ? Il faut saluer la finesse de son jeu quand elle relate ses sensations selon qu'elle les vit en Nancy ou en Nathalie. Ce dédoublement n'est possible que par le biais d'une écriture véritablement ciselée. Virginie est tout le temps crédible. Et quelle émotion elle dégage dans cette scène où elle raconte sa famille inventée (inventée ?) !

Pour savoir comment ce psychodrame se termine, il n'y a qu'une chose à faire : aller au théâtre Marigny. Vous y passerez un bien joli moment de comédie pure, avec deux bien charmantes dames, et avec une histoire qui nous embarque bien.

vendredi 20 février 2009

Tout le monde aime Juliette


Le Splendid

48, rue du Faubourg Saint-Martin
75010 Paris
Tel : 01 42 08 13 45
Métro : Strasbourg Saint-Denis

Une pièce écrite et mise en scène par Josiane Balasko
Décors de Stéphanie Jarre
Costumes de Fabienne Katany
Avec Marilou Berry (Juliette), Jacky Nercessian (Magir), Lannick Gautry (Vincent), David Rousseau (Frédéric)

Ma note : 6/10

L'histoire : Après le naufrage de leur bateau de croisière dans la mer des Caraïbes, quatre rescapés vont se retrouver dans une île déserte. Vincent et Fred, jeunes cadres plutôt frimeurs, qui travaillent dans la même boîte, Juliette, jeune fille simple et naïve secrètement en quête du grand amour, et Magistro le Fakir, qui faisait son numéro de double-vue à bord au moment du naufrage. Leur cohabitation ne va pas être aisée, Juliette ayant le don d'exaspérer les jeunes gens qui en font vite leur tête de turc. Mais Magistro va révéler d'étranges pouvoirs, lesquels ne vont pas forcément arranger la situation...

Mon avis : Le pitch et la distribution sont attrayants. Qui, en effet, mieux que Josiane Balasko pouvait concocter du sur-mesure pour sa fille Marilou ? La complicité mère-fille étant évidente, l'auteur pouvait se permettre de pousser le bouchon assez loin pour l'actrice. Et pourtant, à l'issue du spectacle, on est en droit de se demander si cette connivence affectueuse n'a pas mis inconsciemment un frein à la veine irrévérencieuse de madame Balasko. On peut penser que, vu la situation dans laquelle elle place ses quatre naufragés, elle aurait pu aller plus loin dans le délire. Analysons donc Tout le monde aime Juliette...

D'abord, il faut saluer la beauté du décor élaboré par Stéphanie Jarre. Son exotisme est si réaliste que nous nous trouvons effectivement dans une île des Caraïbes en compagnie de nos naufragés. Des palmiers, des rochers, c'est superbe ! Ensuite, les costumes eux aussi sont intéressants. Originale l'idée de placer le naufrage au beau milieu d'un bal masqué. Ce qui fait que nous voyons débarquer trois personnages insolites : un Chaperon Rouge avec son petit panier d'osier, un pirate avec un ridicule sabre en plastique, et un cow boy avec toute sa panoplie. Finalement, seul le Fakir Magistro n'est pas déguisé, mais son costume de scène, particulièrement flashy, est tout aussi saugrenu. Enfin, il faut également souligner l'importance de la bande-son : bruit des vagues, orages, coups de tonnerre, chant de grenouilles... Tout cela est remarquablement restitué.
Le décor est donc planté. Dépaysement garanti...

Avec l'arrivée des naufragés, l'action peut commencer. Très vite, on discerne le profil psychologique de chacun. Juliette est une gentille fille, un peu naïve mais pas dupe non plus, c'est une fine observatrice, elle aime à rendre service, mais c'est également une sorte de midinette rêveuse et romantique, tout en ayant sur son apparence physique une totale lucidité. Fred, le cow boy, est un garçon plutôt cool, accomodant, son naturel optimiste lui permet de s'adapter assez bien à la situation pourtant dramatique dans laquelle il se trouve. Vincent, le pirate, est son parfait opposé ; il est vindicatif, agressif, il se plaint tout le temps, en fait il est tétanisé par la trouille... Quant à Magistro, c'est une sorte de mage ; il possède donc énormément de recul sur tout, il est plein de sagesse et l'empathie qu'il ressent pour Juliette l'amène à user de ses pouvoirs pour la protéger. Voire, à en abuser...

La première partie de cette pièce est réellement agréable. Elle est vive, enlevée, truffée de siruations cocasses, un peu convenues certes, mais vraiment drôles. Marilou Berri fait une fois de plus preuve d'un formidable abattage. Elle a une vraie présence (il faut dire qu'elle a de qui tenir et, parfois, elle possède le timbre de voix de sa mère et certaines de ses mimiques). Elle joue avec son physique avec énormément d'autodérision. D'autant que les deux garçons, qui ne la supportent pas, ne lui font pas de cadeaux à ce sujet... Une des meilleures trouvailles de la pièce est le journal que tient Juliette. Quand elle se confie à lui à voix haute, cela donne lieu à de savoureux apartés pleins de candeurs et émaillés de bonnes réflexions. Ce sont de très bons moments.
Marilou est donc impeccable, et les deux garçons le sont aussi. Sans cesse à se chamailler, ils ne sont d'accord que sur une chose : pourrir la vie de ce Chaperon Rouge envahissant et intarissable. Jacky Nercessian, de son côté, campe un personnage de mage impayable, plus vrai que nature, un peu grandiloquent, sûr de lui, à l'élégance un peu trop voyante. C'est un brave homme qui déteste l'injustice. Il est en permanence dans le second degré...

Et puis, inexorablement, aux abords de la deuxième moitié, la pièce commence à s'essoufler, à perdre du rythme. Les dialogues se font moins incisifs. L'intervention du surnaturel accroche mal avec nos esprits cartésiens. Il y a certes encore de bonnes répliques et quelques situations drolatiques, mais l'auteur tourne un peu en rond comme un requin repu ferait nonchalamment le tour de l'île en jetant un regard quasiment dédaigneux sur ses éventuelles futurs repas.

Ben sûr que tout le monde ne peut qu'aimer Juliette. Elle est attachante et sympa et elle nous fait passer un bon moment de comédie. Mais on quitte le Splendid avec un petit goût d'insatisfaction. On sent que Josiane Balasko aurait pu aller un peu plus loin dans la férocité. Mais sa fille a bien du talent...

La pensée ou l'aphorisme du jour

Un cardinal qui a bu un coup de trop, c'est une éminence grise...

mercredi 18 février 2009

La pensée ou l'aphorisme du jour

Souvent, les femmes qui sont des canons, sont hélas aussi de vrais boulets..."

Double jeu


Petit Hébertot
78bis, boulevard des Batignoles
75017 Paris
Tel : 01 43 87 23 23
Métro : Villiers

Un spectacle écrit par Jean-Félix Lalanne
Mis en scène par Philippe Lellouche
Avec Jean-Félix Lalanne et Robin Migné (dans le rôle de l'enfant)

Ma note : 8/10

L'histoire : Comment pouvoir se permettre de faire un concert de guitare solo en y mélangeant guitare classique, picking, country, jazz, bossa nova, flamenco, sans être accusé de faire une démonstration technique ?
La réponse : en racontant une histoire... Une histoire qui concernera tout le monde, guitaristes ou non ; l'histoire de l'initiation musicale d'un enfant qui, découvrant la musique comme on découvre un jeu, se révèlera être un compositeur et un concertiste sans même s'en rendre compte...
Qu'est-ce qui fait qu'un gamin découvrant une guitare par hasard derrière un poste de télévision, en y posant ses doigs, peut d'un coup voir sa vie se dessiner, se transformer... Que serait-il arrivé s'il n'avait pas saisi cette guitare ? Serait-il quand même devenu musicien ?

Mon avis : Histoire de nous mettre tout à fait à l'aise, Jean-Félix Lalanne nous reçoit dans son salon. Enfin, son salon de théâtre plutôt. Un canapé rouge sur lequel repose un ballon de foot, un piano, deux lutrins, des plantes vertes et... des guitares. Dont une insolite guitare "siamoise" à deux manches inversés !
On sait pourquoi on est venu, et on ne sera pas déçu. Jean-Félix Lalanne nous a invités pour nous raconter son parcours de musicien commencé quand il avait 11 ans. La meilleure définition de ce spectacle hors norme, c'est son metteur en scène, l'humoriste Philippe Lellouche, qui nous la livre : "On n'est plus dans un récital de guitare traditionnel, mais dans un spectacle qui mélange théâtre et musique, humour et tendresse, réalisme et imaginaire".

De même que sa guitare possède deux manches, Jean-Félix Lalanne nous propose un spectacle à deux niveaux de lecture. Son histoire d'une part, avec son enfance et son adolescence en toile de fond et, d'autre part, sa passion pour la guitare, un instrument qui lui est tombé par magie entre les mains. Ce qui fait que les principaux passages de sa vie sont illustrés par une mélodie spécifique. Jean-Félix est un excellent conteur. Il ne se la pète pas, il ne roule pas sa caisse. Tout en faisant "le charmant", il saupoudre ses narrations de pas mal d'humour et d'énormément d'autodérision. Le postulat est posé d'entrée : ses dons pour son instrument de prédilection sont d'une nature irrationnelle. C'est, après tout, le propre des dons... Un jour, à 11 ans, il déniche une guitare dormant derrière un téléviseur, il s'en empare et essaie de reproduire les notes d'une musiquette qu'il connaît : Jeux interdits ! Drôle de titre pour une première rencontre qui allait se transformer en histoire d'amour puis en passion.

Mais là où ce spectacle prend tout-à-coup la dimension "imaginaire" évoquée par Philippe Lellouche, c'est que le récit de Jean-Félix est régulièrement interrompu par les interventions d'un gamin de 13 ans qui, par la magie du procédé de l'hologramme, se mêle aux confidences de l'artiste. Il s'en suit donc un dialogue quelque peu surréaliste entre l'adulte qu'il est aujourd'hui et l'ado qul était à 13 ans. Cela donne quelques échanges assez cocasses et croustillants.

Tout au long de son récit, Jean-Félix évoque les rencontres qui ont bouleversé sa vie de musicien. Marcel Dadi d'abord, son "maître", puis son prof de guitare à Marseille, Chet Atkins et, plus tard, Jean-Marie Meissonnier, avec lequel il va former longtemps un brillant binôme.

Je vous laisse découvrir le programme musical, tellement riche et varié, de ce spectacle, pour ne parler que de la fascination que le jeu de mains de Jean-Félix exerce sur nous. Devant une telle agileté, le mot "virtuosité" prend tout son sens. Jean-Félix fait du corps à cordes avec sa guitare, ils ne font plus qu'un. C'est à elle, en fait, que s'adressent ses nombreux sourires, plus qu'au public. Il me suffisait d'entendre les réactions enthousiastes et respectueuses de Francis Lai, placé juste derrière moi, pour saisir à quel niveau d'excellence évolue le frère cadet de René et Francis.
Alors, imaginez dans quel état d'émerveillement extatique nous pouvons nous sentir, nous autres pauvres profanes.

Avec son habile mélange de mots et de musique(s), ce spectacle est intelligemment construit, tout simple mais très efficace et à la portée de tous.
En matière de virtuosité, Jean-Félix Lalanne gagne aisément les deux manches... et le label !

mardi 17 février 2009

La pensée ou l'aphorisme du jour

"Quand une femme pratique l'onanisme, cela n'implique pas forcément qu'elle soit maitresse d'elle-même"

lundi 16 février 2009

Le Facteur sonne toujours deux fois


Théâtre des Mathurins
36, rue des Mathurins
75008 Paris
Tel : 01 42 65 90 00
Métro : Havre-Caumartin/Saint Augustin/Auber

D'après le roman de James M. Cain
Scénario d Harry Ruskin et Niven Busch
Adaptation de Jean et Alice Curtelin
Mise en scène de Daniel Colas
Avec Etienne Chicot (Nick Papadakis), Olivier Sitruk (Frank Chambers), Laura Presgurvic (Cora Papadakis), Yvan Varco, Xavier Lafitte.

Ma note : 8,5/10

L'histoire : Frank Chambers, un "Hobo", sorte de routard qui a choisi ce mode d'existence : billard, cartes, arnaques, et prompt à donner le coup de poing, s'arrête à la station service des Twin Oaks (les Chênes-Jumeaux), tenue par Nick Papadakis et sa jeune femme Cora...

Mon avis : Ouh la la, quelle intensité ! Et quel trio !
J'avais été extrêmement séduit par le film avec Jack Nicholson et Jessica Lange et je me demandais comment Daniel Colas s'en sortirait avec sa transposition au théâtre. Et bien, c'est tout simple, au bout de quelques minutes, on ne pense même plus au film !
Cette adaptation est vraiment bien ficelée. La station service-restaurant qui sert de décor à ce drame est joliment reconstituée avec ses deux pompes rutilantes typiquement américaines. La bande-son, à grand renfort de blues râpeux, nous transporte immédiatement dans le sud-ouest des Etats-Unis, en Californie précisément. L'action peut commencer, nous sommes prêts.

En préambule, Olivier Sitruk (Frank) nous explique sa situation. Pour lui, la route va se terminer. Alors, résigné, il jette un dernier regard dans le rétro, et il nous invite à remonter le cours du temps, à nous exposer comment il en est arrivé à cette issue fatale. Flash-back...
Quand Frank débarque dans ce havre paumé en plein désert californien, il recherche juste le gîte et le couvert. Le patron de l'endroit, le brave Nick, après l'avoir sondé, décrète que ce n'est pas un mauvais bougre, et il lui offre de quoi se nourrir. Puis, dans son élan de générosité, il lui propose même de l'embaucher comme garagiste. Mais le travail est un mot qui fait visiblement peur à Frank. Il préfère sa liberté et tailler la route. Chose qu'il s'apprête à faire quand Cora, la jeune épouse du patron, fait son entrée dans le bar...
Et là tout bascule.

Le Facteur sonne toujours deux fois est une tragédie grecque. On sait tout de suite que l'appel des sens va bouleverser la vie de ces deux-là. Et, en dommage colatéral, celle de ce pauvre mari.
Dès leur premier regard, la sensualité devient palpable. Leur attirance l'un pour l'autre est irresistible, au mépris de toute raison, de toute prudence. Le pire, c'est que Nick se montre profondément sympathique. Il porte une réelle affection envers Frank. Mais son épouse est trop jeune, trop belle, trop désirable, trop frustrée, trop languide, trop avide de plaisir. La bonhommie et la gentillesse de Nick ne font pas le poids face au tempérament fougueux et au physique de Frank.
Grâce à une mise en scène très habile, on sent la présence implacable du soleil. La chaleur est omniprésente, elle exacerbe les sens. Les gestes sont plus lents, les corps se font lascifs, le désir est chauffé à blanc...
Il ne faut pas en dévoiler plus sur le déroulement de cette histoire d'amour. Car ce n'est pas qu'une affaire de cul, c'est d'abord et avant tout une vraie histoire d'amour. Cora d'abord puis, petit à petit Frank, éprouvent l'un pour l'autre des sentiments sincères. Bien que l'on connaisse la fin, on se prend parfois à rêver qu'ils s'en sortent. Même si c'est totalement amoral. C'est beau une belle histoire d'amour. Et puis, il faut bien l'admettre, en dépit de sa sympathie, Nick n'est pas très ragoûtant.
Et là, il faut parler de ce trio infernal, de ce trio classique.

Etienne Chicot donne au personnage de Nick une formidable dimension, toute en contraste avec Olivier Sitruk. Il est Grec avant d'être Américain, d'où son sens de l'hospitalité et son amour de la famille (il rêve d'en fonder une avec Cora). Il est tout à fait conscient d'avoir eu la chance inespérée de ramener dans sa couche ce prix de beauté. Elle lui doit tout, il lui donne tout, donc elle lui appartient... Il étale un registre d'une phénoménale amplitude. C'est un rôle très riche pour un comédien. Mais il passe par un tel mélange de sentiments qu'il faut une sensibilité de stradivarius pour les interpréter. La gentillesse, la brutalité, la colère, la fragilité, la truculence, la lubricité, la méfiance, la manipulation, la domination... Toute cette gamme figure sur sa partition. Et il nous offre un véritable récital.

Olivier Sitruk, une fois de plus, se montre d'une justesse remarquable. Il est sobre, tout en retenue, jusqu'au moment où il faut lâcher les chevaux. C'est une voiture de sport. Grâce à sa finesse de jeu, on décrypte aisément l'évolution de ses sentiments. Au début de son idylle avec Cora, il n'engage que son sexe puis, peu à peu, il engage son coeur. Le petit opportuniste du début se mue en parfait soupirant, protecteur et aimant. Il en oublie son amour chronique pour la liberté. Il est prêt à s'engager, il est même ravi de sa prochaine paternité. Il est pratqiuement de toutes les scènes puisque c'est avec lui que l'histoire commence, c'est par lui que l'adultère arrive, et c'est avec lui que l'histoire se termine. Sitruk est tout bonnement excellent.

Et enfin, il y a Laura Presgurvic... Laura, il y a belle lurette que je la connais et que je la suis au gré de ses expériences scéniques. J'ai assisté à ses débuts un peu gauches (elle était toute jeune) dans la comédie musicale de son papa Autant en emporte le vent, je l'ai vue s'affirmer et prendre un peu d'épaules dans Les demoiselles d'Avignon, une pièce pas facile. J'étais donc très attentif à sa prestation dans ce rôle lourd et particulièrement casse-gueule car on peut y tomber très vite dans l'à-peu-près, voire dans la caricature, pire dans l'exhibitionnisme. Et bien, elle m'a cueilli d'un formidable crochet au plexus. Elle s'est remarquablement glissée dans la peau de Cora jusqu'à en prendre complètement possession. Pratiquement muette au début, elle ne laisse filtrer que ses regards appuyés et c'est son corps qui se fait bavard. Puis, quand elle se laisse submerger par le désir et la passion, elle laisse exploser toute son animalité. Elle est absolument impeccable. Après un tel rôle, on peut tout jouer.

De toute façon, si un seul de ces trois comédiens avait joué petit bras, Le Facteur ne serait pas venu sonner une deuxième fois, il serait tombé de vélo avant. Car cette tragédie est constituée d'une multitude de rouages fragiles qui se doivent d'être parfaitement huilés. Si un seul grince ou se déboîte, c'est tout l'édifice qui dégringole. Et la pièce ne serait en aucun point crédible.
Cette adaptation est donc une totale réussite. Il suffit de réaliser le silence impressionnant qui règne dans la salle des Mathurins et de ressentir la tension qui prend les spectateurs au ventre. Il y avait du beau monde ce soir là (Roger Hanin, Roger Dumas, Vladimir Cosma...) et chacun avouait avoir été bluffé par cette mise en scène et par le jeu de ces trois talentueux comédiens.
Ce Facteur présente donc une excellente distribution. Il peut sans souci partir en tournée...

jeudi 12 février 2009

La pensée ou l'aphorisme du jour

Si un "oxymore" est étymologiquement le rapprochement de deux mots qui semblent contradictoires, il n'empêche que, phonétiquement, c'est aussi un superbe pléonasme !

Chat en poche


Théâtre Saint-Georges
51, rue Saint-Georges
75009 Paris
Tel : 01 48 78 63 47
Métro : Saint-Georges

Une pièce de Georges Feydeau
Mise en scène par Pierre Laville
Décor de Stéphanie Jarre
Costumes de Bonnie Colin
Avec Jean Benguigui (Pacarel), Marianne Giraud (Marthe Pacarel), Jean-Marie Galey (Landernau), Valérie Mairesse (Amandine Landernau), Arthur Jugnot (Dufausset), Julie Wingens (Julie Pacarel), David Macquart (Lanoix de Vaux), David Talbot (Tiburce)

Ma note : 7/10

L'histoire : A Auteuil, près de Paris, Pacarel, un commerçant qui s'est retiré après s'être "enrichi dans la fabrication du sucre par l'exploitation des diabétiques", annonce qu'il vient d'engager le fameux ténor Dujeton pour interpréter l'opéra que sa fille Julie vient de composer d'après Faust et qu'il entend faire jouer à l'Opéra même. Dujeton venant de se produire à Bordeaux, Pacarel a demandé à son vieil ami bordelais Dufausset de s'entremettre pour lui envoyer le ténor.
Or, voici que se présente chez Pacarel un jeune homme venant de Bordeaux et qui se recommande de Dufausset. Sans se poser plus de questions, Pacarel lui réserve un accueil triomphal, car il ne peut être que le ténor en question. Pour le soustraire à toute concurrence et en obtenir l'exclusivité, Pacarel fait signer au supposé Dujeton un contrat mirifique...

Mon avis : Ne boudons pas notre plaisir. Chat en poche n'est sans doute pas le meilleur Feydeau, mais le rythme et la fameuse mécanique de maître Georges sont là. C'est sans doute dans cette pièce en tout cas qu'il a dû battre son record de quiproquos. C'est une véritable avalanche ! Inutile de chercher un soupçon de crédibilité ou de la cohérence, il s'est totalement affranchi d'un quelconque fil à la patte pour nous livrer un invraisemblable délire de situations toutes plus saugrenues les unes que les autres.
Il n'est donc que de s'installer confortablement dans son fauteuil (ce qui n'est pas si évident que cela compte tenu de leur exiguïté) et de se laisser emporter par la folie ambiante.
En dépit de l'énormité des situations, l'enthousiasme des comédiens, la façon très sérieuse qu'ils ont tous à se mettre dans la peau de personnages totalement farfelus, nous gagne à leur cause. Ils y vont tellement à fond ! Et ils sont tous épatants. En plus, par le truchement de très nombreux apartés, le public est sans cesse sollicité et pris à témoin, ce qui lui permet de dérouler plus aisément l'écheveau complexe de cette pelote de malentendus.
Jean Benguigui campe une espèce de parvenu aussi naïf que suffisant. C'est une sorte de monsieur Jourdain qui se pique de culture artistique (particulièrement en matière d'opéra) et qui estime que l'on peut tout s'offrir avec de l'argent. Heureusement, il est guidé par le désir de faire plaisir à sa chère fille, Julie. Imperturbable, il sautille, virevolte, tel un chef d'orchestre qui veut tout gérer. Il poursuit son idée fixe et rien ne peut le faire quitter ses objectifs. Il est un parfait personnage de Feydeau.
Marianne Giraud, qui joue son épouse, cache sous son maintien de dame du monde, une fantaisie débridée tellement en décalage avec sa posture que quand elle dérape, elle dérape. Quand elle joue à la "vierge effarouchée", elle est irresistible.
Valérie Mairesse, sanglée dans une très voyante robe rouge à parements dorés, débordante de formes on ne peut plus généreuses, est parfaite dans son rôle d'épouse un peu simplette, qui s'enflamme pour un rien et qui voudrait-tellement-être-frivole. Complètement fofolle !
Arthur Jugnot est excellent. Il joue à merveille au provincial un peu emprunté, mal dégrossi, qui ne comprend pas toujours ce qui lui arrive mais décide d'en profiter hardiment. Avec son sourire enjôleur, son aisance physique (quel jeu de jambes !) il est l'idéal jeune premier de boulevard. C'est aussi le champion de l'aparté, un exercice très délicat à gérer qu'il effectue plutôt brillamment.
Jouant à ravir de sa belle voix grave, Jean-Marie Galey interprète un médecin compassé et onctueux, qui s'essaie parfois à quelques traits d'esprit qui tombent lamentablement à plat. Il s'estime tellement supérieur aux autres et se croit plus malin qu'il en finit par être ridicule puisque personne ne s'en aperçoit.
Julie Wingens amène sa blondeur et ses couettes en équerre dans le rôle de Julie. Avec sa bonne bouille et ses attitudes un peu maniérées, poussant la chansonnette pour un oui pour un non, elle fait preuve d'une jolie fraîcheur espiègle.
David Macquart, en fils à sa maman très obeïssant, mais prêt à jeter sa gourme ailleurs que chez les Pacarel, apporte une note burlesque remarquablement maîtrisée.
Enfin, David Talbot, dans la livrée du domestique Tiburce, fait preuve d'un jeu très juste.

Vous l'aurez compris, tous les comédiens sont réellement très bons. Les dialogues comportent quelques saillies savoureuses. On assiste à certaines scènes qui, dans l'absolu, nous sembleraient débiles, mais qui nous font éclater de rire (par exemple l'échange entre Julie et son "fiancé" quand ils essaient de respecter les consignes édictées par leurs mères respectives). En fait, dans ce Chat en poche, tout n'est prétexteu'à rire. Que demander de plus ?
C'est d'ailleurs la marque de fabrique de ce théâtre Saint-Georges. Saint-Georges... Feydeau ? Rions pour vous !

mercredi 11 février 2009

César, Fanny, Marius


Théâtre Antoine
14, boulevard de Strasbourg
75010 Paris
Tel : 01 42 08 77 71
Métro : Strasbourg Saint-Denis

Une pièce d'après l'oeuvre de Marcel Pagnol
Adaptée et mise en scène par Francis Huster
Décors de Thierry Flamand
Avec Jacques Weber (César), Francis Huster (Panisse), Hafsia Herzi (Fanny), Stanley Weber (Marius), Urbain Cancelier (Escartefigue), Charlotte Kady (Honorine), Eric Laugérias (Monsieur Brun)...

Ma note : 7,5/10

L'histoire : L'histoire d'amour légendaire des Roméo et Juliette de Marseille : la belle Fanny, la fille d'Honorine, la marchande de poissons du vieux port, et du beau Marius, le fils de César, le cafetier du Bar de la Marine, que la vie va séparer alors qu'il s'aiment à la folie et qu'un enfant va naître.
Marius ne songe qu'à la mer et aux îles lointaines, et Fanny, acceptant de le laisser partir, se sacrifie en épousant Panisse, le riche maître voilier du port, pour sauver l'honneur de la famille et donner un nom à l'enfant...

Mon avis : Recréer la fameuse trilogie de Marcel Pagnol, le pari était sacrément gonflé ! Et pourtant, Francis Huster a complètement réussi cet incroyable challenge. Pendant trois heures, on se régale. On s'amuse, on rit, on s'attendrit, on s'émeut...

On vit.Dès la première image, sur un air de tango joué à l'accordéon, on est transporté à Marseille, sur le vieux port, avec Notre-Dame de la Garde en toile de fond. Il faut en effet souligner le réalisme et la magistrale beauté des décors. On entre de plain-pied dans le Bar de la Marine, on fait partie des clients ; des clients dont certaines silhouettes nous sont immédiatement familières. Avant même qu'ils soient interpellés, on reconnaît Félix Escartefigue, le sympathique capitaine rondouillard du "ferry-boate" ; on reconnaît monsieur Brun, le Lyonnais, tiré à quatre épingles ; on reconnaît Fanny, ardente et pétillante ; et on reconnaît Marius, beau ténébreux au tempérament quelque peu rêveur... L'accent y est, le pastis aussi, nous sommes en plein dans l'imagerie pagnolesque. Pas une fausse note !

Et puis, après s'être fait un temps désirer, apparaît César... C'est qu'on l'attend au tournant Jacques Weber. Comment va-t-il réussir à se glisser dans le tablier bleu du bistrotier étrenné par l'immense Raimu ? Et bien, en dix minutes, il nous le fait oublier. On ne voit plus, on n'entend plus que Jacques Weber ! Il se livre à un véritable festival : truculent, matois, émouvant, hâbleur... Avec une faconde toute méridionale, il prend possession de tout l'espace.Autour de lui, chacun profitant de cette "énaurme" présence, de cette générosité communicatrice, est aspiré vers le meilleur. Francis Huster nous donne la sensation d'avoir réussi à s'entourer d'une authentique troupe de théâtre tant ça fonctionne bien.Le casting est parfait !
Hafsia Herzi (originaire de Manosque, César du Meilleur espoir féminin pour sa prestation dans La graine et le mulet) efface sans aucune peine l'image d'Orane Demazis qui, il est vrai, était une actrice plutôt approximative, avec son jeu pas très naturel et son timbre de voix énervant. Hafsia campe une Fanny débordante de jeunesse et de vitalité. Un vrai tempérament.
Urbain Cancelier EST Escartefigue. Il nous offre, sans en rajouter, une prestation haute en couleurs, rigolarde, pleine de bonhommie. Il irradie littéralement. C'est le brave homme dans toute sa cordialité.
Eric Laugérias a su adopter le profil sérieux, limite affecté et pincé de monsieur Brun, cet "estranger" venu du Nord. Son désir de se faire adopter est si évident, qu'il en est touchant. On voit bien qu'il n'est pas dupe, mais il joue le jeu, ce qui le rend d'autant plus sympathique. Il est un excellent contrepoint à Urbain Cancelier.   
Charlotte Kady est également une des bonnes surprises de cette distribution. Là où on attendait une grosse marchande de poisson, elle apporte une réelle féminité à Honorine. Elle s'en tire remarquablement bien avec un rôle qui n'est pas des plus faciles car elle passe par tellement de sentiments qu'il faut une expérience solide pour les extérioriser avec un tel brio.
Stanley Weber, naturellement séduisant, se débrouille avec habileté de toutes les contradictions de Marius. Son envie d'embarquer et de connaître les îles du bout du monde est si forte qu'elle le rend parfois mélancolique, voire taciturne. En même temps, il est partagé avec l'amour sincère qu'il porte à Fanny. Il joue d'ailleurs à merveille la jalousie qu'il éprouve à l'encontre de Panisse. De même qu'il se révèle véritablement émouvant dans ses scènes de tendresse avec César. C'est un très bon Marius.
Et puis il y a Francis Huster. Un Francis Huster qu'il faut saluer chapeau bas pour la qualité de sa mise en scène. Mais également un Francis Huster dont le choix de jeu pour interpréter Panisse m'a laissé quelque peu décontenancé. Pourquoi en a-t-il fait un personnage aussi agressif, soupe au lait, prompt à s'emporter ? Pourtant, dans mes souvenirs, Panisse était quelqu'un de foncièrement conciliant et gentil. Dans la première partie, Francis nous le rend presque antipathique. Il y a sans doute une raison à cela, une autre lecture. Heureusement, dans le milieu de la deuxième partie, il réussit à se montrer humain et touchant. C'est le seul hiatus que je formulerais sur l'adaptation de cette pièce avec, aussi, quelques petites longueurs en tout début.

Revenon un instant sur la qualité des décors. Pour la nous sortons du Bar de la Marine pour nous retrouver en terrasse, au grand soleil. Sur le quai tout proche, les gréements d'un voilier envahissent un coin de ciel bleu... Un peu plus tard, le bateau ayant pris le large, on distingue l'escarpement du château d'If. C'est absolument superbe !

Evidemment, dans cette version, nous retrouvons quelques scènes mythiques de la trilogie. Nous les attendons. On se surprend à anticiper sur des répliques que l'on connaît quasiment par coeur. C'est vraiment jubilatoire que de les guetter et d'en goûter tout le suc quand elles surviennent. Il y a de très grands moments de comédie, des scènes où l'émotion nous étreint. Et, bien sûr, on rit souvent.
En conclusion, Francis Huster peut être fier de son travail. Il a su restituer la profonde humanité qui se dégage de cette histoire.  
Et puis il y a Jacques Weber... Epoustouflant, au faîte de son art, énorme de présence. Il sait tout faire, tout jouer, il est tout simplement fa-bu-leux !

Tout petit vu du ciel


Petit Théâtre de Paris
15, rue Blanche
75009 Paris
Tel : 01 42 80 01 81
Métro : Trinité d'Estienne d'Orves / Blanche

Un spectacle de et avec Michel Lagueyrie
Mis en scène par Marc Fayet

Ma note : 8/10

L'histoire : Tout petit vu du ciel est une plongée dans l'univers coloré de la banlieue parisienne des années 50/60 vu par les yeux d'un petit garçon à l'imagination débordante, doté de drôles de parents, fantasques, fans d'opérette et chicaneurs...

Mon avis : Dans cette époque de récession où l'ambiance est à la sinistrose et à la morosité, un spectacle comme celui créé et joué par Michel Lagueyrie est un vrai bonheur. Aux antipodes de ces humoristes qui prônent une espèce d'insolence méchante mâtinée de cynisme, il fait souffler une véritable bise de fraîcheur. j'emploie à bon escient le terme "bise" plutôt que celui de "vent" car ce one-man show nous fait l'effet d'une caresse douce et légère...

Michel Lagueyrie se contente pourtant de nous raconter sa vie, de sa naissance à ses premiers pas de comédien. Ce fringant sexagénaire - il est né en 1949 - est un conteur hors pair. Il nous fait partager avec une sorte de naïveté débonnaire ces moments de grâce que sont la prime enfance et l'adolescence auprès de ses parents, Lucienne et Roger, avec pour confident son doudou, l'ourson Mena. C'est cette peluche qui va être en quelque sorte le fil rouge de cette narration.
Ce spectacle est un shaker posé sur une table en formica et dans lequel on aurait mixé quelques madeleines de Proust, des Mistral gagnants, des coco Bauer, des roudoudous, une tablette de chocolat Menier... On y met finalement ce qu'on veut du moment où ça nous a rendu l'enfance plus goûtue. On se prend une de ces bouffées de tendresse !
Dans la salle, les rires volètent comme des bulles de champagne. Ce sont des rires, frais, sains, heureux. Il n'y a aucune once de méchanceté dans ce spectacle. Avec un sens aigu de l'observation et une virtuosité confondante à camper multiples personnages, Michel Lagueyrie nous prend par la pointe du coeur. Ses parents, qui ne sont pas très souvent d'accord sur l'éducation à donner à leur fiston, se retouvent en revanche à l'unisson dans leur amour commun pour l'opérette. Il y a aussi énormément d'autodérision. Avec force détails pittoresques et anecdotes savoureuses, le petit Michel évoque l'école primaire, ses premiers émois amoureux avec sa cousine... Ne s'adressant qu'aux enfants que nous avons tous - ou la plupart - été, il touche et attendrit toutes les générations.
La mise en scène est à l'image du contenu de ce spectacle plein de poésie et d'humanité : légère, subtile et efficace.
Une formidable parenthèse d'un plaisir tout simple. Il suffit de voir les grands sourires et les yeux pleins d'étoiles qui illuminent les visages des gens quand les lumières se rallument dans la salle pour comprendre le sens des mots partage et tendresse ; ça fait un bien fou !
Tout petit vu du ciel, certes, mais très grand vu de la salle...

vendredi 6 février 2009

Eden à l'Ouest


Un film de Costa-Gavras
Scénario de Costa-Gavras et Jean-Claude Grumberg
Avec Riccardo Scarmarcio (Elias), Juliane Koehler (Christina), Ulrich Tukur (Nick Nickelby), Eric Caravaca (Jack), Anny Duperey (la dame à la veste), Bruno Lochet (Yann, le SDF), Michel Robin (le portier du Lido), Davd Lowe (Fred)...
Sortie le 11 février 2009

Ma note : 5,5/10

L'histoire : Comme dans l'Odyssée, c'est en mer Egée que l'aventure d'Elias, héros sans légende, commence. Sur la même mer, sous le même soleil et le même ciel qu'à l'aube de la civilisation.
Après bien des péripéties, dont une escale au paradis et un bref séjour en enfer, son épopée se termine magiquement à Paris... Paris que chaque errant voit briller au plus profond de ses rêves dans son sommeil incertain.

Mon avis : J'ai toujours apprécié les films de Costa-Gavras. J'aime son engaement humanitaire et social, ainsi que ses prises de position politiques. Nombreux sont ses films qui m'ont impressionné et passionné (Compartiment tueurs, Z, L'aveu, Missing, Music Box, Amen... et j'en passe). Son dernier film, Le couperet, remontant à 2004, j'avais donc vraiment hâte de découvrir sa nouvelle oeuvre.
Le prologue du film fut tout à fait conforme à ce qui me plaît chez Costa-Gavras. La première image est une image choc avec tous ces papiers d'identité, abandonnés par leurs titulaires, qui flottent à la dérive d'un cargo bondé de clandestins.
On fait alors connaissance avec Elias, le héros de cette odyssée. Pour une belle gueule, c'est une belle gueule. Ce garçon (Riccardo Scamarcio), quasiment inconnu en France, dégage un charisme et une sensualité impressionnant. Il joue à ravir avec la candeur de ses grands yeux et son sourire aussi craquant que dévastateur. Des atouts qui vont indéniablement lui servir tout au long de son épopée.

Et puis, à partir du moment où Elias se retrouve seul échoué sur une plage, le film commence réellement. Sous forme de gag. Car notre naufragé (volontaire) émerge dans... un camp de nudistes ! Plutôt cocasse comme situation. Dès lors, au fil des péripéties involontaires auxqelles doit s'adapter ce pauvre Elias, le film ne va plus cesser d'osciller entre épisodes burlesques, tragi-comiques, et dramatiques. La plupart des scènes se font caricaturales (on a beaucoup de mal par exemple à trouver une logique rationnelle au comportement de Jack/Eric Caravaca), si bien que jamais - je dis bien jamais - on n'en arrive à s'apitoyer ou à s'émouvoir sur le sort de notre émigrant. Ce qui, je pense, va complètemeà l'encontre de l'intention du réalisateur. Les ficelles sont trop grosses, les rebondissements et leurs chutes prévisibles. Il y a là, un terrible manque de rigueur. Costa-Gavras brouille les pistes et les repères. Il succombe même paradoxalement à quelques clichés un peu faciles (l'épisode des Gitans par exemple).
Reste en définitive - et heureusement - la mise en avant de quelques valeurs (en priorité la solidarité), et quelques dénonciations comportementales (la haine de l'autre) qui donnent à ce film le ton qu'il aurait dû avoir.
C'est bien la première fois qu'un film de Costa-Gavras me laisse aussi désemparé...

Hélas, la sauce ne prend jamais.

jeudi 5 février 2009

Coup de coeur


Emily Loizeau
Pays sauvage
(Polydor)

On fait tout un fromage de Camille, mais moi je n'adhère pas du tout à sa cacophonie. Elle me hérisse les trompes d'Eustache. Même si je respecte son travail et lui reconnais des dons artistiques très personnels...
En revanche, quel bonheur que d'entrer sur la pointe des pieds dans l'univers d'Emily Loizeau ! Avec sa voix encore juvénile au grain légèrement éraillé, elle nous prend par la main et nous emmène dans son "Pays Sauvage". Il est au beau milieu d'une clairière. Il est donc très bucolique, très en phase avec la nature. Elle n'y est entourée que d'amis aussi bizarres et décalés qu'elle. Elle s'y sent en famille, donc totalement en confiance.
Ce nouvel album aux arrangements très soignés, originaux, contient d'authentiques pépites. Voici mes préférées :
Fais battre ton tambour, bluesy et gospelisant, où sa voix distille un feeling très cousin de celui des jazzwomen qui ont grandi au Sud des States.
Tell Me That You Don't Cry, une superbe ballade mélancolique d'ambiance irlandaise avec, en écho la voix de David Ivar Herman Dune.
Sister, joliment swinguant, balançant nonchalemment, saupoudrée de cuivres, vraiment efficace et très doux à l'oreille.
La dernière pluie, un OMNI (oblet musical non identifié), très intimiste, interiorisé, empli de sons incongrus et hétéroclites. Quand on l'écoute, on se sent presque un intrus qui aurait collé son oreille au trou de serrure de sa chambre...
Songes, une nostalgique comptine, mélodieuse, fluide et légère dans laquelle Emily joue avec la richesse de sa voix.
Coconut Madam', encore un titre aux sonorités et à la construction originales.
La Femme à barbe, une fantaisie trépidante et absurde pour l'interprétation de laquelle Emily s'est entourée de trois copines "poilantes" et gentiment déjantées, Jeanne Cherhal, Olivia Ruiz, Nina Morato. Dans une ambiance qui fleure bon l'Acadie, on sent qu'elles se sont bien amusées, les gueuses...
La Princess And The Toad, une petite pièce chorale dans lequel elle forme un couple charmant avec Thomas Fersen. Deux voix qui se marient vachement bien !
Dis-moi que toi tu ne pleures pas, une plainte émouvante qui nous entraîne aux sources africaines du blues. Magnifique !

L'écriture d'Emily Loizeau n'a l'air de rien à prime abord, mais quand on s'y penche un peu, on découvre qu'elle est énormément travaillée, avec une méticulosité quasi maniaque sur les sons.
Je vais sans doute tomber dans la facilié, mais Loizeau a vraiment une belle plume. Et comme son ramage se rapporte à son plumage, je ne peux que vous inviter expressément à aller rendre une petite visite du côté de son Pays Sauvage, un pays où il fait bon vivre et où l'amitié et les sentiments sont frais et sincères.

L'anniversaire


Comédie des Champs-Elysées
15, avenue Montaigne
75008 Paris
Tel : 01 53 23 99 19
Métro : Alma-Marceau

Une pièce de Harold Pinter
Adaptée et mise en scène par Michel Fagadau
Scénographie et costumes de Florica Malureanu
Avec Lorànt Deutsch (Stanley), Jean-François Stévenin (Nat Goldberg), Andréa Ferréol (Meg), Nicolas Vaude (McCann), Jacques Boudet (Peter), Emilie Chesnais (Lulu)

Ma note : 5,5/10

L'histoire : Une pension de famille. Un seul pensionnaire : Stanley.
Pourquoi est-il là ? de quoi se cache-t-il ? Fuit-il, tel Peter Pan, la lourde tâche de devenir adulte ? Et qui sont l'affable Goldberg et son curieux compagnon l'Irlandais McCann ? Pourquoi ont-ils choisi précisément cette pension du bout du monde ?

Mon avis : Trois choses : 1/ Mieux vaut ne pas être fatigué par sa journée de travail afin de se présenter à la Comédie des Champs-Elysées avec des facultés non émoussées. 2/ Si vous affichez malgré tout un état de fraîcheur insolent, vous risquez quand même d'être gagné par la somnolence. 3/ Enfin, si vous êtes frais et dispos et, surtout, si vous être un grand amateur de non sens plus que british, alors vous serez sans doute séduit par cette pièce pour le moins énigmatique et nébuleuse.
J'ai l'air sévère à m'exprimer ainsi. Il s'agit tout de même là d'une pièce du Grand Harold Pinter ! Mais autant j'avais apprécié Le Gardien et, à un degré moindre Le monte-plats, autant j'ai eu un mal fou à ressentir un quelconque intérêt à essayer de démêler l'écheveau de cette intrique absconse.

D'abord je tiens à préciser que les comédiens, les SIX comédiens, sont absolument irréprochables. Chacun, dans son personnage, se montre vraiment excellent.
Le souci, c'est que si on prend un réel plaisir à leur virtuosité, à la qualité de leur jeu, la pièce échappe vite à nos esprits par trop cartésiens.

Au début, je me suis brièvement amusé à ce dialogue à deux niveaux entre un taiseux diplomatiquement conciliant (Jacques Boudet/Peter) et sa volubile et envahissante épouse (Andréa Ferréol/Meg), l'abus de comique de répétition et trop de mots qui font tourner l'action en rond m'ont amené à écrire sur mon petit carnet de notes : "entame un peu poussive". Pourtant, je me répète, les comédiens font largement de leur mieux pour donner de l'épaisseur à leurs personnages.
L'arrivée de Lorànt Deutsch (Stanley) apporte quelque temps un brin de rythme et de nervosité avec une belle joute entre Andréa Ferréol et lui. Et puis, tout doucement, on retombe dans le verbiage et l'incompréhension.
Pendant ce temps-là, on essaie de deviner la trame de l'histoire. Où Pinter veut-il en venir ? Dans quel étrange intrigue veut-il nous emmener ? On n'arrête pas de se poser des questions. Qui est réellement Stanley ? Pourquoi se cache-t-il dans cette pension de famille dont il est l'unique client ? Pourquoi comprend-il que c'en est fini de sa tranquillité quand il apprend que deux hommes sont à sa recherche ? Qui sont ces deux hommes ? Que lui reprochent-ils ? Pourquoi veulent-ils l'emmener ?...
Et bien, quand le rideau tombe on n'a aucune réponse à ces question. On reste là, tout coi, livré à nous-même, avec nos supputations. Après tout, on peut imaginer ce qu'on veut. Mais cet Anniversaire-là, c'est vraiment pas du gâteau !

On peut donc à la rigueur aller voir cette pièce mais uniquement pour profiter du jeu de cette épatante brochette de comédiens. Sinon, son texte et ses dialogues - parfaitement adaptés par Michel Fagadau - comportent quelques jolies fulgurances ; les trois immenses miroirs déformants, façon musée Grévin, qui composent une grande partie du décor renvoient des images fugitivement fantasmagoriques, ce qui est parfois amusant. Mais, et je ne veux dénoncer personne, j'en ai vu plus d'un(e) qui piquait du nez sur son giron...

Bonté divine !


Théâtre de la Gaîté Montparnasse
26, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 16 18
Métro : Gaîté / Edgar Quinet

Une pièce de Frédéric Lenoir et Louis-Michel Colla
Mise en scène par Christophe Lidon
Avec Roland Giraud (le prêtre), Saïd Amadis (l'iman), Jean-Loup Horwitz (le rabbin), Benoît N'Guyen Tat (le bonze)

Ma note : 7/10

L'histoire : Un vendredi soir, à la suite d'une rencontre inter-religieuse, un prêtre, un rabbin, un iman et un bonze bouddhiste se retrouvent mystérieusement enfermés dans une pièce sans communication possible avec l'extérieur...

Mon avis : Quatre sièges alignés sur le devant de la scène. Quatre hommes y sont installés qui donnent une conférence sur la religion. Ils répondent à tour de rôle à des questions qui viennent de la salle. Evidemment, chacun prêche pour sa "paroisse"...
A la fin de ce débat, le rideau s'ouvre et les quatre hommes se retrouvent dans une pièce où ils récupèrent leurs affaires. Comme au terme de chacune de leur réunion, ils vont se retrouver autour d'une bonne table avant de regagner leurs domiciles respectifs pour le week-end. Tout en se préparant aux agapes, ils devisent de choses et d'autres. Le ton est bien moins formel que durant la conférence. On voit bien que les quatre hommes se connaissent parfaitement et s'estiment. Ce qui leur permet de s'envoyer quelques boutades, de se taquiner affectueusement. Au cours de leur conversation, on apprend en outre qu'ils envisagent d'écrire sur la religion un livre à huit mains. Bien sûr, pour les trois ministres monothéistes, "toutes les religions mènent à Dieu, mais les chemins sont différents". De son côté, le bouddhiste prône la non-exsitence de Dieu. Ensemble, au hasard de leur discussion, ils évoquent quelques thèmes essentiels comme le mariage, le rapport à l'argent, le karma et le fatalisme...
Les avis divergent, les pratiques et les dogmes aussi. En fait, le domaine où ils sont vraiment en harmonie, c'est la gastronomie. A l'évocation d'une poularde qui les attend ils se révèlent tous les quatre de vrais épicuriens. Même si le prêtre en profite pour les chatouiller sur les cuisines kasher et halal.

Et puis, premier rebondissement : au moment de sortir pour aller se restaurer, ils constatent que la porte blindée de la pièce où ils se trouvent est fermée. Aucun moyent pour eux de gagner l'extérieur. Et les portables ne passent pas. Ils essaient de trouver une solution. Pendant ce temps-là, ils se racontent des histoires drôles, un juive, une soufi, une bouddhiste. Dès que l'un d'entre eux quitte la pièce pour se rendre dans la salle de bain attenante, les trois autres en profitent pour pour se moquer gentiment des contraintes et des clichés de la religion de l'absent.
Soudain deuxième rebondissement : en réalité, ils ont été piégés par le prêtre. Il a ourdi ce stratagème pour les avoir à disposition. Il les enjoint à l'aider à retrouver la foi. Devant leur peu d'empressement et, surtout, leur manque d'explication autre que "le doute est le compagnon indispensable de la foi", il sort un révolver et menace de supprimer l'un d'entre eux.
Et là, la pièce bascule. Chacun, ou presque, en oublie son statut de religieux pour ne devenir qu'un simple homme confronté à la mort...

Bonté divine ! est une pièce réellement intéressante. On y analyse les grandes lignes des quatre principales religions mondiales. C'est bien entendu très vulgarisé. Nous ne sommes pas dans un cours de théologie. Les clichés sont inévitables (mais attendus et appréciés). Les séquences un peu philosophiques sont systématiquement contrebalancées par de grands moments de fantaisie. Car on rit beaucoup cette pièce. Et, en même temps, on réfléchit...
Il est sûr qu'on ne sort pas du théâtre de la Gaîté Montparnasse converti à une quelconque de ces quatre religions. On entre avec ses convictions et on repart avec les mêmes. Mais on y apprend pas mal de choses. On y apprend d'abord à respecter l'autre. Ensuite, la grande prescription qui résume tous les propos tenus c'est d'aller "puiser au fond de soi les raisons pour lesquelles on croit en Dieu"...

Les quatre comédiens sont absolument épatants. Ils ont, chacun de sa religion, le profil parfait, sans pour autant tomber dans la caricature. Roland Giraud qui, on le découvre petit à petit, tire les ficelles de tout ce petit monde, est très convaincant. Quand on connaît ses propres convictions, ses propos n'en ont que plus de crédibilité.
On y apprécie également le jeu tout en rondeur pateline de Jean-Loup Horwitz, la belle voix grave de Saïd Amadis et sa force tranquille, et la discrétion amusée de Benoît N'Guyen Tat à qui appartient peut-être la plus jolie sentence : "Le plaisir est le bonheur des fous, et le bonheur est le plaisir des sages.
Les quatre comédiens nous rendent leurs personnages respectifs eminemment sympathiques et profondément humains. Et s'il n'y a qu'une leçon à tirer de cette pièce, quelle que soit sa religion ou son absence de religion, c'est de prêter attention à son prochain, et de respecter ses idées. Après, Dieu reconnaîtra les siens...

La pensée ou l'aphorisme du jour

Il y a des matins où me voir dans un miroir me glace...

mercredi 4 février 2009

Coup de coeur


Je n'aime pas le classique, mais ça j'aime bien !
Que l'on ait ou pas une véritable culture classique, force est de constater que certains morceaux sont devenus d'authentiques standards, voire de véritables "tubes". Ces morceaux sont entrés insidieusement dans notre quotidien via quelques vecteurs incontournables : la pub, le patinage artistique, les ascenseurs de grands magasins, les musiques d'attente au téléphone, une bande originale de film... Le classique s'est insidieusement glissé dans les oreilles des plus profanes, et il y a fait son nid. Personnellement, je n'ai aucune base en la matière. La musique classique n'a pas fait partie de mon éducation, je le regrette, mais il était normal qu'elle ne le fût point. Elle était pour moi une sorte de ghetto réservé, pratiqué et compris par une élite. Et puis, justement, au détour d'une pub ou d'un film (Barry Lindon, Orange mécanique, Aimez-vous Brahms, Amadeus, Apocalypse now...) j'ai été emballé par certains morceaux qui ont su enchanter mes oreilles de non-initié. Je ne connaissais pas toujours le nom du compositeur, mais toujours est-il que plusieurs dizaines d'airs me sont devenus familiers. D'autant plus que la plupart d'entre eux, liés à des images fortes, étaient très évocateurs.
Sony/BMG a eu la judicieuse idée de regrouper en un double CD quarante-cinq de ces morceaux les plus répandus. Parfois, le titre ou l'auteur ne nous disent rien, mais dès les premières notes on s'aperçoit que l'on connaît et que l'on aime. Il en est pratiquement ainsi de chacun des morceaux qui illustre ce double album : Ainsi parlait Zarathoustra, Carmina Burana, La Chevauchée des Walkyries, la Danse du Sabre, le Canon de Pachelbel, le Barbier de Séville, le Carnaval des Animaux, Les Quatre saisons, Casse-noisette... Strauss, Wagner, Vivaldi, Mozart, Brahms, Verdi, Rossini, Satie, Bizet, Bach, Debussy, Offenbach, Prokofiev, Tchaïkovsky... Que du beau et du bon !!!

La pensée ou l'aphorisme du jour

Flashback.
Conclusion du congrès socialiste de Reims : la montagne a accouché de deux souris... Et aujourd'hui, c'est beaucoup d'Aubry pour rien !

mardi 3 février 2009

La pensée ou l'aphorisme du jour

Lorsqu'un "financier" provoque un gros trou dans la galette de sa banque, c'est la crise sur la gâteau...

lundi 2 février 2009

Baby Doll


Théâtre de l'Atelier
1, place Charles Dullin
75018 Paris
Tel : 01 46 06 49 24
Métro : Anvers

Une pièce de Tennessee Williams
Version scénique de Pierre Laville
Mise en scène par Benoît Lavigne
Avec Mélanie Thierry (Baby Doll), Chick Ortega (Archie), Xavier Gallais (Silva Vaccaro), Monique Chaumette (Tante Rose), Théo Légitimus (Moïse)

Ma note : 8/10

L'histoire : 1939. Sud des Etats-Unis. Archie Lee, exploitant de coton en faillite, est marié à Baby Doll, une femme enfant. Suite à une promesse faite au père de Baby Doll, le mariage ne sera consommé que lorsque celle-ci aura 20 ans. La veille de ce fameux anniversaire, arrive Silva Vaccaro, l'étranger, voisin et concurrent d'Archie. Il soupçonne ce dernier d'être responsable de l'incendie qui a détruit son égreneuse à coton, et il est bien décidé à se venger de lui. Son arme va être Baby Doll...

Mon avis : Tout de suite, le décor nous indique les conditions de vie de la famille Lee : c'est la misère. C'est une sorte de grange que l'on pressent poussiéreuse, dépourvue de meubles (on saura très vite pourquoi) hormis une vieille table en bois et un rocking-chair bien fatigué. Côté jardin, le museau d'une épave de voiture empiète sur la scène. Dans la mezzanine, dans un minuscule lit-cage, une jeune femme dort, roulée en boule. C'est Baby Doll. Elle commence à se réveiller, s'étire comme une chatte, dégageant déjà une sensualité animale de femme-enfant. Derrière la porte, on distingue une forme. Un homme est là, accroupi, qui mate par le trou de serrure. On le devine en train de se livrer à un exercice de travaux manuels... Baby Doll, vraisemblablement accoutumée à ce genre de pratique, ouvre brutalement la porte et se met à l'invectiver. Et pourtant, ce n'est que son mari, Archie, qui joue ainsi les voyeurs enamourés. C'est vrai que, par rapport à elle, il est peu ragoûtant. C'est un homme fruste, bestial et frustré. Il est tellement tenaillé par le désir que son visage est secoué de tics. Le mariage d'Archie et de Baby Doll n'a jamais été consommé suite à une promesse faite au père mourant de la jeune femme. L'échéance a été fixée au soir de son 20è anniversaire. Et nous sommes la veille ! Ce pauvre Archie ne tient plus...
Quant à Baby Doll, parfaitement consciente de l'attirance qu'elle exerce sur son mari, elle appréhende cette soirée fatale. Ce qui ne l'empêche pas de taquiner Archie, de le rabrouer, de le morigéner, de l'humilier même. Elle lui reproche surtout de la faire vivre dans la misère. Mais elle n'est encore qu'une gamine et elle est malgré tout prompte à rire et à s'amuser d'un rien.

Pourtant, Archie, qui a connu un certain confort matériel quand il avait du travail, est prêt à tout pour en retrouver. Hélas, le traitement du coton est passé presque exclusivement aux mains du Syndicat. Et c'est son voisin, un étranger d'origine sicilienne, Silva Vaccero, qui prospère aujourd'hui. Alors, une nuit, il va mettre le feu au bâtiment qui abrite l'égreneuse à coton de son concurrent. Ce dernier, qui croit à un incendie accidentel, surgit chez lui à l'aube pour lui confier le traitement de plusieurs tonnes de coton. Archie se fait un peu prier pour la forme et, évidemment, accepte le marché. Mais, en même temps, Silva fait la connaissance de sa voisine, Baby Doll qui, de son côté, découvre que tous les hommes n'ont pas l'apparence de son Archie...
De fait, Silva Vaccaro présente tous les "ingrédients" du séducteur : il est beau, mince, viril, sûr de lui, charmeur... Bref, c'est le parfait latin lover mâtiné à la sauce louisianaise. Baby Doll en est toute troublée...
On devine bien sûr la suite et on sait quel va être le maillon faible de ce trio bien classique...

Mélanie Thierry n'incarne pas Baby Doll, elle EST Baby Doll ! Toute la pièce repose sur elle. Terriblement expressive, elle nous livre spontanément tous ses états d'âme. Dans la première partie de la pièce, elle a conscience de n'être qu'une proie quasiment impuissante face à son prédateur de mari dont, hélas, les appétits sexuels sont tout à fait légitimes. Elle le sait, elle elle est prête au "sacrifice", par respect à la parole donnée à son défunt père. Si, par moment, dans l'appréhension de ce répugnant rendez-vous, elle passe de la crainte à la révolte, elle redevient parfois une toute jeune fille encore candide et insouciante. Et elle rit. Un bonheur de rire, frais et limpide comme une cascade. Un rire qui jaillit, magnifiquement pur, éclair lumineux et juvénile qui apporte quelques secondes de grâce dans ce décor et cette existence sordides.
Et puis, dès l'arrivée de Silva Vaccaro, on assiste à sa croissante métamorphose psychologique. En une nuit, elle mesure la force de son pouvoir, de sa séduction. Et, surtout, elle n'a plus peur. Une fois maîtrisé le trouble qu'elle éprouve face à cet étalon fougueux de Silva, assurée de devenir à son tour la manipulatrice, elle se libère totalement. Elle devient adulte.

Baby Doll est une pièce extrêmement charnelle. Nous sommes dans le Sud. Les sens sont exacerbés. Baby Doll dégage une sensualité naturelle, ensorceleuse, qui est en fait celle d'une Mélanie Thierry totalement habitée par ce personnage. Je l'avais déjà trouvée époustouflante dans Le vieux Juif blonde, avec sa capacité de passer sans transition du rire aux larmes, de la fantaisie au drame. Elle semble imprévisible alors que tout est sans doute parfaitement maîtrisé. Elle est vivante, frémissante, espiègle, violente, fragile, mais insubmersible. Impossible, quand on la voit, d'imaginer une autre Baby Doll...

Si elle peut exprimer aussi brillamment une telle palette de sentiments et de comportements, c'est qu'elle possède en Chick Ortega (Archie) et Xavier Gallais (Silva) deux partenaires qui la servent magistralement. Autant, dans la première partie, on ressent une véritable aversion pour Archie, autant on en arrive presque à le plaindre sur la fin. Chick Ortega se livre là à une sacrée prestation, révélant un éventail de jeu(x) très complet. Il ne campe pas qu'une brute épaisse, il est aussi un mari éperdument épris de sa jeune compagne, d'autant qu'il est dans son droit. C'est aussi un homme aux abois, ruiné, qui va jusqu'à se muer en incendiaire pour obtenir un travail qui lui permettra d'apporter à sa bien aimée le confort qu'elle lui réclame. Et, à la fin, c'est un taureau blessé, humilié, qui prend soudain conscience que sa mise à mort est imminente. Chick Ortega joue tout cela d'une façon entière, très physique...
Très physique est également le jeu de Xavier Gallais. Si Chick Ortega nous la sert dans un registre plutôt bourrin, Xavier suinte par tous ses pores de la fougue d'un jeune étalon nerveux et sûr de lui. C'est un chef né, un patron. Mais son assurance va être singulièrement ébranlée par le charme d'une poupée...
En fait, nous sommes les témoins de l'affrontement de trois animaux (le taureau, le mustang et la biche) pour qui l'instinct et la sensualité sont prédominants au détriment des sentiments (l'épisode de la balançoire est une scène d'une incroyable puissance érotique).
L'esprit de Tennessee Williams est tout à fait contenu et fidèlement restitué dans cette remarquable adaptation. Un véritable petit bijou !

La pensée ou l'aphorisme du jour

"Les truismes sont des vérités que l'on profère franco de porc..."