mardi 9 mars 2010

Sans laisser de traces


Un film de Grégoire Vigneron
Scénario de Laurent Tirard et Grégoire Vigneron
Avec Benoît Magimal (Etienne Meunier), François-Xavier Demaison (Patrick Chambon), Julie Gayet Clémence Meunier), Léa Seydoux (Fleur), Jean-Marie Winling (Maurice), Dominique Labourier (Micheline), André Wilms (François Michelet), Stéphane de Groodt (Kazinski)
Sortie le 10 mars 2010

Ma note : 6,5/10

L’histoire : A bientôt 40 ans, Etienne est sur le point de prendre la présidence de son groupe. Mais, toujours hanté par une injustice qu’il a commise au début de sa carrière et qui lui a mis le pied à l’étrier, il aimerait soulager sa conscience. Sur les conseils d’un ami de jeunesse qu’il vient à peine de retrouver, il se rend chez l’homme qu’il a lésé à l’époque pour le dédommager. Mais les choses tournent mal et l’homme est tué par son ami. Etienne tente alors de reprendre le cours de sa vie, mais celle-ci vire peu à peu au cauchemar…

Mon avis : Voici un film qui démarre sous les meilleurs auspices avec un Benoît Magimel très convaincant en homme pressé, sorte de working boy fonceur et impitoyable en affaires. Or, très vite, on constate que son insolente réussite a été construite sur un coup tordu. Il a pris à son compte un brevet reçu par la poste, brevet qui allait faire la fortune de son entreprise. Au moment d’en venir seul le grand patron à la place de son beau-père, le remords se fait de plus oppressant. Etienne n’est pas un robot destructeur, il a du cœur et il aimerait bien pouvoir dédommager sa victime. Tout est donc en place pour installer le climat d’un bon thriller. Il ne manque que l’aiguillon qui va l’amener à franchir le pas. Cet aiguillon, il prend la forme de Patrick Chambon (François-Xavier Demaison), un ex-ami de jeunesse rencontré par hasard à un distributeur.
Devant l’air bonhomme de Patrick, Etienne libère sa conscience. Patrick lui propose spontanément de l’accompagner chez le vrai père du brevet. Une fois arrivés sur place, les deux garçons se trouvent confrontés à un individu amer et revanchard qui ne supporte pas d’avoir été spolié. Pour rattraper toutes ces années perdues, il exige une rente colossale. Le ton monte, l’homme se fait menaçant envers Etienne. Voyant son ami en danger, Patrick le frappe à la tête. Hélas, le coup s’avère mortel. Etienne et Patrick s’enfuient…
A ce moment de l’histoire, le thriller est parfaitement lancé. Et on se doute que Patrick, être lâche, veule et vénal, va désormais pourrir la vie d’Etienne… Ce qui ne manque pas bien sûr d’arriver.
Mais c’est aussi à ce moment que les invraisemblances commencent à s’accumuler. A trop vouloirs créer de rebondissements, on part un peu dans tous les sens. N’est pas Hitchcock qui veut… Le grand amateur de polars que je suis a souffert devant les grosses ficelles du scénario. A commencer par l’intrusion inopinée de Fleur, la fille de la victime qui est un peu tirée par les cheveux, même si elle contribue à refermer le piège autour d’Etienne. Lequel Etienne, foncièrement honnête et persuadé qu’on peut tout arranger avec l’argent – un réflexe qui se produira plusieurs fois au cours du film – fait tout ce qu’il peut pour acheter les silences (Patrick) ou aider financièrement une pauvre orpheline (Fleur). Rien ne se déroule comme prévu et l’étau se resserre encore plus.
Les incohérences continuent à gâcher le plaisir de l’esprit trop cartésien. Certaines scènes, celle de l’appartement où Fleur donne une fête ou celle où le flic confie anormalement ses indices par exemple, manquent totalement de logique. On comprend bien qu’elles sont là pour continuer à charger la mule, mais ça manque de crédibilité. Résultat on a tendance à décrocher et même, parfois, à se laisser aller à sourire…

Et bien, malgré tout, il y a suffisamment d’éléments largement positifs pour que les personnes pas trop difficiles se laissent porter par cette histoire.
D’abord, il faut bien reconnaître que la fin est magistrale. Là, il y a un vrai suspense, super stressant, super bien joué par Benoît Magimel. De toute façon, tous les acteurs son remarquables et ils se donnent à fond malgré les ressorts détendus. Ils sont vraiment tous bons.
Benoît Magimel campe magistralement un homme dont le fond est bon. Sa légitime ambition est plombée par son méfait de jeunesse. Tout ce qu’il veut, c’est réparer son geste malveillant. Bien sûr, il le fait maladroitement. Pareil avec son épouse. Il est évident qu’il l’aime et qu’il la respecte, mais son lourd secret pèse de plus en plus entre eux. Comme quoi, il faut toujours dire les choses. Ensuite, le jeu de Magimel ne fait que monter en puissance. Il devient parano et irascible. Il faut dire qu’il y a de quoi.Il porte le film sur ses épaules et il en a largment l'envergure.
François-Xavier Demaison fait la preuve qu’il est extrêmement à l’aise dans ce genre de registre dans lequel il nous fait oublier l’humoriste. Sous ses airs bonasses, on sent perler la mentalité d’une petite crapule étriquée aux entournures. C’est un vrai boulet, le champion du coup tordu. Un médiocre quoi. Il n’y a que des louanges à émettre sur sa prestation.
Idem pour Julie Gayet, tiraillée entre son amour pour Etienne et son affection pour ses parents qui le traitent avec la condescendance de ceux qui ne sont pas du même milieu ; et de plus en plus soupçonneuse devant les comportements douteux et les mensonges évidents de son mari. La femme prévenante et aimante du début, se tend de plus en plus comme un arc. Elle est toujours juste.
Et puis il y a Fleur (Léa Seydoux), la trouvaille du film. Elle y apporte sa candeur, sa fraîcheur, sa légèreté. Elle campe une brave fille un peu dépassée par les événements et qui ne sait pas trop comment gérer les largesses d’Etienne.
Les parents de Clémence (Julie Gayet) apportent eux aussi une pierre de qualité à l’édifice. Dominique Labourier est excellente en belle-mère cynique, joyeusement acerbe et sarcastique. Et Jean-Marie Wilkening donne à Maurice une vraie épaisseur. Il est tout aussi bon en grand patron responsable et inquiet pour sa succession, qu’en père protecteur.
Enfin, il y a le flic (Stéphane de Groodt), énigmatique à souhait, mais mal servi par un rôle décousu et manquant d’authenticité. Il eût mérité mieux.
En conclusion, il n’est pas impossible que ce film rencontre son public. Le début est vraiment bien et la fin encore plus et il vaut aussi pour la performance des acteurs auxquels on ne peut absolument rien reprocher. Finalement, il n’y a que les pinailleurs dans mon genre, amateurs d’histoires bien tordues mais crédibles qui y trouveront à redire…

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