mardi 21 décembre 2021

Dominique Dumond "Monty"


Le Passeur Editeur

166 pages

17,50 €

 

Âme canine

Monty est un formidable témoignage, didactique, drôle et émouvant à la fois.

Hervé, le héros de cet ouvrage, est atteint d’une maladie oculaire qui le conduit inexorablement à la cécité.

Il ne doit sa survie (sa survue ?) qu’à l’attribution d’un chien guide qui lui permettra à la fois de jeter sa canne aux orties et de se déplacer bien plus aisément pour vaquer le plus normalement possible à ses nombreuses activités.

En dépit de cette tragédie personnelle, l’auteur ne tombe jamais dans le pathos (à moelle). Au contraire, tout au long de l’ouvrage, il fait preuve d’une réjouissante autodérision. Il s’ingénie à trouver systématiquement l’angle le plus positif. C’est une belle leçon de savoir vivre, pleine d’un pragmatisme élégant, d’une grande humanité avec, surtout, beaucoup, beaucoup d’humour. Certains de ses jeux de maux sont de véritables petits bijoux.

Monty est donc une histoire d’amour et d’humour entre un homme et son labradoré quadrupède qui va remplacer ses yeux. C’est un magnifique parcours initiatique, un échange permanent, chacun étant le maître de l’autre, mais uniquement dans l’entraide et l’affection.

 Suivez le guide, ne l’oubliez pas s’il vous plaît… Dieu reconnaîtra les chiens.

vendredi 22 octobre 2021

Assume bordel !

 


Les Enfants du Paradis

34, rue Richer

75009 Paris

Tel : 01 42 46 03 63

Métro : Cadet / Grands Boulevards

 

Ecrit et mis en scène par Pierre Palmade

Avec Benjamin Gauthier et Pierre Palmade

 

Présentation : Pierre et Benjamin s’aiment d’un amour fou depuis trois ans. Mais tout devient prétexte à engueulades et ils ne se parlent plus qu’en se disputant.

C’est l’amour vache ! Le fond du problème ?... Pierre n’assume pas vraiment d’être en couple avec un homme et, disons-le tout net, il n’assume simplement pas son homosexualité. Benjamin, militant convaincu pour la cause gay, n’en peut plus de devoir se cacher…

 

Mon avis : En se montrant quelque peu réducteur, on pourrait dire qu’Assume bordel ! est le prolongement de Ils s’aiment dans une version homo. Mais, en fait, Pierre Palmade va beaucoup plus loin car cette pièce est bien plus personnelle, plus intime, plus introspective.

 Que ce soit dans la vie, dans son autobiographie (Dites à mon père que je suis célèbre), dans ses pièces ou one man show (Le Comique, le fils du comique, Aimez-moi…) Pierre Palmade est d’une franchise désarmante. On dirait qu’il cherche en permanence à s’expliquer et à se montrer tel qu’il est au fond de lui-même. Il ne revendique aucune excuse, aucun jugement, aucun dédouanement. Il se contente de parler vrai, avec ses mots à lui, ses pirouettes, ses métaphores. Il déballe tout et, après, chacun en pense ce qu’il veut ; on ne peut pas le taxer d’hypocrisie.


L’hypocrisie, justement, s’il en use, c’est pour son personnage. La trame d’Assume bordel !, c’est la vie de couple à travers une vingtaine de saynètes qui, parfois, donnent lieu à de véritables sketchs. Comme dans tous les couples ordinaires, ils sont deux. Ils s’aiment visiblement, mais ils n’ont pas du tout les mêmes caractères. Tout au long de ces courtes scènes de ménage, on découvre leurs mentalités respectives.

Avec sa propension gourmande à l’autoflagellation, Pierre Palmade ne s’est pas donné le beau rôle. Dans un ping-pong verbal des plus réjouissants, il déroule, sans complaisance aucune, sa pusillanimité, ses atermoiements, ses blocages, sa lâcheté, mais aussi sa fragilité, son terrible besoin d’amour, sa réelle tendresse… Evidemment, cette complexité d’âme, lui permet de s’adonner à l’exercice dans lequel il excelle le plus : la mauvaise foi. Il assène à son compagnon les excuses les plus vaseuses qui soient avec un naturel confondant. Alors qu’on voit bien qu’il invente ses échappatoires au fur et à mesure, qu’il n’y croit pas lui-même une seconde, mais ça le rassure ponctuellement. Pierre est un fuyard de la réalité, un velléitaire. Il se voudrait plus droit, plus fort mais, à son grand désespoir, il n’y parvient pas.

 Le beau rôle, il l’a attribué à son partenaire. Benjamin, c’est un mec normal. Il est franc, direct, parfois cash quand il est trop outré ou trop malheureux. Il n’a aucun problème avec son homosexualité. Il en est même un fervent militant.

Photo : Coadic Guirec - Bestimage

L’opposition entre les deux hommes est donc croustillante. Leurs joutes verbales, entre un combattant sincère et fougueux et un champion de l’esquive, sont explosives. Les dialogues – autre grande qualité de Pierre Palmade – sont vifs, incisifs, cruels et, parfois aussi, comme dans la vraie vie, très crus. Le sens inné de la formule de Pierre fait encore son œuvre. Il a l’art des phrases et des répliques qui font mouche. J’en ai noté deux qui sont de véritables petites pépites. Une dans la bouche de Pierre : « Je ne suis pas fier d’être gay, je suis heureux d’être homo ». La seconde dans la bouche de Benjamin : « Sois
gay si t’es un homme ! »…



Bref, on passe un très bon moment à être les témoins amusés, attendris, voire émus, de ce duel d’un peu plus d’une heure entre deux hommes qui s’aiment sincèrement, mais dont l’équilibre et l’harmonie de leur couple sont sans cesse menacés par les tergiversations de l’un. En outre, cette pièce a l'avantage de rendre banale une situation amoureuse que l'on aurait pu qualifier de différente. Quelle que soit son orientation sexuelle, un couple reste un couple. Et pis c'est tout ! Pas besoin de ratiociner à l'infini...

Enfin, si Pierre Palmade est égal à lui-même, il faut saluer la prestation de Benjamin Gauthier, toujours juste, absolument convaincant et vraiment épatant dans ce beau personnage que lui a ciselé l’auteur de la pièce.

 Gilbert « Critikator » Jouin

 

 

mardi 12 octobre 2021

Lorsque Françoise paraît

 


Théâtre Lepic

1, avenue Junot

75018 Paris

Tel : 01 42 54 15 12

Métro : Lamarck-Caulaincourt

 

Ecrit et mis en scène par Eric Bu

Lumières de Cécile Trelluyer

Costumes de Julia Allègre

Scénographie d’Aurélien Maille

Musique et création sonore de Pierre-Antoine Durand

Chorégraphie de Florentine Houdinière

 

Avec Sophie Forte, Christine Gagnepain, Stéphane Giletta

 

Présentation : 1916. A huit ans, Françoise a une révélation : quand elle sera grande, elle sera médecin d’éducation ! Personne ne la prend au sérieux. Surtout pas sa mère, effrayée par cette enfant à la pensée si libre. Mais Françoise n’est pas seule, son Bon Ange Gardien veille sur elle et la soutient tout au long des épreuves de son enfance. Des épreuves que nous revivons avec eux, en remontant aux origines de la pensée de Françoise Dolto, et au gré de son regard d’enfant, à la fois si naïf et si clairvoyant…

 

Mon avis : Cette pièce est un pur bonheur !

J’étais à des lieues de penser que l’on puisse créer à partir de la vie de Françoise Dolto un vrai divertissement. Il faut dire que le mot « psychanalyse » n’est pas a priori très glamour. Et pourtant Eric Bu, son auteur et metteur en scène, a réussi la gageure de faire de Lorsque Françoise paraît un spectacle total, un spectacle dans lequel on passe par tous les sentiments, un spectacle où l’on est parfois ému et, surtout, où l’on sourit et on rit beaucoup.



Une mise en scène nerveuse, inventive, rythmée, des dialogues riches, incisifs et percutants, une bande-son intelligente et trois comédiens pluridisciplinaires absolument épatants, nous font vivre un grand moment de théâtre… Lorsque je qualifie cette pièce de « spectacle total », c’est qu’en plus de la part de comédie, on y a introduit d’autres disciplines telles que la danse, le chant, le mime, les accents.

Effectivement, les trois acteurs nous embarquent dans un véritable show. Il fallait de la part d’Eric Bu une sacrée force de conviction pour réussir à obtenir de ses comédiens une telle diversité, une telle palette de jeu. Je suis convaincu que Sophie Forte, Christine Gagnepain et Stéphane Giletta sont allés au-delà de son exigence tant ils sont performants. Il règne entre eux un profond esprit de troupe. Leur plaisir d’être ensemble et leur complicité sont tellement évidents qu’ils passent la rampe et nous emportent dans un beau moment de partage.

 


Dans le rôle de François Dolto, Sophie Forte se révèle carrément époustouflante. Elle s’avère aussi crédible en gamine de 8 ans qu’en vieille dame de près de 80 ans. Avec sa bonne bouille, sa voix et ses rires enfantins, son regard candide, elle nous fait comprendre combien l’enfance de François Marette a été loin d’être un long fleuve tranquille… Plus tard, devenue adulte, elle nous rappelle le caractère affirmé et la parole acérée de la Grande Dame de la psychanalyse pour enfants.


Christine Gagnepain (la mère, la fille, etc…) et Stéphane Giletta (le père, l’ange gardien, etc…) jouent à eux deux tous les personnages qui ont jalonné et accompagné la vie de Françoise Dolto. Là aussi, on assiste à une performance étonnante. Ils savent tout faire ! Stéphane Giletta possède en outre une réjouissante aptitude à prendre tous les accents. Grâce à lui, on croise les psychanalystes René Laforgue et Jacques Lacan, Jean Rostand, les animateurs radio et télé Jacques Pradel et Bernard Pivot, mais aussi Boris Dolto, le mari, et Carlos, l’un des deux fils. Un générique réellement haut de gamme !

Enfin, cerise sur le Dolto, j’ai eu le privilège d’assister à cette pièce dans le théâtre de l’Agoreine de Bourg-la-Reine, ville où résidait au début de 20ème siècle la famille maternelle de Françoise. Elle y repose d’ailleurs en compagnie de son mari et de son fils Carlos. C’était donc d’autant plus émouvant.

 Gilbert « Critikator » Jouin

 

mardi 17 août 2021

Le Clos aux Masques

 



Nous venons de vivre trois jours idylliques au "Clos aux Masques", gîte et chambres d'hôtes situé à quelques encablures de Deauville et de Villers-sur-Mer. Cet authentique "trou normand" est un véritable havre de paix.

Les bâtiments sont nichés dans un écrin de verdure privatif de 5000 m2 (avec terrain de boules).

Anne et Andrea, les hôtes de ces lieux, sont des gens particulièrement accueillants et chaleureux. Ils font Disponibles et naturels, ils font tout ce qui est en leur possible pour que notre séjour se passe dans les conditions les plus agréables. Ils subviennent au moindre de nos désirs et, même, ils les devancent !



Le petit-déjeuner est ici élevé au rang de cérémonial. Il est préparé avec beaucoup de soin : petites tranches de pain découpées en tartines, grande variété de confitures, gâteaux faits maison différents chaque jour, fromages (Ah ce camembert !), yaourts, fruits de saison à volonté, jus de pomme artisanal... Et puis il y a la partie strictement réservée à Andrea : la charcuterie. Comme lui, elle est italienne : mortadelle, jambon blanc légèrement épicé, jambon cru, etc... Elle est amoureusement découpée en tranches extra-fines, ce qui en rehausse le goût.

Tout en dégustant ces délicieux produits, on devise, on s'informe, on plaisante avec Anne et Andrea ou avec nos voisins de table. Tout est mis en oeuvre pour que l'ambiance soit la plus conviviale possible.

Notre chambre, la chambre "Rome", avec ses poutres apparentes striant les murs, rappelait qu'elle fut jadis une étable. Son lit XXL nous proposait un confort maximum... Quant à la salle de bain, esthétiquement décorée de travertin (lui aussi originaire d'Italie), elle était fonctionnelle et fort agréable.

Voici donc un endroit que l'on n'a pas le droit de garder jalousement pour soi. Il faut en faire profiter les gens de goût, amateurs de nature et, surtout, de belles valeurs humaines. Je le recommande vivement.


Le Clos aux Masques

14950 Saint-Pierre-Azif

Tel : 09 72 44 02 06 / 06 46 82 71 53

jeudi 20 mai 2021


Conte Jouin n° 24


Autoportrait d'une jeune femme qui n'est pas au-dessus de tout suçon...


Sangsue sensuelle

 

 Sangsue sensuelle

C’est comme ça

Que tu m’appelles

Quand sans repos

Je promèn’ ma bouch’ sur ta peau

 

Sangsue sensuelle

Je mets des bas

Et des dentelles

Pas de collants

Tu trouves ce mot désolant

 

Anguill’ languissante

Je sens mon sang

Mes sentiments, se fair’ pressants

Mais t’es absent, c’est agaçant

Même vexant


 
Louve inassouvie

Quand j’ai envie

Qu’ tu m’ suives au lit

Sans préavis

Toi tu n’ pens’ qu’à ta survie

 

J’ai ma rançon si

Tu sombres au son

De mes suçons

Si sans façons, p’tit polisson

T’as des frissons

 

Sangsue sensuelle

C’est comme ça

Que tu m’appelles

De lun’ de miel en septièm’ ciel

Mais t’es hanté

Par ta santé

 


mardi 11 mai 2021


Conte Jouin n° 23

A la relecture, je reconnais deux de mes principales influences, Brassens et Nougaro...


Déprime

 

Merde, voilà la pluie qui dégringole

J’ vais avoir de la flott’ plein les grolles

Ras-l’ bol

Au contraire, ça complète la fête

Ça fait vraiment décor de défaite

Je marche, je marche, je marche, je marche

Je ne sais même pas où je vais

 

Ça fait une drôle d’impression

Et je me sens vraiment tout couillon

C’est con

J’ai mal autant au cœur qu’à la tête

J’ai envie de hurler comme une bête

Plaqué, plaqué, plaqué, plaqué

Je n’ pensais pas qu’ ça puiss’ m’arriver

 

Ell’ m’a fait ce soir une de ces scènes

Je ne suis plus celui qu’elle aime

Alors je suis parti

Je longe la Seine, une autre, et je la suis


 L’eau est sale et grise comme ma vie

Ell’ ne me fait même pas envie

Les filles

Ce sont toutes des garces et des coquettes

Leur caprice fini, elles nous jettent

Je m’aime, je m’aime, je m’aime, je m’aime

Je ne vais tout de même pas me suicider

 

Tiens, elle n’est pas laide cette fille

Et, en plus, elle a un parapluie

Allez, je l’aborde, tout de suite

Avant qu’ la pluie s’arrête…

 


vendredi 7 mai 2021


Conte Jouin n° 22

Ah les taies, alité à l'été !...


Slow des taies

 

 Slows des taies

Des taies d’oreiller

Jonchant, éparpillés

Sur une terrasse ombragée

Face à la Méditerranée

Slow des taies

Des taies d’oreiller

Décor ensoleillé

Enlacés, tout nus, quel régal

Et pour seuls témoins les cigales

 

Nos cils laissent filtrer

Une lumièr’ bleutée

Le soleil est très haut

Nous, on se sent très beaux

Tous les deux alanguis

Les doigts mêlés, unis

On respir’ le bonheur

Et la garrigue en fleurs

 

Slow des taies…


 Le temps s’est arrêté

Profitant de l’été

Il bull’, je le devine

Au bord de la piscine

Même qu’on envisage

Si on a le courage

Peut-êtr’ d’aller s’ baigner

Y’a dix mètres à s’ traîner

 

Slow des taies…

 

Ton bronzage est parfait

Ta peau, couleur café

S’harmonise encor’ mieux

Au blond de tes cheveux

Je m’ lass’ pas de te voir

Déjà, j’ pense à ce soir

Je suis, j’ peux pas l’ cacher

Pressé d’aller m’ coucher

 

Slow des taies…


mardi 4 mai 2021


Conte Jouin n° 21

Et dire que ça fait plus de 50 ans que je ne bois plus d'alcool !


De la cuite dans les idées

 

 Je suis accroupi, agrippé à la table de nuit

Et j’essaie d’attraper mon lit qui, dans un coin, danse le boogie

Pas croyable ce que j’ai pu boire

Faut qu’ j’allume mes antibrouillards

J’ai la tête comme un flipper

Entre les dents, le cœur

Dans l’ cerveau un marteau-piqueur

 

Je suis avachi, un coude dans le vase de nuit

Et pis, j’ fais la gueule à mon lit qui bouge tout l’ temps, ce malpoli

Je vais voir si au moins la baignoire

Va pouvoir me recevoir ce soir

Je ne sais même plus très bien où s’ trouve la salle de bain

D’ailleurs, c’est bien trop loin, je vais m’ perdre en chemin

Je n’y arriv’rais qu’après-demain

 

Je suis abruti, roule dans la descente de lit

Je suis fâché depuis qu’ mon lit m’a refusé une danse du tapis

J’essaie de retrouver pourquoi j’ai picolé

Faut un bon motif pour prendre une aussi belle muflée

Le sol est jonché de bouteilles vidées

Pour les écluser, je suis certain qu’y a des copains qui m’ont aidé

 

Ça y est, j’ai vomi. J’ai raté d’peu le vase de nuit

Par contre j’ai pas manqué mon lit, je regrette pas, bien fait pour lui

J’ai la tête comme un hall de gare

Un train arrive, un autre part

J’essaie de trouver la raison de cette foire

Mon pauvre cerveau réclame des nageoires

Ça y est ! Je retrouve la mémoire :

 

Tous mes bons amis sont venus fêter cette nuit

Mon divorce enfin prononcé

Et, en plus, à torts partagés…

 

 

 

 

 

 

 

 


mercredi 28 avril 2021


Conte Jouin n° 20

Texte largement inspiré par l'excellent "Constipation Blues" de l'inénarrable Sreamin' Jay Hawkins


Sur le pot d’ la vie con

 

Assis sur la lunette

J’essaie de fair’ caca

Et d’ refair’ la planète

Qui m’ caus’ bien du tracas

Les coud’ sur les genoux

La tête entre les mains

J’ai tout l’air entre nous

Du penseur de Rodin

 

Et je pousse, je pousse

Malgré mes crispations

J’ trouv’ pas de solution

Et je pousse, je pousse

Pas de libération

C’est la constipation

 

Problèmes d’intestins

Problèm’ de société

On est comm’ des crétins

Quand y’a pas d’ débouchés

Crispé, sourcils froncés

Sans cess’ je me répète

Qu’à force de forcer

Y faudra bien qu’ ça pète

 

Et je pousse, je pousse…

 

Tiens, déjà à l’armée

Mes problèm’ de colon

Auraient dû m’alarmer

Mais j’étais jeune et bon

Je devins fonctionnaire

Attaché d’ cabinet

J’ai dû m’ bouffer les nerfs

Pour pas me débiner

 

Et je pousse, je pousse…


 Si ça conteste tant

Si tant d’ gens sont déçus

C’est pas sans fondements

Qu’on en a plein le cul

Faut baisser l’ pantalon

A longueur de journée

Marcher à reculons

Et se faire entuber

 

Et je pousse, je pousse…

 

Lorsque rêves et désirs

Petit à p’tit s’affaissent

Qu’y n’ rest’ comm’ plaisirs

Que les histoir’ de fesses

On se sent tout petit

Coincé, cloué, vissé

On en prend son parti

Et on laisse pisser

 

Et je pousse, je pousse…

 

Pour l’intestin rétif

S’il existe un remède

Y’a pas de laxatif

Pour cett’ société laide

Et dans les chiottes au moins

C’est pas comm’ dans l’ cerveau :

On peut, en cas d’ besoin

Tirer la chasse d’eau

 

Petite conclusion sur un air connu, « Sur le pont d’Avignon » :

Sur le pot d’ la vie con

On y pense, on y pense

Sur le pot d’ la vie con

On y pense

Tout sent pas bon

 

 

 


vendredi 23 avril 2021


Conte Jouin n° 19

J'étais encore jeune. Influencé sans doute par Brel, je me faisais peu d'illusions. Quoi que...


Curriculum

 

J’suis entré dans la vie comm’ par inadvertance

Mon enfance a passé l’espace d’une danse

Ayant pour le lycée que fort peu d’attirance

J’ai suivi un chemin sans moindre consistance

 

Si je ne suis conscient que de mon inconscience

Ce n’est pas de ma faute, il faut m’en excuser

J’ai plongé dans le mal sans la moindre défiance

Et puis j’y suis resté par flemme de changer

 

Je n’ai pour aucun dieu l’espoir d’une croyance

Je crois plus volontiers à une grande amitié

Je fais même à l’amour de temps en temps confiance

La vue d’un chien battu me fait de la pitié


 Je n’ai pour les bourgeois aucune déférence

Ils sont gras, dédaigneux et puants de principes

Tout pourrit avec eux dans leur indifférence

Ni le froid, ni la faim ne leur nouant les tripes

 

Je crois que l’avenir offre peu d’espérance

Effaçant peu à peu en nous tout romantisme

Nos cerveaux mécaniques dans leur grande aberrance

Ne croient qu’en la technique et louent le modernisme

 

Mais qu’à cela ne tienne, j’ai en moi l’assurance

Que chaque être ici-bas aime vivre sa vie

Et le bon sens aidant on prend son existence

Comme la seule chose que l’on a pour la vie