Théâtre Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 74
Métro : Gaîté / Edgar Quinet
Une pièce de Stéphane Guérin
Mise en scène pr Jean-Paul Muel
Décor d’Edouard Laug
Lumières de Laurent Béal
Son d’André Serré
Costumes de Brigitte Faur-Perdigou
Vidéos de Mathias Delfau
Avec
Geneviève Fontanel (Madame Khader), Judith Magre (Madame Xénia), Claire Nadeau
(Madame Yvonne), Edith Scob (Madame Zakko)
L’histoire :
Tiens, voilà quatre femmes que l’on va suivre pendant toute une année, chez les
unes, chez les autres, au bal des Pompiers, dans la rue, dans un square. Elles
ont un âge certain, elles se rendent visite, elles râlent, elles attendent,
elles reproches, elles chavirent, elles tombent, elles soupirent, elles
rigolent, elles se plaignent, elles s’en veulent, elles se détestent, elles
s’aiment, elles s’envoient des mots à la figure comme des boxeurs, s’’envoient
des uppercuts… Elles sont vivantes !
Quatre femmes d’origine et de culture différentes – aux
regards pas tendres, mais pas froids non plus – dessinant une humanité
singulière.
Mon avis : Quatre
« grandes filles », quatre vies, quatre caractères, quatre solitudes,
quatre saisons et quatre couleurs…
Madame Xénia (Judith Magre) est en rouge. Elle est juive,
lucide et féroce… Madame Zakko (Edith Scob) est en rose. Elle est témoin de
Jéhovah, fragile et évaporée… Madame Yvonne (Claire Nadeau) est en mauve. Elle est
catholique, communiste, lesbienne et épicurienne… Madame Khader (Geneviève
Fontanel) est en vert. Elle est musulmane, kabyle, sensible, humaine et
fataliste…
Comme les Mousquetaires, elles sont quatre. Athos pourrait
être Edith Scob, Porthos Judith Magre, Aramis Geneviève Fontanel et D’Artagnan
Claire Nadeau… Mais la comparaison s’arrête là, hormis peut-être une aptitude à
se quereller à fleurets pas toujours mouchetés.
Nous suivons leurs rencontres fortuites ou provoquées tout
au long d’une année. Les mois défilent, illustrés par des projections (on voit
la nature qui change), agrémentés par les sons du dehors (chants d’oiseaux par
exemple), et ponctués par des dates symboliques (Saint-Valentin, Fête des Mères,
14 juillet…). C’est sans doute leurs différences qui les a fait ainsi se
rechercher et s’unir. Ce sont quatre femmes seules qui ont besoin de la
présence et du réconfort des autres. Mais ce n’est pas une raison pour ne pas s’envoyer
parfois ses quatre vérités (« quatre » là aussi). Comme ce sont de « grandes »
filles, elles ont beaucoup vécu. Elles ont donc beaucoup de souvenirs, d’expériences
et quelques regrets. Plus personne, ou presque, autour d’eux pour les écouter,
alors il y a les oreilles des copines pour recueillir les confidences, les
petites joies et les grandes peines. Ce n’est pas les religions qui les
rassemblent. Aucune n’a la même. Ce serait même plutôt un sujet de taquinerie.
Elles ne l’avoueraient jamais, mais leur solitude est une
liberté contrainte. Elles ne sont pas méchantes, mais il leur arrive
régulièrement de se montrer crues et cruelles. Quand on se sait au bout du
chemin, l’humour noir devient un refuge spontané. En fait, elles sont
banalement humaines. Elles se critiquent, s’envoient des vacheries et, en même
temps, se montrent pleines de sollicitude dès que l’une d’entre elles présente
des signes de faiblesse.
Une pièce comme celle-ci pourrait durer des heures car, tant
que leur cœur battra, ces quatre femmes auront quelque chose à dire. Elles ont
des conversations à l’emporte-pièce teintées d’idées reçues et d’a priori. Elles
ne se font plus de cadeaux parce qu’elles se sont déjà fait le plus beau d’entre
eux : leur amitié. Plus de fausse pudeur, plus de faux semblants, on se
présente telle qu’on est. A quoi servirait de tricher, personne ne serait dupe.
Les Grandes Filles
est une jolie comédie de la vie plus douce qu’amère. Si elles nous font parfois
nous offusquer sous la verdeur de leurs propos, elles provoquent surtout en
nous un sourire ou un rire pleins de tendresse. C’est qu’elles sont terriblement
attachantes et touchantes ces vieilles dames qui ne sont même pas indignes.
Les quatre comédiennes sont parfaites tant dans leurs
différences de physiques, de jeu, d(attitudes, de voix. Quel bonheur pour nous
que de les avoir réunies. Que de sensibilité, que de malice, voire de rouerie,
que de finesse, que de métier ! On en reprendrait bien une année de plus
en leur charmante compagnie…
Gilbert « Critikator » Jouin
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire