Petit Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 74
Métro : Gaîté / Edgar Quinet
Une pièce de Jean-Noël Jeanneney
Mise en scène par Jean-Claude Idée
Décor et lumières de Jean-Claude Idée
Costumes de Sonia Bosc
Son et vidéo d’Olivier Louis Camille
Avec Christophe Barbier (Georges Mandel),
Emmanuel Dechartre (Léon Blum), Simon Willame (Hans)
Présentation : Juin 1944. Une
prison en Allemagne. Derrière les barreaux, deux hommes côte-à-côte et
face-à-face : Léon Blum, fidèle de Jaurès et chef du Font Populaire, et
Georges Mandel, collaborateur de Clémenceau. La mort immédiate s’annonce pour l’un
d’entre eux… L’intensité de leur dialogue se nourrit de cette angoisse, de leurs
mémoires contrastées, de leurs tempéraments opposés, de leurs pudeurs
bousculées, de leurs connivences révélées. Ils nous parlement de la République,
au cœur de ses contradictions et au plus haut de sa dignité.
Lequel survivra ?
Mon avis : Quelle
page d’Histoire ! Troublante, intense, émouvante…
La pièce s’ouvre avec des projections du
Débarquement commentées en allemand. Nous savons donc tout de suite que nous
nous trouvons en juin 1944 ; et en Allemagne.
Dans le salon d’un appartement-prison, deux
hommes très élégants devisent. Par les fenêtres, on voit passer des avions, des
véhicules militaires. Comme eux, on perçoit les sons du dehors, les bruits de
moteurs, des cris, des coups de feu… Le décor est planté. Nous sommes à
quelques encablures du camp de concentration de Buchenwald.
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Photo : J. Stey |
Très vite, au fil de leur conversation, on
apprend qui est qui. Le plus âgé est Léon Blum, ancien président du Conseil et
son interlocuteur est Georges Mandel, ancien ministre de l’intérieur. Pétain
les a livrés à Hitler pour qu’ils servent éventuellement de monnaie d’échange… Blum,
homme de gauche, admirateur de Jaurès, et Mandel, homme de droite, admirateur
de Clémenceau, sont tous deux porteurs des grandes valeurs républicaines. Cela
fait pratiquement un an qu’ils cohabitent. Alors qu’ils ont des sensibilités
politiques opposées, ils ont appris à se connaître et à se respecter. Intelligents
et érudits, ces deux témoins totalement impliqués, échangent sur plus d’un
demi-siècle d’une vie politique française dont ils connaissent toutes les
arcanes.
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Photo : J. Stey |
Si leurs idéologies respectives sont opposées,
leurs tempéraments le sont également. Au départ, ils ont néanmoins en commun leur
aversion pour le fascisme, le fait d’être détestés par Pétain, leur ralliement
à De Gaulle et… leur judaïté. Ce qui n’est pas mal… Ces deux hommes, engagés, ont
deux manières très différentes de voir et de pratiquer la politique. Autant
Léon Blum, qui dégage une réelle bonhomie et une profonde humanité, se montre
bienveillant, diplomate, autant Georges Mandel, se révèle intransigeant,
réaliste, pessimiste. C’est un jusqu’au-boutiste qui ne tolère aucune
compromission.
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Photo : J. Stey |
En raison de cette discordance, leurs échanges
sont aussi riches que passionnants. Et parfois drôles aussi car Mandel adore titiller
son grand aîné. Le texte de Jean-Noël Jeanneney est brillant. Très documenté,
il fourmille de faits précis, d’anecdotes. Parfaitement incarnés par deux
comédiens férus de politique, Blum et Mandel nous font revivre un pan déterminant
de l’histoire de notre pays. On s’attache d’autant plus à eux qu’ils sont en
train de vivre sous nos yeux un moment capital de leur propre existence. S’ils
savent en effet que l’un d’entre eux va être sacrifié sur l’autel des
représailles, ils ne perdent jamais une once de leur dignité… Unis par un
destin qui les dépasse, Emmanuel « Blum » Dechartre et Christophe « Mandel »
Barbier nous donnent une belle leçon de confiance en l’Homme. Leur jeu est tellement
juste, simple et précis qu’on en oublie qu’ils jouent la comédie. Un beau
moment de théâtre !
Gilbert « Critikator »
Jouin
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