lundi 9 décembre 2013

Franck Dubosc "A l'état sauvage"

Casino de Paris
16, rue de Clichy
75009 Paris
Tel : 08 926 98 926
Métro : Trinité d’Estienne d’Orves

One man show écrit par Franck Dubosc

Présentation : Tel un lion trop vieux, Franck Dubosc casse les barreaux de sa prison dorée pour fuir au bout du monde, loin des emmerdes… Jusqu’à ce que, redevenu sauvage, tout lui manque… Il est trop tard pour revenir, mais assez tôt pour en tirer des conclusions sur un monde pas si mauvais…

Mon avis : De spectacle en spectacle, Franck Dubosc est en train de se construire une œuvre tout à fait cohérente. Lorsqu’on le suit depuis ses débuts, on a l’impression de grandir avec lui et, comme il se livre de plus en plus, de le connaître de mieux en mieux.
Franck Dubosc, c’est un personnage et un univers. Les deux évoluent en même temps que lui dévoilant peu à peu une forme de mûrissement. Mais, heureusement pour toi public, Franck Dubosc reste Franck Dubosc. Il est toujours aussi hâbleur, il cabotine toujours autant, il se complaît toujours autant dans l’exagération. Et – mais ça c’est dans son ADN – il a gardé deux de ses plus importants traits de caractère, un qui nous amuse profondément, son côté mytho, et l’autre qui nous attendrit, son côté enfant. Ces deux entités, qui cohabitent paisiblement en lui, apparaissent régulièrement au gré du spectacle, l’un comme l’autre faisant notre ravissement.


A l’état sauvage, le nouveau one-man show de Franck Dubosc s’inscrit donc dans la lignée des précédents tout en s’en démarquant notablement. Le format qu’il a choisi cette fois, qui s’apparente plus au stand-up, lui apporte beaucoup plus de liberté que les deux premiers seuls en scène, J’ vous ai pas raconté ? et Romantique, qui étaient construits sur des sketchs, et même que le troisième, Il était une fois… Franck Dubosc, qui était essentiellement autobiographique.

Après nous avoir gratifié d’une entrée digne d’une rock star (l’excès fait partie de ses péchés mignons), il nous interpelle tout de suite pour nous faire part de sa déception du monde qui l’entoure. Franck a un coup de mou, tout « l’emmerde ». Et ce ne sont pas les exemples qui lui manquent. Alors autant utiliser ce vague à l’âme pour embarquer destination l’île déserte ( ?) de Tonkiki… Un bon coup de solitude, loin des turpitudes et des agressions du monde moderne, ne pourra lui faire que du bien.

On a l’impression d’être dans une bande dessinée. Franck est un conteur hors pair. Son écriture est très imagée, son sens de la formule est toujours aussi aiguisé, ses comparaisons toujours aussi audacieuses, et ses digressions toujours aussi savoureuses. Le fait de ne pas être prisonnier du carcan d’un sketch lui permet de musarder, de divaguer, de passer du coq à l’âne. Il peut faire quelques allusions sur l’actualité, parler de politique, intégrer des personnages, nous adresser ça et là un clin d’œil par rapport à ses précédents spectacles (Sandy). Libre de tout, il nous emmène où il veut.


A l’état sauvage se décompose en trois parties : avant l’île, pendant l’île et un dernier chapitre plus personnel, plus intime, dans lequel il évoque sa famille. La fin est très jolie. Son couplet sur le bonheur est de la poésie pure. On y retrouve Franck-le-tendre, mais qui, par pudeur, s’autorise pas mal d’autodérision et quelques réflexions impayables. Ses nombreuses expériences de comédien font qu’il se trouve aujourd’hui au sommet de son art. Sa gestuelle, parfaitement maîtrisée, n’appartient qu’à lui. L’œil qui frise en permanence, le sourire malicieux, toujours prompt à provoquer les spectateurs du premier rang, la gentillesse est chez lui plus naturelle que la moquerie. Sauf lorsqu’il se complaît à se ridiculiser.

Franck Dubosc me plaît et m’amuse énormément. J'aime l'homme autant que l'artiste. Le vernis de mytho-hâbleur dont il se pare est un trompe-l’œil qui n’abuse personne. Ou alors il faut manquer sacrément de lucidité et de sensibilité. Et comme, ces derniers temps, il a tendance à vouloir s’en badigeonner de moins en moins, on voit de plus en plus souvent le cœur apparaître…

Gilbert « Critikator » Jouin


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