Les Enfants du Paradis
34, rue Richer
75009 Paris
Tel : 01 42 46 03 63
Métro : Cadet / Grands
Boulevards
Ecrit et mis en scène par Pierre Palmade
Avec Benjamin Gauthier et Pierre
Palmade
Présentation : Pierre
et Benjamin s’aiment d’un amour fou depuis trois ans. Mais tout devient
prétexte à engueulades et ils ne se parlent plus qu’en se disputant.
C’est l’amour vache ! Le
fond du problème ?... Pierre n’assume pas vraiment d’être en couple avec
un homme et, disons-le tout net, il n’assume simplement pas son homosexualité.
Benjamin, militant convaincu pour la cause gay, n’en peut plus de devoir se cacher…
Mon avis : En se
montrant quelque peu réducteur, on pourrait dire qu’Assume bordel !
est le prolongement de Ils s’aiment dans une version homo. Mais, en
fait, Pierre Palmade va beaucoup plus loin car cette pièce est bien plus
personnelle, plus intime, plus introspective.
Que ce soit dans la vie, dans son
autobiographie (Dites à mon père que je suis célèbre), dans ses pièces ou
one man show (Le Comique, le fils du comique, Aimez-moi…) Pierre Palmade
est d’une franchise désarmante. On dirait qu’il cherche en permanence à s’expliquer
et à se montrer tel qu’il est au fond de lui-même. Il ne revendique aucune
excuse, aucun jugement, aucun dédouanement. Il se contente de parler vrai, avec
ses mots à lui, ses pirouettes, ses métaphores. Il déballe tout et, après,
chacun en pense ce qu’il veut ; on ne peut pas le taxer d’hypocrisie.
L’hypocrisie, justement, s’il en
use, c’est pour son personnage. La trame d’Assume bordel !, c’est
la vie de couple à travers une vingtaine de saynètes qui, parfois, donnent lieu
à de véritables sketchs. Comme dans tous les couples ordinaires, ils sont deux.
Ils s’aiment visiblement, mais ils n’ont pas du tout les mêmes caractères. Tout
au long de ces courtes scènes de ménage, on découvre leurs mentalités
respectives.
Avec sa propension gourmande à l’autoflagellation,
Pierre Palmade ne s’est pas donné le beau rôle. Dans un ping-pong verbal des
plus réjouissants, il déroule, sans complaisance aucune, sa pusillanimité, ses
atermoiements, ses blocages, sa lâcheté, mais aussi sa fragilité, son terrible
besoin d’amour, sa réelle tendresse… Evidemment, cette complexité d’âme, lui
permet de s’adonner à l’exercice dans lequel il excelle le plus : la
mauvaise foi. Il assène à son compagnon les excuses les plus vaseuses qui
soient avec un naturel confondant. Alors qu’on voit bien qu’il invente ses
échappatoires au fur et à mesure, qu’il n’y croit pas lui-même une seconde,
mais ça le rassure ponctuellement. Pierre est un fuyard de la réalité, un
velléitaire. Il se voudrait plus droit, plus fort mais, à son grand désespoir,
il n’y parvient pas.
Le beau rôle, il l’a attribué à
son partenaire. Benjamin, c’est un mec normal. Il est franc, direct, parfois
cash quand il est trop outré ou trop malheureux. Il n’a aucun problème avec son
homosexualité. Il en est même un fervent militant.
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Photo : Coadic Guirec - Bestimage |
L’opposition entre les deux
hommes est donc croustillante. Leurs joutes verbales, entre un combattant sincère
et fougueux et un champion de l’esquive, sont explosives. Les dialogues – autre
grande qualité de Pierre Palmade – sont vifs, incisifs, cruels et, parfois
aussi, comme dans la vraie vie, très crus. Le sens inné de la formule de Pierre
fait encore son œuvre. Il a l’art des phrases et des répliques qui font mouche.
J’en ai noté deux qui sont de véritables petites pépites. Une dans la bouche de
Pierre : « Je ne suis pas fier d’être gay, je suis heureux d’être
homo ». La seconde dans la bouche de Benjamin : « Sois
gay si t’es
un homme ! »…
Bref, on passe un très bon moment
à être les témoins amusés, attendris, voire émus, de ce duel d’un peu plus d’une
heure entre deux hommes qui s’aiment sincèrement, mais dont l’équilibre et l’harmonie
de leur couple sont sans cesse menacés par les tergiversations de l’un. En outre, cette pièce a l'avantage de rendre banale une situation amoureuse que l'on aurait pu qualifier de différente. Quelle que soit son orientation sexuelle, un couple reste un couple. Et pis c'est tout ! Pas besoin de ratiociner à l'infini...
Enfin,
si Pierre Palmade est égal à lui-même, il faut saluer la
prestation de Benjamin Gauthier, toujours juste, absolument convaincant et vraiment épatant dans ce
beau personnage que lui a ciselé l’auteur de la pièce.
Gilbert « Critikator »
Jouin