mercredi 9 avril 2008

Le Banc


Théâtre Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 30
Métro : Edgar Quinet/Gaîté/Montparnasse

Une comédie en 7 tableaux de Gérald Sibleyras
Mise en scène par Christophe Lidon
Avec Philippe Chevallier et Régis Laspalès

Ma note : 7/10

L'histoire : Vladimor Zkorscny et Paul Letellier forment un duo de piano à quatre mains. Depuis vingt ans, ils sont assis l'un près de l'autre sur un petit banc d'à peine 1 mètre 10. Leur carrière vient de prendre une tournure heureuse : ils viennent de recevoir un prix important pour leur dernier disque. Une tournée au Japon est organisée. Soucieuse de les gâter, une fondation leur prête un magnifique chalet de montagne sur la frontière austro-italienne pour qu'ils puissent répéter en toute tranquillité. Rostropovitch, le célèbre viloncelliste, y avait lui-même séjourné voici quelques années. Au lieu de se mettre à travailler, les deux pianistes se parlent. Bientôt, certaines vérités commencent à être dites faisant peu à peu place aux reproches puis au règlement de compte...

Mon avis : Etonnant ! On a du mal à croire que cette pièce n'a pas été écrite sur mesure pour le duo Chevallier/Laspalès. Il y a tellement d'éléments qui pourraient se rapporter à leur "couple" que c'en est vraiment troublant. Ils s'approprient cette pièce avec une telle gourmandise et une telle jubilation qu'ils la font entièrement leur.

En toile de fond, des montagnes se dessinent. Sur une musiquette joliment jazzy, deux hommes viennent prendre possession d'un confortable chalet. Vladimir et Paul sont deux pianistes. Depuis une vingtaine d'années, ils sont comme deux frères siamois liés l'un à l'autre devant un piano sur lequel ils jouent à quatre mains. Si, jusque là, ils paraissaient supporter cette promiscuité, il semblerait que cette parenthèse autrichienne censée leur permettre de répéter leur prochaine tournée dans la plus grande sérénité leur serve soudain de révélateur. Les vertiges de l'altitude peut-être... Toujours est-il que nos deux partenaires commencent à se chamailler ; d'abord pour des futilités, puis peu à peu pour des sujets plus personnels. En fait, tout les sépare. Ils sont associés par la force des choses. Vladimir (Chevallier) est célibataire, Paul (Laspalès) est marié. Ils n'ont pas du tout le même caractère. Vladimir apparaît très vite particulièrement égoïste, prétentieux, acariâtre, voire même un peu tordu. Il se comporte un peu à la manière d'une femme jalouse. Paul semble plus cool, plus sympa, plus arrangeant. Mais il va à son tour exhaler les affres de la jalousie. Et, les problèmes d'ego prenant rapidement le dessus, les reproches ne tardent pas à fuser. C'est un vieux couple qui se déchire...

Ce "drame" se déroule en sept tableaux ponctués à chaque changement par quelques mesures de Rostrovitch. Quant au fameux Banc, troisième "personnage" important de la pièce, il s'agit bien sûr d'une métaphore. Il symbolise l'endroit où ils sont tenus de se tenir, de se frôler, de partager le succès. Moins ils se supportent, plus ils s'y sentent à l'étroit. C'est très subtil.
Chevallier et Laspalès réussissent le tour de force de rester fidèles à leurs personnages habituels tout en s'en éloignant. Chevallier ajoute simplement un peu plus de perfifie pendant que Laspalès gomme son côté caricatural. Il s'autorise toutefois fugitivement quelques attitudes qui nous rappellent l'hurluberlu qu'il campe dans leurs sketches (quand il tape du pied par exemple). Mais ce ne sont que des clins d'oeil fort réjouissants qui ne perturbent en rien le sens profond de la pièce.

Dans la réalité de leur duo, ils auraient très bien pu vivre ce type de relation déliquescente et ne devoir se supporter que pour de basses raisons professionnelles. Heureusement pour eux, il n'en est rien. Leur belle complicité est toujours là, ce qui leur permet justement de jouer jouissivement avec cette situation. Ils reconnaissent d'ailleurs bien volontiers que ce sujet agit sur eux comme une catharsis.
En tout cas, dans cette pièce, ils sont tout à fait "bancables"

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