Editions Stock
20 €
Tout est résumé page 275 de son ouvrage :
« J’ai énormément
travaillé. Sans mérite, j’aime ça. Sans doute trop, probablement dans la
précipitation. J’ai accumulé les expériences, dans des domaines très
différents, la télévision, la radio, l’écriture, la gestion de restaurants, les
miens et ceux qui ne m’appartenaient pas. J’ai payé une partie de mes dettes.
Jusqu’à présent la chance, l’amitié sincère de quelques fidèles, m’ont
accompagné, soutenu, aidé – et cela compense, un peu, le fiasco de ma vie
privée ».
Cela fait une quinzaine d’années que je connais Jean-Pierre
Coffe. Je l’ai interviewé à plusieurs reprises. C’est un homme que j’ai tout de
suite apprécié et aimé. Allant parfois très
loin dans la confidence, j’avais rapidement décelé en lui
quelques fêlures, une certaine fragilité qu’il n’acceptait de révéler que dans
le face-à-face et dans un climat de confiance.
Je n’ai donc pas été du tout surpris par la teneur de son
autobiographie. Même si j’ai appris beaucoup de choses qui n’appartiennent qu’à
son extrême intimité.
Jean-Pierre Coffe s’est construit sur des manques. Et c’est
là une véritable prouesse. Son enfance a été difficile. Il lui a surtout manqué
les deux piliers sur lesquels tout gamin peu se construire : la présence d’un
père (le sien a été tué à la guerre quand il avait 2 ans) et une absence quasi
totale d’affection d’une mère plus préoccupée par ses amours compliquées. Les
deux seules personnes chez lesquelles il a pu glaner de la tendresse ont été
son grand-père Victor (très important parce qu’il lui a inculqué sa passion de
la nature) et sa mémé Briquet… Sinon, côté sentiments, ce ne fut qu’aridité.
Jean-Pierre Coffe a donc dû ne compter pratiquement que sur
lui-même. Il s’est fait tout seul. C’est ce qui explique l’homme qu’il est
devenu.
Jean-Pierre Coffe est indépendant et vulnérable ;
modeste et orgueilleux ; provocateur et mélancolique… Complètement sincère
et épris de vérité, il possède un caractère entier, une grande franchise et une
absence totale de langue de bois. Il a été tout le temps tendu vers l’objectif
quasi obsessionnel de se prouver des choses à lui-même autant qu’aux autres.
Cette boulimie de travail, ses excès n’ont été qu’une longue fuite en avant, un
refuge, une compensation à ce foutu manque d’amour chronique.
Son livre est à son image. C’est le récit d’une riche et
dense trajectoire humaine dont il ne peut et ne veut réellement pas
s’enorgueillir parce qu’il y a toujours en lui un arrière-goût amer d’inachevé.
Et pourtant, quel parcours hors norme vous avez accompli Monsieur Coffe !
Si l’on excepte quelques longueurs provoquées par son soin
méticuleux du détail, de la précision et une certaine propension au lyrisme et
à l’enthousiasme (surtout quand il parle de gastronomie), Une vie de Coffe se lit avec beaucoup de plaisir et d’émotion. Il y
a tout dans cet ouvrage. Il nous en apprend beaucoup sur l’âme humaine. Il nous
fait aussi pénétrer dans les cuisines pas toujours ragoûtantes du monde de l’audiovisuel
et des médias. Jean-Pierre Coffe, sans complaisance aucune, nous y livre ses
quelques inimitiés et déceptions, mais surtout les amis et amies qui l’ont
accompagné, aidé et aimé tout au long de son parcours effervescent, empli d’ombres
et de lumières, et ponctué de formidables succès et d’échecs retentissants.
Il y avait au cœur de ce petit Lorrain négligé et
transbahuté, nanti d’un simple certificat d’études, un terreau incroyablement
fertile dans lequel il a su faire germer son inextinguible soif de
connaissances. Jamais dupe de rien, il a taillé sa route, y compris en
empruntant moult chemins de traverse où sa curiosité ou son insouciance le
guidaient. Bien qu’il n’en fasse rien, il peut vraiment se montrer fier de lui.
Il est, de toute façon, le mieux placé pour apporter sa
conclusion. Elle se trouve page 294 :
« A y réfléchir
plus avant, je dois bien en convenir. J’ai aussi besoin qu’on m’aime, qu’on m’apprécie,
j’ai jusque-là été frustré de reconnaissance. Ni mon épouse ni ma mère ne m’ont
donné ce sirop dont inconsciemment j’ai besoin pour avancer. »
Pourtant, je suis bien tranquille : je suis convaincu
que Jean-Pierre Coffe compte beaucoup plus d’admirateurs que de détracteurs. En
même temps, il y tient à ces détracteurs. Ils lui ont involontairement apporté
un surcroît de notoriété…
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