mercredi 28 avril 2021


Conte Jouin n° 20

Texte largement inspiré par l'excellent "Constipation Blues" de l'inénarrable Sreamin' Jay Hawkins


Sur le pot d’ la vie con

 

Assis sur la lunette

J’essaie de fair’ caca

Et d’ refair’ la planète

Qui m’ caus’ bien du tracas

Les coud’ sur les genoux

La tête entre les mains

J’ai tout l’air entre nous

Du penseur de Rodin

 

Et je pousse, je pousse

Malgré mes crispations

J’ trouv’ pas de solution

Et je pousse, je pousse

Pas de libération

C’est la constipation

 

Problèmes d’intestins

Problèm’ de société

On est comm’ des crétins

Quand y’a pas d’ débouchés

Crispé, sourcils froncés

Sans cess’ je me répète

Qu’à force de forcer

Y faudra bien qu’ ça pète

 

Et je pousse, je pousse…

 

Tiens, déjà à l’armée

Mes problèm’ de colon

Auraient dû m’alarmer

Mais j’étais jeune et bon

Je devins fonctionnaire

Attaché d’ cabinet

J’ai dû m’ bouffer les nerfs

Pour pas me débiner

 

Et je pousse, je pousse…


 Si ça conteste tant

Si tant d’ gens sont déçus

C’est pas sans fondements

Qu’on en a plein le cul

Faut baisser l’ pantalon

A longueur de journée

Marcher à reculons

Et se faire entuber

 

Et je pousse, je pousse…

 

Lorsque rêves et désirs

Petit à p’tit s’affaissent

Qu’y n’ rest’ comm’ plaisirs

Que les histoir’ de fesses

On se sent tout petit

Coincé, cloué, vissé

On en prend son parti

Et on laisse pisser

 

Et je pousse, je pousse…

 

Pour l’intestin rétif

S’il existe un remède

Y’a pas de laxatif

Pour cett’ société laide

Et dans les chiottes au moins

C’est pas comm’ dans l’ cerveau :

On peut, en cas d’ besoin

Tirer la chasse d’eau

 

Petite conclusion sur un air connu, « Sur le pont d’Avignon » :

Sur le pot d’ la vie con

On y pense, on y pense

Sur le pot d’ la vie con

On y pense

Tout sent pas bon

 

 

 


vendredi 23 avril 2021


Conte Jouin n° 19

J'étais encore jeune. Influencé sans doute par Brel, je me faisais peu d'illusions. Quoi que...


Curriculum

 

J’suis entré dans la vie comm’ par inadvertance

Mon enfance a passé l’espace d’une danse

Ayant pour le lycée que fort peu d’attirance

J’ai suivi un chemin sans moindre consistance

 

Si je ne suis conscient que de mon inconscience

Ce n’est pas de ma faute, il faut m’en excuser

J’ai plongé dans le mal sans la moindre défiance

Et puis j’y suis resté par flemme de changer

 

Je n’ai pour aucun dieu l’espoir d’une croyance

Je crois plus volontiers à une grande amitié

Je fais même à l’amour de temps en temps confiance

La vue d’un chien battu me fait de la pitié


 Je n’ai pour les bourgeois aucune déférence

Ils sont gras, dédaigneux et puants de principes

Tout pourrit avec eux dans leur indifférence

Ni le froid, ni la faim ne leur nouant les tripes

 

Je crois que l’avenir offre peu d’espérance

Effaçant peu à peu en nous tout romantisme

Nos cerveaux mécaniques dans leur grande aberrance

Ne croient qu’en la technique et louent le modernisme

 

Mais qu’à cela ne tienne, j’ai en moi l’assurance

Que chaque être ici-bas aime vivre sa vie

Et le bon sens aidant on prend son existence

Comme la seule chose que l’on a pour la vie

 

 

 

 

 

 

 

 


mercredi 21 avril 2021

Valérie Hervo "Les Dessous des Chandelles"

 

Editeur : Cherche Midi

 Collection « Documents »


176 pages

18 €

 Sortie le 25 février 2021

 

Ce livre est un aller et retour incessant entre l’ombre et la lumière. Mais dans des rapports inversés.

Je m’explique : Valérie Hervo vit dans l’ombre le jour et dans la lumière la nuit. La femme soumise et sous emprise qu’elle est le jour se métamorphose insolemment en dominatrice la nuit. Le jour est synonyme d’enfermement, de solitude, de soumission, de repli sur elle-même… La nuit symbolise la générosité, l’empathie, la complicité, bref la liberté. Une liberté totale, exaltante, enivrante, sans tabous. Une liberté toute entière consacrée au plaisir et au partage.

 Exaltée la nuit, mélancolique le jour, Valérie Hervo nous livre dans Les Dessous des Chandelles le récit d’une dualité qui confine à la schizophrénie. Ce témoignage est remarquablement écrit, avec un soin tout particulier apporté avec subtilité aux têtes de chapitres. Pourtant, ce n’est pas si évident de décrire au fil des pages, des sentiments, des sensations, des émotions, car on risque l’écueil de la redondance. Ce n’est pas le cas ici.

 Ce livre est donc une longue analyse, une introspection qui conduit à une thérapie salvatrice.

Pour Valérie Hervo, les Chandelles constituent le refuge de tous les possibles. Ce lieu qu’elle a réalisé, construit, aménagé, réglementé à l’aune de ses fantasmes est en fait une formidable ode à La Femme, à ses plaisirs, à son émancipation, à son affranchissement. C’est là le vœu de Valérie.

C’est à travers ces femmes qu’elle se réalise, qu’elle existe. Si elle ressent ce besoin impérieux d’être maîtresse de ses actes la nuit, c’est incontestablement pour essayer de venir au secours de la petite fille abusée par son grand-père lorsqu’elle avait 6 ans… Le cheminement a été long, tout simplement parce que cette agression a été longtemps enfouie. Il lui a fallu une psychothérapie pour que ressurgissent les sévices subis… 38 ans plus tôt ! et qu’elle puisse enfin les affronter, les verbaliser et vivre avec. Elle a enfin compris pourquoi ses angoisses, pourquoi ses somatisations, pourquoi sa vie sentimentale chaotique, pourquoi cette appétence pour le sacrificiel.

 Les Dessous des Chandelles est un long parcours initiatique. C’est l’histoire d’une reconstruction. Un beau message d’encouragement et de solidarité envers toutes les femmes, les victimes comme les épargnées.

mardi 20 avril 2021


Conte Jouin n° 18

Quand le jeu avec les mots vient au secours de la pudeur...


Tu m’ plais

 

Une oasis en plein désir

Je m’y jette, j’ai soif de toi

Toi qui fais le poids et désaltère

Et si tu n’étais qu’un mirage ?

La caravan’ de mes plaisirs

Ne s’arrête que dans tes bras

Je m’offre et m’agite à découvert

Mais je n’ défais pas mes bagages

Gloire ou séduire, il faut choisir

Dans ma tête c’est l’embarras

Un' demi-star et ses mystères

Mais ne surtout pas être sage

 

Tu m’ plais, tu m’ plais

Mon cœur affich’ complet

Tu m’ plais, tu m’ plais

Fais-moi l’amour s’il te plaît

Tu m’ plais, tu m’ plais

T’es Blanch’ Neige et moi Simplet

Tu m’ plais, tu m’ plais

Depuis longtemps je t’app’lais

Tu m’ plais, tu m’ plais

With you I want to play

Tu m’ plais, tu m’ plais

J’os’ pas l’ dir’ dans les couplets


 Je suis pris en flagrant délire

Je perds la têt’, j’ suis fou de toi

Philtre ou élixir, sort de sorcière

Mon seul miroir c’est ton visage

Je m’assoupis dans un soupir

Sous la couett’, je rêve de toi

T’es mon paradis, j’ vais pas m’en faire

Démon de mes nuits, doux chantage

 

 

 

 


vendredi 16 avril 2021


Conte Jouin n° 17

Accro aux romans et aux films noirs, je nourrissais une certaine tendresse pour les anti-héros...


Cafardnaüm

Je suis anxieux, là, dans le noir

Je suis groggy, j’ai peur, j’ai froid

J’ai peut-êtr’ bien trop bu ce soir

Mais au cafard j’étais en proie

 

Quand vers deux heures du matin

Je suis entré dans ce tripot

Plein de truands et de putains

J’aurais dû fair’ gaffe à ma peau

Au lieu de ça je m’ suis r’dressé

Et j’ai roulé des mécaniques

Au barman je m’ suis adressé

En commandant un gin tonic

« Je cherche quelqu’un, que j’y ai dit

Tu vas p’têtr’ m’aider à l’ trouver

Celui qu’ je cherche c’est l’oubli »

Et je m’ suis mis à rigoler

 

Dans la sall’ soudain silencieuse

Un escogriffe s’est levé

Il avait la mine soucieuse

J’ai continué de rigoler

« Ne t’approch’ pas, que j’y ai dit

J’ai comme une envie de tuer

A moins qu’ tu n’aim’ le rififi

Tu ferais mieux de te tirer »

Il m’a regardé tristement

D’autres truands s’étaient levés

« Ecoutez-moi, c’est simplement

Le temps que je voudrais tuer »


 Faisant fi de ma plaisant’rie

L’homme a sorti un cran d’arrêt

Et aussitôt s’en est servi

Pour couper l’électricité

Dans le noir je m’ suis cavalé

Je ne pensais qu’à me cacher

Je suis entré dans les WC

Mais l’homme m’avait rattrapé

Pris de panique j’ai vomi

Pour moi les carottes étaient cuites

« Je suis bourré, que j’y ai dit

Alors, tir’ mon vieux, mais fais vite »


Le regard du gars s’est glacé

Sa main serrait quequ’ chos’ de gros

Et puis soudain il a tiré

Il a tiré… la chasse d’eau

 

 

 

 

 


mardi 13 avril 2021

 


Conte Jouin n° 16


Enrico "Mendiant de l'amour" Macias, sors de mon corps !


Un peu d’amour

 

 Moulée dans un jean qui te serre

Et l’air parfois de manquer d’air

Sur le trottoir de mes pensées

Je vois ton corps se balancer

Quand je te vois, ça me fait mal

Ce côté félin, animal

Mais dès que chez moi je suis seul

Je suis en manqu’ de ta p’tit’ gueule

 

J’ peux pas supporter tes manières

Tes faux-cils, tes fauss’ cris’ de nerfs

Ton leitmotiv c’est de séduire

Et de sentir qu’on te désire

Quand je te vois ça me fait mal

Mais sans toi j’ai encor’ plus mal

Je suis la victim’ de ton jeu

Dans un remak’ de l’Ange Bleu

 

          Ne maquill’ pas tes sentiments

          N’apprends pas à ton cœur à fair’ semblant

          Tu ne donn’ pas, tu prends, tu prends

          Profites-en, mais pour combien de temps ?



J’aim’rais qu’un jour tu sois sincère

Toujours mentir, à quoi ça sert ?

Surtout qu’ tu t’ mens d’abord à toi

Dans ton miroir, est-c’ que c’est toi ?

Quand je te vois ça me fait mal

J’ai peur que ça finisse mal

J’ m’en fous si ça dur’ pas toujours

Mais donne-moi un peu d’amour

 

 

 


vendredi 9 avril 2021


Conte Jouin n° 15

Eh oui, j'ai été une brute épaisse... Vrai ou faux ?


A coups de poings

 

 A coups de gueule, à coups de poings

Ma famille ? C’était la rue

Et la loi du plus fort

Avait fait de moi un dur

Mais j’étais seul, sans un copain

Quand un’ fille est apparue

Pour un’ fois, sur son corps,

Mon regard était pur

 

Jamais peur des nuits noires

Jamais peur des bagarres

Mais cett’ fill’ m’a fait trembler

Pas peur des remords

Jamais peur de la mort

Mais cett’ fill’ m’a fait pleurer

Et mes poings se sont ouverts, hésitants

Pour offrir des caresses

Et mon cœur s’est ouvert en grand

Pour offrir de la tendresse

 

Putain d’amour

Tu m’as mis K.O.

On pès’ pas lourd

Mais c’est vach’ment beau


 Mes coups de gueul’, mes coups de poings

Sont rangés dans une malle

J’ai changé de famille

Pour une femme et des enfants

Mais attention, s’il y a quelqu’un

Pour oser

Leur fair’ du mal

C’est juré : sur ma vie

Mes poings, je les reprends

 

 

 


mardi 6 avril 2021


Conte Jouin n° 14

J'aime assez cultiver ce côté loser qui n'est pas si éloigné que ça de la réalité...

Vacances amères


Il y a le soleil

Haut et beau dans le ciel

Et y’a toi, ma merveille

Qui fais la sourde oreille

Il y a un ciel bleu

Intens’ comme tes yeux

Je suis fou amoureux

Mais toi tu boudes un peu

Et il y a la mer

Il y’a tout pour nous plaire

Mais nos vacances ont un goût amer


 Je louche sur ton corps

J’aimerais bien encore

Que ma bouch’ le picore

Mais tu n’es pas d’accord

J’essaie d’ prendre ta main

 En ami, en copain

Tu joues mine de rien

Avec le sable fin

Je tente un mot ou deux

Just’ pour voir, c’est nerveux

Mais tu pousses un soupir malheureux

 

Dire que ces vacances

J’ m’en réjouissais d’avance

C’est vraiment pas de chance

Tu n’es qu’indifférence

Tu as perdu ta voix

C’est à pein’ si tu m’ vois

Et si ton corps est là

Ton esprit n’y est pas

J’ parle pas de ton cœur

Et chaque nuit, je t’entends qui pleure

 

Ça devait arriver

Ça me pendait au nez

Pendant tout’ ces années

J’ai p’t’êtr’ pas su t’aimer

Je vois bien qu’ t’en a marre

J’aim’ pas ton désespoir

Si tu le veux, tu pars

Tiens ! J’ t’emmène à la gare

Mais, bien sûr, préviens-le

Qu’il te rende heureuse autant qu’il peut

 

 

 

 


vendredi 2 avril 2021


Conte Jouin n° 13

Mes grands élans de romantisme candide se terminaient systématiquement en queue de poisson...


Attention les yeux !

 

Tes beaux yeux bleus sont comme un ciel

Dans lequel je suis à l’abri

Et l’amour est le grand soleil

Qui pour nous deux seulement brille

Et dans ce ciel je viens planer

Comme un oiseau de paradis

Notre amour c’est l’éternité

Face aux quelques jours d’une vie

Tes beaux yeux bleus sont comme un ciel

Où je joue au petit nuage

Tu es pour moi providentielle

Et j’ai presque envie d’être sage

 

Tes beaux yeux bleus sont une mer

Où mon regard aime à plonger

Je ne te trouve pas amère

En toi je voudrais me noyer

Au creux de tes bras je navigue

En espérant que la tempête

Les vents et la passion se liguent

Pour sombrer et perdre la tête

Tes beaux yeux bleus sont une mer

Que je voudrais semblable à celle

Où Tristan et Iseult s’aimèrent

Mêlés dans leur dernier sommeil


 Tes beaux yeux bleus sont comme un ciel

Tes beaux yeux bleus sont une mer

Des paradis artificiels

Mieux vaut garder les pieds sur terre

Tes beaux yeux bleus sont comme un ciel

Où je plane en déséquilibre

Si je tombe, c’est démentiel

J’ignore tout en chute libre

Tes beaux yeux bleus sont une mer

Je m’y fais mener en bateau

Ô navigation éphémère

Je sens déjà que je prends l’eau

 

Pour l’amour entre mer et ciel

Je ne veux pas risquer ma peau

Mon ciel de lit m’est essentiel

J’y suis comme un poisson dans l’eau