Comédie des Champs
Elysées
15, avenue Montaigne
75008 Paris
Tel : 01 53 23 99 19
Métro : Alma-Marceau /
Franklin-Roosevelt
Ecrit et interprété par Gaspard
Proust
Présentation : Il a conquis le public avec son spectacle Gaspard Proust tapine.
Après une absence de deux ans de la
scène parisienne, il revient avec un nouveau spectacle à la Comédie des
Champs-Elysées.
Mon avis : Vraiment un gars à part ce Gaspard ! Il ne
respecte rien ni personne. Ni Dieu, ni maître, sans foi ni loi, il ne connaît
ni pitié ni compassion, il n’exprime aucun affect. Tout le monde y passe et y
trépasse… Bref, Gaspard Proust est de retour ; il est pire qu’avant et,
êtres humains tordus et vicieux que nous sommes, nous prenons un réel plaisir à
l’entendre débiter ses horreurs.
Gaspard Proust ne tapine plus. Il
n’a plus besoin de se « proustituer » pour se faire connaître. Il a
désormais sa clientèle, ses habitués, son public de sado-masos qui aime se
faire violenter les trompes d’Eustache.
J’ai trouvé ce « Nouveau spectacle », même s’il ne s’est
pas foulé pour le titre, encore plus fort, plus dévastateur que le précédent. C’est
dire… Son entame de spectacle, c’est du jamais vu. Dans le sens propre, puisqu’on
on ne le voit pas car la scène reste plongée dans le noir. Du coup, de
spectateurs nous devenons de simples auditeurs devant leur poste de radio en
train d’écouter un long monologue. Privée d’image, notre attention, toute entière
absorbée par le son, en est d’autant plus décuplée. Ce prologue est prodigieux.
Une vacherie toutes les dix secondes ! Jamais je n’ai entendu un concentré
de vannes aussi dense, aussi percutant, aussi gonflé. Il va loin le bougre,
très loin ; se réjouissant (ou plutôt jouissant) de percevoir quelques
cris offusqués, quelques réactions choquées, divers grincements de dents ou éructations de surprise et brefs
rires de ravissements…
A l’issue de cette entrée en matière étourdissante, il daigne apparaître enfin. Fidèle à sa façon d’être, il se demande ce qu’il est venu faire là. Ça l’ennuie visiblement de devoir jouer à l’histrion de service. Chevalier à la triste figure mais au regard sarcastico-goguenard, il affecte un détachement désabusé, voire hautain. C’est son image de marque. D’un ton détaché, presque uniforme, il continue à disséquer notre monde, notre société, notre Histoire, avec des commentaires d’une malveillance inégalable. Gaspard Proust est un vachard d’assaut, un bulldozer qui écrase tout sur son passage.
Il ne nous prend pas en traitre
puisqu’il en fait lui-même imperceptiblement l’aveu : « Moi, je suis
pas très sociable »… S’il le reconnaît, on ne peut guère critiquer sa
misanthropie et/ou sa misogynie. Notre Slovène d’origine a quelque chose en lui
d’Attila. Aucun brin d’herbe n’a grâce à ses yeux. Non seulement, il appelle un
chat un chat, mais il lorsqu’il l’attrape c’est l’écorcher vif !
Son texte, brillant et ciselé, est
une triviale poursuite qui se distingue par la richesse de son vocabulaire.
Gaspard Proust est un artisan. On sent que chaque mot, chaque adjectif a été
travaillé avec soin (même s’il n’est pas souvent très poli). Je dois admettre
que dans ce registre de l’humour très noir, du brocard systématique et de l’iconoclastie
désintégratrice, il n’a pas d’égal. Desproges, à qui d’aucuns se sont empressés
de le comparer, laissait parfois paraître quelques soupçons d’humanité. Pas lui…
Il n’y a guère que pour le Nazisme qu’il nourrit une certaine complaisance.
Mais là, il faut savoir décrypter de dixième degré. En effet, des personnes de
son ascendance en ont été des victimes directes. Cette sympathie qu’il affecte
pour ce régime n’est qu’un procédé pour aller encore plus loin dans la
provocation. C’est tellement bien dit et interprété !
Sincèrement, je n’ai jamais vu un artiste aller aussi loin dans l’irrévérence. Bien pensants de tous poils s’abstenir. Gaspard Proust ne se revendique d’aucune chapelle, il n’appartient à aucune communauté. Il est tout simplement un humoriste de l’extrême, un ours mal léché qui fait du cynisme son miel. Il l’étale bien épais sur une tartine et on se régale.
Le seul regret que j’ai formulé
en quittant, enchanté, la Comédie des Champs-Elysées est d’être incapable de
tout retenir, de me souvenir de toutes ses saillies, ses réflexions, ses
images, ses aphorismes, son name dropping, tant ils jaillissaient à jets
continus. J’aimerais tant maintenant pouvoir disposer du texte de ce Nouveau spectacle pour en goûter benoîtement
toute la richesse, toute la finesse et toute la portée. C’est du grand
(Gasp)art !
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