jeudi 27 mai 2010
Laurent Baffie est un sale gosse
Théâtre du Palais-Royal
38, rue de Montpensier
75001 Paris
Tel : 01 42 97 40 00
Métro : Bourse / Palais-Royal / Pyramides
Ma note : 7/10
Le pitch : Le roi de l’impertinence est de retour !
Et pour l’occasion, il est seul en scène, avec en prime, pour son premier one-man show, une version interactive. Et il affiche clairement son ambition : « Faire rire, faire réfléchir et, pourquoi pas, faire jouir ! »
Ames sensibles s’abstenir. Deuxième degré recommandé… voire exigé.
Mon avis : C’est sûr, Laurent Baffie ne peut pas plaire à tout le monde, c’est indéniable. Il ne faut pas avoir peur de se faire apostropher, secouer, bousculer, agresser, ridiculiser, injurier… ni avoir les oreilles trop délicates. De toute façon quand on vient à son spectacle, on sait très précisément à quoi s’attendre. Donc, à moins d’être maso ou s’être trompé à la sortie du Palais-Royal en croyant être entré à la Comédie Française, on est prévenu. C’est comme quand on monte dans le Grand Huit, on appréhende toujours un peu mais quand le wagonnet est parti, on s’accroche et on essaie de profiter des sensations. A part que même averti, le Laurent trouve toujours le moyen d’y aller encore plus loin et encore plus fort.
Si on veut bien profiter de ce spectacle qui a l’air entièrement basé sur l’improvisation et la réactivité de l’artiste en fonction de ses proies, il faut juste espérer ne pas faire partie de la bonne douzaine de victimes sur lesquelles il va jeter son dévolu. C’est effectivement bien plus confortable de voir une tierce personne se faire malmener en direct tranquillement installé dans son fauteuil. Si vous ne gagnez jamais au loto, vous avez de grandes chances de vous en sortir. En revanche, n’essayez pas non plus de penser que votre appartenance à une quelconque minorité (je cite en vrac – et ce n’est pas exhaustif - « les gougnasses, les gens de couleur, les personnes âgées, les femmes enceintes… » va vous apporter un soupçon d’immunité. Il ne faut même pas y penser… Laurent Baffie a besoin dès le départ de deux personnes : une chouchoute et une tête de Turc. Ces-deux « privilégiés » vont être accaparés pendant toute la durée du spectacle. Ensuite, il possède un sbire entièrement dévoué à ses turpitudes qui agit un peu comme un rabatteur dans une chasse à courre. Il va traquer le gros gibier et le ramène à son maître qui va se charger sadiquement de l’hallali.
Ceci dit, même si on ne fait pas partie des (mal)heureux élus, on n’en est pas moins sollicités par la pratique de quelques exercices collectifs qui fleurent bon la colo de vacances (parfois même la colo-scopie, pour être plus précis). Baffie n’a pas d’états d’âme, pas de scrupules, aucune échelle des valeurs. Il passe sans transition de l’humour le plus potache et la vanne la plus pitoyable (j’en ai relevé deux qui feraient même honte à l’Almanach Vermot), à la saillie la plus percutante et au délire le plus effervescent. Il est sur scène comme derrière le micro d’Europe 1 : libre et incontrôlable. Mais il n’est pas que ça car il parsème son spectacle d’effets spéciaux, de magie, de montages vidéo, appelés à illustrer certaines époques de son existence. Il ne joue pas qu’au semeur de trouble (pour ne pas dire plus), il nous livre une partie de lui-même ; son enfance, ses premiers pas dans la pub, la figuration, les petits boulots, ses débuts à la télévision, les coulisses de certaines émissions, glissant ça et là quelques révélations et confidences pour le moins réjouissantes… Et le gueux parvient même à nous offrir deux petites parenthèses de tendresse histoire de laisser deviner que le sale gosse fait parfois place à un homme pétri de bons sentiments. Mais ça ne dure pas longtemps, il faut vraiment être à l’affût. Il retombe vite dans ses travers (de porc, parfois) et se déchaîne de plus belle sur autrui (toujours franco de porc)…
Laurent Baffie est un fameux virtuose de l’improvisation et de l’à-propos. Il possède un sens redoutable de la formule et son sourire est là pour gommer les quelques grossièretés ou insanités qu’il profère. La vanne est son principal fonds de commerce à cet épicier ; dans le sens étymologique du terme puisque ses propos le sont fortement, épicés. Et il faut vraiment posséder un palais… royal pour réussir à avaler un menu aussi relevé. Pour en revenir à l’image de vénerie précédemment utilisée, ne laissez surtout pas une biche effarouchée à portée de ce redoutable prédateur, car ce n’est pas l’ouverture de la chaste.
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