jeudi 6 mars 2008

L'abribus


Théâtre de la Gaîté Montparnasse
26, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 16 18
Métro : Gaîté / Edgar Quinet

Une comédie de Philippe Elno
Mise en scène par Philippe Sohier
Avec Florence Foresti et Philippe Elno

Ma note : 7/10

L'histoire : Elle, c'est une star de cinéma, son univers, c'est le show business. Son drame, c'est de tomber en panne de voiture et de GPS en rase campagne, dans un endroit tellement paumé qu'aucun de ses deux portables ne passe. Elle vit un véritable cauchemar, d'autant qu'elel attend la réponse d'un producteur pour un film très important... La seule personne qu'elle croise dans ce no man's land est un apiculteur nonchalant, qui ne regarde pas la télévision et qui ne peut donc pas réaliser qu'il est en présence d'une vedette de l'écran. La seule échappatoire est le passage du bus. Un bus qui, pour le moment, ne peut pas parvenir jusqu'à eux en raison d'une rivière en crue. Il faut donc attendre la décrue... et tuer le temps.

Mon avis : Il est évident que cette pièce a été écrite sur mesure à l'intention de Florence Foresti. Par rapport à ce qu'elle donne en one-woman show, vous ne serez pas dépaysé. Elle nous livre en effet pendant une heure et demi un véritable récital de pitreries en tous genres qui nous comblent d'aise. Fille improbable que Louis de Funès aurait eue avec Muriel Robin, Florence Foresti, c'est... Florence Foresti ! En deux-trois années, elle s'est imposée comme une des toutes meilleures comiques (tous sexes confondus) de l'espace francophone. Elle possède dans le jeu une vista incomparable. Elle a le geste juste, la mimique précise et imparable. Il ne faut pas la quitter des yeux car elle invente sans cesse : une attitude, une bribe de mot, un sourire figé, un clin d'oeil complice... Toujours en mouvement, elle est toujours dedans.

Et elle est la première à se moquer d'elle-même et basta pour l'image ! Son entrée en scène donne le ton. Imméditament en survoltage, elle apparaît coiffée d'un serre-tête surmonté de deux grosses boules jaune vif qui ne cessent de s'agiter. Elle est ridicule, elle le sait, elle assume et même, elle en rajoute. Sa folle effervescence est d'autant plus déplacée que tout est calme et tranquille autour d'elle, dans ce coin de campagne anonyme. Sur un banc, un homme en tenue d'apiculteur est assoupi. Ce qui est un sommet de l'insupportable pour notre star en perdition. Elle a l'habitude d'être servie, qu'on obéisse au moindre de ses caprices. Ce manant va donc devoir payer de sa personne pour la sortir de cette impasse. Mais elle tombe sur un personnage un peu lunaire, débonnaire et flegmatique, totalement coupé du monde de l'audiovisuel par manque d'antenne et qui ne sait donc pas qu'il a affaire à une célébrité. On comprend tout de suite que ce sont deux mondes qui vont s'opposer et se frictionner. Il s'installe de part et d'autre une incompréhension totale et une éprouvante difficulté à communiquer. Plus notre star s'agite, plus Eric, l'indigène dégingandé, est calme. Pire, même, il s'en amuse et se permet de la titiller un peu plus. On pense parfois à Bourvil et de Funès dans La grande vadrouille, à part qu'Eric est beaucoup moins naïf que Bourvil. Il n'est jamais dupe et peut utiliser à l'envi son ironie malicieuse. Il a le piquant des abeilles dont il s'occupe. Pour en terminer avec la référence à La grande vadrouille, vous verrez, il y a une scène qui est carrément l'affiche du film !

Florence Foresti utilise toutes les facettes de son immense talent pour essayer d'obtenir une aide inconditionnelle et servile de l'autochtone. Elle est tour à tour surexcitée, affolée, contrariée, cabotine, cauteleuse, fourbe, insidieuse, simulatrice, autoritaire, manipulatrice, arbitraire, impatiente, insupportable, émouvante, fragile, charmeuse... (penser à acheter un dictionnaire des synonymes...)
On pourrait craindre qu'elle écrase son partenaire de son bouillonnement permanent, mais il n'en est rien. Philippe Elno ne lui sert pas la soupe, il lui renvoie la balle avec subtilité ; elle court la chercher, la lui rapporte, il feinte le tir, relance dans une autre direction... La mise en scène est sans faille.
Le seul problème, c'est que le sujet est tout de même mince pour tenir le rythme à deux durant une heure et demie. Aux trois-quarts de la pièce, ii y a une petite chute de tension et quelques ronronnements. Mais ce n'est pas grand chose et pour qui aime cette forme d'humour bon enfant, dénué de toute agressivité et méchanceté, mais non dépourvu d'une ironie satirique, L'abribus est la garantie de passer un excellent moment. Et puis, ne serait-ce que pour LA Foresti...

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