Gaîté Montparnasse
26, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 16 18
Métro : Gaîté / Edgar Quinet
Du jeudi au samedi à 19 h / le dimanche à 17 h
Ecrit par Ali Bougheraba et
Cristos Mitropoulos
Mis en scène par Marc Pistolesi
Décors d’Annie Giral et Olivier
Hébert
Costumes de Virginie Bréget
Chorégraphies de Camille
Favre-Bulle
Lumières de David Darricarrère
Son de Matthieu Cacheur
Arrangements d’Olivier Selac
Avec Ali Bougheraba, Cristos Mitropoulos, Camille Favre-Bulle, Benjamin
Falletto, Olivier Selac
L’histoire : Le 13 octobre 1921, un an avant l’arrivée de
Benito Mussolini et les fascistes au pouvoir naît, à Monsummano Alto en
Toscane, Ivo Livi. Des quartiers mal famés de Marseille aux studios
hollywoodiens, des chantiers de la jeunesse aux théâtres de Broadway, ou bien
encore de Kroutchev à Kennedy, comment un fils d’immigrés communistes italiens
va devenir un artiste majeur et le témoin des grands moments de l’histoire du
XXème siècle ? Alors que tout s’y oppose, comment le petit Ivo Livi, porté
par le destin, deviendra-t-il le grand Yves Montand ?
Mon avis : J’avais découvert Ali Bougheraba il y a six ans
dans son « Seul en scène », Ali
au Pays des Merveilles, un petit bijou d’humour et de tendresse. Raison
pour laquelle, alors qu’a priori je ne me sentais pas particulièrement attiré
par un spectacle sur la vie d’Yves Montand que je connaissais plutôt bien, je
me suis quand même rendu au théâtre de la Gaîté. Bien m’en a pris. Ali et ses quatre
complices ont réalisé avec Ivo Livi
une création emballante en tous points et je suis sorti de la salle
complètement enthousiasmé.
J’ai assisté à un spectacle
total. Toutes les formes théâtrales y sont réunies. Nous sommes en pleine
commedia dell’arte. Chanson, danse, mime, pantomime, allégories, burlesque
frisant le cartoon, tableaux figuratifs, réalisme, poésie, accents colorés, bruitages
faits maison… et j’en passe. Ce spectacle est un ravissement. La mise en scène
est inventive, hyper dynamique. Par moments on ne sait plus où donner de la
tête tant il se passe de choses sur la scène et tant les comédiens sont impliqués
et créatifs. Tous les cinq revêtus de la fameuse tenue de scène d’Yves Montand,
pantalon et chemise noirs, ils endossent chacun, sans aucun temps mort, une
multitude de personnages. C’est dense, c’est riche, c’est très, très drôle et,
parfois, émouvant.
Très sincèrement, j’ai trouvé que
la performance des comédiens était intrinsèquement plus forte que l’histoire
elle-même. C’est leur jeu qui nous transporte, ainsi que leur façon d’incarner
tour à tour Montand et toutes les personnes, célèbres ou pas, qui ont jalonné
son existence : parents, frère et sœur, amis, managers, producteurs,
auteurs-compositeurs, musiciens, et les femmes de sa vie bien sûr, Edith Piaf,
Simone Signoret, Marilyn Monroe, Carole Amiel…
Le fonds historique tient une
place tout aussi prépondérante que le relationnel. Le récit est truffé
d’anecdotes illustrées à chaque fois par un tableau plus ou moins bref.
Difficile de dégager ce qui m’a plu le plus dans ce spectacle entre la
performance des acteurs, l’ingéniosité de la mise en scène et le formidable
parcours d’un modeste migrant devenu star internationale. Le défi de raconter
en près de deux heures la trajectoire d’Yves Montand est parfaitement relevé.
Les auteurs ne sont allés qu’à l’essentiel. Ils n’ont conservé que ce qui avait
été fondateur pour le petit Ivo Livi : le fascisme en Italie, la seconde
guerre mondiale et l’occupation, Marseille, le communisme, la guerre froide et,
évidemment, toutes ces rencontres qui ont permis à ce gamin issu du prolétariat
de gravir une à une les marches de la célébrité et de la gloire.
Impossible de dissocier les
quatre comédiens et leur accompagnateur accordéoniste. Quatre physiques et
quatre talents différents mais tellement complémentaires. Habitués qu’ils sont
à travailler ensemble, leur complicité, évidente, passe aisément la rampe. Ils
sont naturellement joyeux et généreux. Quand l’un(e) d’entre eux est mis en
avant en fonction du personnage qu’ils interprètent, les trois autres se
mettent à son service, le soutiennent, amplifiant ainsi la compréhension de la
situation. Leur éventail de jeu est si large qu’un simple accessoire leur permet
de matérialiser un personnage, un lieu, une époque. Un banc et une table,
déplacés et utilisés à d’autres fonctions, suffisent à planter un décor.
Benjamin Falletto, Cristos
Mitropoulos et Ali Bougheraba, qui incarnent successivement Yves Montand en
fonction de son âge, ont su éviter l’écueil de l’imitation vocale. Ils s’appliquent
juste à restituer parfois quelques éléments de sa gestuelle si particulière…
Quant à Camille Favre-Bulle, qui campe tous les personnages féminins (excusez
du peu), elle est tout simplement époustouflante de présence, de joie de vivre
et de sensibilité.
Bref, au risque de me répéter, Ivo Livi, ou le destin d’Yves Montand, est
un spectacle vraiment complet, particulièrement créatif et jubilatoire. Il dame
le pion à moult comédies musicales a priori plus huppées, plus ambitieuses. Non
seulement en raison de la prestation de ses interprètes, mais aussi pour les
valeurs humaines qu’elle dégage.
Lorsque ce qu’il y a de meilleur
dans le théâtre et le music-hall est ainsi réuni en une seule œuvre, on touche
à l’absolu. Ce spectacle m’a permis de vivre à la Gaîté Montparnasse un réel
grand moment de grâce. Un moment rare qui fait chaud au cœur, qui exalte l’âme
et vous emplit de bonheur.
Gilbert « Critikator »
Jouin
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