mardi 16 septembre 2008

Parlez-moi de la pluie


Un film écrit par Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri
Réalisé par Agnès Jaoui
Avec Agnès Jaoui (Agathe), Jean-Pierre Bacri (Michel), Jamel Debbouze (Karim), Pascale Arbillot (Florence), Guillaume de Tonquedec (Stéphane), Frédéric Pierrot (Antoine), Mimouna Hadji (Mimouna), Florence Loiret-Caille (Aurélie)...

Ma note : 6,5/10

L'histoire : Agathe Villanova, féministe nouvellement engagée en politique, revient pour dix jours dans la maison de son enfance, dans le sud de la France, aider sa soeur Florence à ranger les affaires de leur mère, décédée il y a un an.
Agathe n'aime pas cette région qu'elle a quittée dès qu'elle l'a pu. Les impératifs de la parité l'ont parachutée ici à l'occasion des prochaines échéances électorales.
Dans cette maison vivent Florence, son mari, et ses enfants. Mais aussi Mimouna, femme de ménage que les Villanova ont ramenée avec eux d'Algérie au moment de l'indépendance.
Le fils de Mimouna, Karim, et son ami Michel Ronsard entreprennent de tourner un documentaire sur Agathe Villanova, dans le cadre d'une collection sur "les femmes qui ont réussi".
On est au mois d'août. Il fait gris. Il pleut. Ce n'est pas normal. Mais rien ne va se passer normalement...

Mon avis : Ce film laisse une impression confuse. On s'y sent aimanté par la qualité des têtes d'affiche : Bacri-Debbouze-Jaoui, ça a de la gueule ! On s'installe donc avec cette agréable sensation liminaire que l'on va passer un bon moment de cinéma. Et puis le film commence... En demi-teinte ; en faux rythme. C'est comme une journée qui commence avec de petits nuages gris qui, poussés par un vent malin, vont grossir et s'épaissir. On sent qu'un orage va éclater et que tout le monde sera plus ou moins mouillé. Effectivement, certains seront juste éclaboussés alors que d'autres vont être carrément trempés. Le climat est parfaitement rendu.
Ce film météorologique fonctionne comme un diésel. Il démarre doucement. Le moteur se met à ronronner. A la moitié, il prend son rythme de croisière ; aux trois-quarts, il passe la surmutipliée, pour ralentir doucettement jusqu'à l'arrivée. Résultat, on trouve que la deuxième partie est bien supérieure à la première. Ce qui n'est pas plus mal car on se retire au moins sur une sensation positive.

Que reste-t-il justement de Parlez-moi de la pluie quand les lumières se rallument dans la salle ?
Des dialogues ciselés, percutants, excellents. Un Jean-Pierre Bacri phénoménal dans son personnage de raté magnifique, de loser flamboyant, de doux rêveur sympathique, de bras cassé irritant. Il est tout à fait remarquable. Alors qu'on attendrait logiquement Jamel, c'est Jean-Pierre Bacri qui fait preuve d'une formidable présence comique... Car Jamel, lui, joue tout en demi-teinte. Il est touchant de retenue et de fragilité (quelle jolie scène avec sa maman de cinéma !). Il se cherche, il n'est pas encore mature, il doute. Son personnage joue gros, impliqué qu'il est dans la réussite de ce documentaire... Agnès Jaoui, elle, est à l'image du film : elle ne fait que monter en puissance... Pascale Arbillot est parfaitement à sa place aux côtés de ce glorieux trio. Elle révèle une palette de jeu réellement étendue. Et puis la jolie Florence Loiret-Caille, dans le rôle d'Aurélie, nous enchante par sa spontanéité et sa fraîcheur.

S'il pleut beaucoup à un moment du film, c'est surtout dans les coeurs que le plus gros de l'orage frappe. Personne n'est à l'abri, personne ne sera épargné. Et quand le beau temps reviendra, il éclairera des individus complètement différents de ce qu'ils étaient au début. Car la vie de tous les jours interfère sans cesse dans cette histoire. Ce sont tous des êtres humains avec leurs problèmes. On réalise très vite que personne n'est bien dans sa peau, bien dans sa vie. Un bon lavage de cerveau va leur être salutaire. C'est sans doute là que réside le point fort de ce film, dans la psychologie des personnages. On est les témoins de leur cheminement intellectuel puis de leur métamorphose. C'est très fin, remarquablement dessiné. On s'aperçoit que ce n'est pas avec nos petits égoïsmes, nos "chacun pour soi" que l'on avance et que l'on est heureux. Au contraire, il faut parfois savoir s'arrêter, se regarder en face et se retourner pour voir les autres et leur rendre leur importance.
Bref, c'est un film vachement humain. Qui donne à réfléchir sur nos comportements. Les femmes y voient plus vite et mieux que nous. Elles discernent avec réalisme le moment où il ne faut pas aller trop loin. Alors, elles reprennent leur destin en main, aspirant dans leur soudaine certitude leurs compagnons un peu dépassés.

ce film parle donc de la pluie, de ces petites ou grandes dépressions qui nous affectent à un moment de notre vie, en espérant que l'anticyclone des Açores va revenir s'installer pour un bon bout de temps et nous réchauffer enfin l'âme et le coeur.
Ce n'est pas un grand film, mais c'est un très joli film.
Et puis, il y a Jean-Pierre Bacri ! Avec lui, la pluie fait des claquettes. Alors, ne serait-ce que pour lui...

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