Théâtre de l’Atelier
1, place Charles Dullin
75018 Paris
Tel : 01 46 06 49 24
Métro : Anvers / Pigalle / Abbesses
Une pièce de Tennessee Williams
Mise en scène par Benoît Lavigne
Texte français de Daniel Loayza
Décor de Laurence Bruley
Costumes de Tim Northam
Lumières de Stéphanie Daniel
Musique composée par La Manufacture Sonore
Avec Cristiana Reali (Serafina), Rasha Bukvic (Alvaro),
Léopoldine Serre (Rosa), Monique Chaumette (Assunta), Grétel Delattre (Estelle
Hohengarten/Miss Yorke), Estelle Doré (Violetta), Bérangère Gallot (Peppina),
Jean-Yves Gautier (le Père de Leo), Martin Loizillon (Jack), Sandrine Molaro
(Bessie), Sophie Nicollas (Giuseppina), Nicolas Pujolle (le Docteur/le
Vendeur), Herrade von Meier (Flora)
L’histoire :
La Rose Tatouée est un hommage à tous
les cœurs qui battent malgré leurs cicatrices. C’est une histoire des amours et
des désirs, une pièce à fleur de peau, imprévisible, sensuelle et comique.
L’histoire d’une passion renaissant de ses cendres, un
improbable coup de foudre entre deux solitudes dans la moiteur torride de La
Nouvelle-Orléans : Serafina, veuve sicilienne volcanique, et Alvaro,
camionneur aussi viril que clownesque.
La Rose Tatouée danse sur un fil menant des larmes au rire.
Une œuvre joyeuse et poétique, débordant de couleur et de généreuse fantaisie.
Mon avis :
La toute première sensation que l’on perçoit à l’ouverture du rideau, c’est une
très agréable odeur de bois. En effet, la demeure de Serafina est une sorte de
chalet et il exhale les planches fraîchement découpées… la maison est située
dans le quartier sicilien de La Nouvelle-Orléans. Et ça parle italien à tout
bout de champ.
La toute première phrase qui est prononcée, c’est « Il
y a de la sauvagerie dans l’air ». Cette impression prémonitoire émane d’Assunta,
que tout le monde appelle affectueusement « la Vieille ». On se doute
donc que l’histoire qui va se dérouler sous nos yeux va être d’une grande
intensité dramatique. Or, jamais je n’ai ressenti la moindre « sauvagerie »
à quel moment que ce soit dans la pièce. En revanche, ce qui s’en dégage de
façon omniprésente, ce sont l’amour, la passion, la sensualité.
La Rose Tatouée m’a
laissé un sentiment mitigé difficile à expliquer. Comment dire ? On se
sent comme sur une route de demi-montagne avec ses portions de faux-plats entre
deux crêtes. En clair, c’est inégal. Aux petits moments d’ennuis succèdent de
formidables passages de pure comédie… Déjà, les premières vingt minutes, dites
d’exposition, sont un peu longuettes. Heureusement, déjà, on repère la présence
pétillante de Rosa, la fille de Serafina. On la devine dotée d’un sacré
tempérament. Alors, comme le reste est en demi-teinte, on focalise son
attention sur elle. Pleine de fougue et de vitalité, Rosa est la digne fille de
sa mère. Un même sang sicilien coule dans leurs veines. Elles portent en elles
toute l’exubérance latine avec ses excès démonstratifs dans la joie comme dans
la douleur.
Au début la pièce, tout va bien. Serafina est heureuse, elle
file le parfait amour depuis plus de dix ans avec son camionneur de mari. Elle
en attend même un deuxième enfant. Elle est joyeuse, maternelle, travailleuse
et rêve à une vie encore meilleure. Grâce aux ressources résultant du petit
trafic auquel se livre son bonhomme, l’avenir lui sourit… Hélas, cette félicité
va être brutalement interrompue par l’assassinat de son époux…
On retrouve Serafina trois ans plus tard. Elle est éteinte.
Elle n’est plus que l’ombre de la flamboyante jeune femme. C’est un véritable
zombie, elle est renfrognée, atone et, surtout, particulièrement acariâtre avec
Rosa. Et, vu le caractère de la jouvencelle, il y a de l’orage dans l’air…
Et soudain, la pièce prend une toute autre dimension. On
entre de plain-pied dans la commedia dell’arte avec l’entrée en scène d’Alvaro.
On change totalement de registre. La petite chronique un peu monotone fait
place à une désopilante arlequinade. Quel numéro il nous fait le Rasha Bukvic !
Avec son visage élastique et particulièrement expressif, très à l’aise avec son
corps, c’est un mélange de Roberto Benigni et de Pierre Richard. Il est à la
fois emprunté, quasi simplet, et enthousiaste, envahissant, pressant. Il est
uniquement dans le premier degré. Normal après tout puisqu’il se revendique « petit-fils
de l’idiot du village »… La scène de la rencontre entre Serafina est lui
est un bonheur de drôlerie et d’originalité. Enfin, Cristiana donne sa pleine
mesure. On retrouve sa formidable générosité, son grain de folie, son jusqu’auboutisme.
En même temps, elle démontre toute l’étendue de sa palette de jeu.
Jusqu’à la fin, on va s’amuser devant leur jeu de séduction
maladroit. On frise le vaudeville, et on y prend énormément de plaisir.
En résumé, La Rose
Tatouée est un patchwork, une mosaïque de scènes juxtaposées d’un effet
dissymétrique. Heureusement, comme on reste sur notre fin, on sort du théâtre
de l’Atelier avec la banane, et c’est le plus important.
Niveau comédiens, outre la performance époustouflante et
enchanteresse de Rasha Bukvic, la confirmation du talent frais et explosif de
Léopoldine Serre (déjà remarquée et remarquable dans Sunderland), l’éventail de jeu impressionnant de Cristiana Reali, j’ai
beaucoup aimé la prestation pleine de finesse de Martin Loizillon, dans le rôle
de Jack, le soupirant de Rosa.
Enfin, la bande-son tient une place importante car elle
reflète la vie extérieure avec ses bruits de moteurs de camions, ses trains qui
passent, la musique qui rythme La Nouvelle-Orléans…
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