Editions Le Cherche Midi
Cahier
photos
18,90
€
La
biographie de Christophe Dominici, parue en 2007, vient d’être rééditée suite à
son décès survenu le 24 novembre 2020… La lecture de cet ouvrage nous permet d’apporter
quelques réponses quant aux circonstances dramatiques de sa disparition, qu’elle
ait été volontaire ou accidentelle.
Christophe Dominici n’a jamais été adulte. Il est resté toute sa vie un ado de 14 ans meurtri à jamais par le décès tragique de sa sœur Pascale, disparue à l’âge de 24 ans dans un accident de la route.D’ailleurs, il le reconnaît lui-même avec une franchise désarmante : « Je suis un homme-enfant » (page 115)… Et, tout au long du livre, on comprend combien il était resté à jamais dévasté par la mort de Pascale : idées autodestructrices (page 41), crises d’angoisse (page 41), manque de confiance en lui (page 64), inquiétude permanente (page 96), autant de problèmes psychiques qui l’amènent à décréter page 175 : « Je ne suis pas un homme heureux ».
Pourtant
Christophe Dominici, heureusement, n’était pas que ce client idéal pour psy. Il
pouvait aussi être drôle. C’était un sacré chambreur doublé d’un meneur d’hommes,
d’un gagneur. Il n’aurait pas réussi sa prestigieuse carrière de sportif de
haut niveau sans ce tempérament contrasté. Chez lui, le yin et le yang se
nourrissaient l’un l’autre, se tiraient la bourre à savoir lequel prendrait le
dessus. Hélas, c’est le yin qui a emporté ce bras de fer qui aura duré 34 ans ;
de ses fatidiques 14 ans à ses funestes 48 ans.
Continuellement à la recherche de la « performance absolue », il était aussi exigeant, sinon plus, avec lui-même qu’avec les autres… Afin de contrebalancer son manque de confiance en lui, il était obsédé par le désir de plaire : « Séduire est chez moi une seconde nature » (page 112). Charmeur, « Homme à femmes » proclamé, certes, mais aussi « terriblement macho » (page 104). On peut affirmer qu’il s’est systématiquement ingénié à détruire son magnifique premier amour. Lucide et autocritique, il raconte sans concession ses excès, ses abus, ses injustices. Il a tout fait pour être désaimé alors que son cœur battait à contre sens.
A plusieurs reprises, il déclare que « tout est dans la tête ». Quand ça va psychiquement, tout va bien, il renverse des montagnes, il est vaillant, généreux, entreprenant, indestructible. Quand ça ne va pas, il sombre dans la dépression. C’est pourquoi, il avait si souvent recours à des médecins, des psy, à un kinésiologue. Mais cela n’aura pas suffi. Une ultime trahison va avoir raison de lui, anéantissant tous ses espoirs de rebond dans le monde du rugby. Il n’a pas eu la force d’un dernier raffut. Le moulin du club de Béziers a terrassé Dom(inici) Quichotte…
Quand
on peut s’enorgueillir d’un palmarès aussi prestigieux que le sien (67 capes, deux
Grands Chelems, cinq titres de champion de France…) la gestion de l’après-rugby
n’est pas évidente : « Post coïtum animal triste ». Sans l’adrénaline
des matchs et des enjeux, sans la fièvre de la compétition, sans les odeurs de vestiaires,
sans l’esprit d’équipe, sans la gaillarde camaraderie inhérente à ce noble
sport de combat, sans l’amour du public, si l'on n'a pas de projets forts et immédiats, on a tôt fait de se laisser envahir
par le spleen.
Bleu à l’âme contient aussi énormément de pages consacrées au rugby. On peut y suivre année après année les paliers d’une incomparable carrière. Christophe était un guerrier au grand cœur. Il était aussi irritant qu’attachant. Il suffit de lire les témoignages de ceux qui l’ont côtoyé et aimé, Bernard Laporte, Fabien Galthié, Max Gazzini et Yann Delaigue, pour comprendre combien il peut manquer aujourd’hui au monde si fraternel et solidaire de l’Ovalie.
Et
puis il y a la lettre. La lettre si émouvante que lui adresse son père, dans
laquelle une immense douleur se le dispute à une profonde fierté.
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