Petit Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 74
Métro : Gaîté / Edgar Quinet
Une pièce d’Emmanuel Robert-Espalieu
Mise en scène par Gérard Gelas
Décor de Jean-Michel Adam
Costumes de Christine Gras
Avec Myriam Boyer (Fréhel), Clément Rouault (Maurice
Chevalier), Laure Vallès (Paulette)
L’intention :
Fréhel était une femme puissante, entière, sans compromis, pour qui la vie
était une aventure qu’il fallait vivre à fond, coûte que coûte, quitte à se
brûler les ailes…
Dans les cabarets du Paris de ce début du siècle, Maurice et
Fréhel se laissent emporter paar le tourbillon du succès soudain, avec les
nuits alcoolisées et les excès qui vont avec… Une vie mordue à pleines dents
qui convient à Fréhel, mais qui finit par effrayer Maurice et le fait fuir avec
une autre. Elle ne se remettra jamais de la blessure de son départ.
Aujourd’hui, la grande Fréhel n’est plus depuis longtemps,
elle survit dans un petit meublé lugubre. Elle sait que son heure est proche.
Mais elle pense toujours à lui, qui vient hanter ses dernières nuits, pour une
ultime réconciliation.
Mon avis :
Décidément, avec La Dame au Phacochère
qui relatait cinq ans de la vie de Misia Sert et Riviera qui raconte la fin de vie de Fréhel, les hasards de la
programmation théâtrale mettent les projecteurs sur la première moitié du 20è
siècle. D’ailleurs, il est tout à fait vraisemblable que la pianiste et la
chanteuse se soient rencontrées. Misia est décédée en 1950, quelques mois avant
Fréhel qui était pourtant d’une vingtaine d’années sa cadette. Mais elles n’ont
pas eu la même vie. Ni, bien sûr, la même fin…
Riviera se situe
justement à la toute fin de vie de Fréhel. Les jeunes générations ne doivent
même pas savoir qui elle était. Pourtant, cette chanteuse réaliste a connu le
succès et la gloire pendant une grosse dizaine d’années, entre 1908 et 1920.
Après, en dépit d’une parenthèse réussie au cinéma, détruite par la drogue et l’alcool,
elle connaîtra pendant trente ans une lente descente aux enfers…
La première image d’elle que nous donne la pièce est celle d’une
femme qui est dans la survie. Son quotidien, c’est la misère et la solitude.
Elle n’a pour ultime compagnon et confident que Polo, son… poisson rouge !
Et pour dernier refuge, l’alcool. L’alcool qui l’aide à s’inventer une autre
fin de vie et de se remémorer les grandes heures de son existence. Dans un
moment de lucidité, elle avoue d’ailleurs : « Pour les gens comme
nous, ne plus rêver, c’est mourir ». Alors, elle s’y accroche désespérément
à ses rêves. Ou plutôt à on unique rêve, aussi obsessionnel qu’illusoire, dans
lequel l’amour de sa vie, Maurice Chevalier, vient la chercher pour l’emmener au
soleil de la Riviera.
C’est donc une femme diminuée, érodée par la coke et l’alcool
et en grande souffrance psychique que campe Myriam Boyer… Impossible d’imaginer
quelqu’un d’autre qu’elle pour incarner Fréhel. Coupe à la garçonne, silhouette
empâtée, attifée d’une vilaine robe bleuasse qui tient plus du tablier et
chaussée de charentaises élimées, elle donne une image pathétique. Mais il faut
voir comme son visage s’illumine soudain lorsqu’elle ranime le fantôme de
Maurice. C’est celui d’une femme toujours amoureuse.
La prestation de Myriam Boyer est, comme toujours,
magistrale. C’est une comédienne hors pair, rare pour ne pas dire unique. Ici,
elle EST véritablement Fréhel. Et qu’est-ce qu’elle chante bien ! Sans
faire de l’ombre à ses deux partenaires qui jouent parfaitement leur délicate partition,
Riviera tient quasiment un one woman
show. A la fin de la pièce, elle recueille une formidable ovation totalement
justifiée.
Et pourtant… Malgré cette grande performance d’actrice je ne
suis pas sûr que Riviera ait la cote.
Surtout auprès du grand public. Une pièce qui repose sur la vie de Fréhel ne
peut attirer que des spectateurs d’un certain âge. D’ailleurs, dans la salle,
hier soir, la moyenne d’âge était assez élevée. Les calvities,les cheveux
poivre et sel et les teintures blondes étaient en grande majorité. Bien sûr, je pense qu’une partie du
public vient et viendra aussi pour assister à un superbe numéro, à une
interprétation habitée. Mais sera-ce suffisant ?
Personnellement, tout en étant fasciné par l'impeccable prestation de Myriam
Boyer, je n’ai ressenti que peu d’intérêt pour cette histoire. Mes sensations, inégales,
étaient dominées par un léger ennui que j’ai donc compensé, vous l’aurez
compris, en me focalisant sur les subtilités du jeu de l’artiste. C’est d’ailleurs
ce que j’ai applaudi de très bon cœur à la fin car il faut savoir reconnaître
un travail quand il est aussi admirablement accompli.
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