La Gaîté Montparnasse
26, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 16 18
Métro : Gaîté / Edgar Quinet
Une comédie de Stéphane Belaïsch et Thomas Perrier
Mise en scène par Arthur Jugnot et David Roussel
Scénographie de Sarah Bazennerye
Avec Cyril Garnier (Max), Guillaume Sentou (Léo), Magaly
Godenaire (Laura), Marie Montoya (Salomé)
L’histoire :
Max va piéger Laura ; il voudra piéger Salomé mais sera piégé par Léo qui
voulait piéger Laura…
Léo est en plein chagrin d’amour. Il vivait avec Laura, elle
l’a quitté il y a quelques mois. Elle lui reprochait ce que toutes les femmes
reprochent aux hommes en général : égoïsme, immaturité, lâcheté, etc… Léo
en discute avec Max dans le bar tenu par Salomé, la cousine de Laura. Un plan
diabolique va alors se mettre en place. Télécommandé par Léo, Max va séduire
Laura puis se saborder volontairement afin de la dégoûter des hommes et de
leurs faiblesses…
Mon avis :
Et bien, ce spectacle n’est pas moyen, il est grand ! Une fois encore le
Théâtre de la Gaîté porte bien son nom avec cette comédie trépidante et
follement drôle. Drôle, mais avec une vraie histoire remarquablement ficelée. En
effet, les « ficelles » (ou rebondissements) se croisent et s’entrecroisent
à l’infini pour finir par nous fournir un invraisemblable canevas. L’écriture, le
ton et le traitement de cette pièce sont hyper modernes. A une époque où tout
va très vite et où règne la zapette, il ne faut pas laisser au spectateur le
temps de se poser. Il se passe trop d’événements, de bouleversements, de gags,
d’effets visuels… On se demande en permanence comment ces quatre là vont se
sortir de leur imbroglio sentimental.
Car Les grand moyens
est avant tout une comédie sentimentalo-romantique. Le fil rouge en est l’amour
et, en corollaire, les sempiternelles relations hommes-femmes. Même si la pièce
se veut générationnelle puisqu’elle implique des trentenaires, les histoires de
couples concernent tout le monde.
Cette pièce, c’est du Marivaux. On aurait pu ainsi emprunter
différents titres à son œuvre sans en dénaturer le sens. Les exemples abondent :
L’Amour et la Vérité, La Surprise de l’amour,
La Double inconstance, Le Dénouement imprévu, La Seconde surprise de l’amour, L’Heureux
stratagème, L’Epreuve… C’est confondant de voir comme chacun de ces titres pourrait
parfaitement convenir. Mais, comme ici Marivaux est complètement revisité par
les Monty Python, on ne saurait faire référence au Jeu de l’amour et du hasard. S’il y a en effet du jeu et de l’amour,
il n’y a en revanche aucune intervention du hasard car dans la pièce de
Belaïsch et Perrier, le destin est sans cesse téléguidé. Sans le stratagème
machiavélique fomenté par Léo, il n’y aurait pas d’histoire…
Elle est toute simple l’idée de Léo : faire séduire son
ex, Laura, par un bellâtre qui va se révéler être un gougnafier pour que, par
effet comparatif, elle réalise ce qu’elle a perdu en le congédiant. De loin, ça
paraît imparable, mais l’âme humaine – et en priorité la mentalité masculine –
est imprévisible. Le boomerang ainsi lancé un peu inconsidérément, peut vous
revenir encore plus vite en plein cœur… Et puis il y a les impondérables.
Comment Léo aurait-il pu s’imaginer que Salomé, la cousine de Laura, allait s’enticher
grave de lui ? Lui, indécrottable romantique, comment pourrait-il se
glisser dans l’esprit de Max, dragueur invétéré, queutard quasi professionnel,
pour l’amener à agir selon ses principes ? Devenant ingérable, la combine échappe
dès lors à tout contrôle…
Non seulement Les
grand moyens est un véritable petit bijou d’écriture, mais cette comédie
est servie par une mise en scène au rythme échevelé, truffée de trouvailles
ingénieuses. Devant tant d’inventivité, Jugnot n’est pas le Roi Arthur, mais
Merlin l’Enchanteur ! Or, pour qu’une machine aussi méticuleusement huilée
puisse tourner à plein régime, il faut qu’elle soit actionnée par des comédiens
qui puissent non seulement s’associer à ce délire totalement maîtrisé mais
aussi lui apporter leur propre folie. Et actuellement, il n’existe aucun binôme
aussi explosif et performant que celui formé par Cyril Garnier et Guillaume
Sentou. Arthur Jugnot, qui les avait eus pour partenaires dans la pièce
elle-même louftingue, A deux lits du
délit, savait exactement ce qu’il pouvait attendre de ces deux énergumènes.
Non contents d’assurer sur le strict plan de la comédie, ils y mettent leur
petit plus, à savoir quelques prouesses physiques complètement cartoonesques qu’ils
sont les seuls capables d’accomplir.
Dans cette pièce la rapidité des échanges et l’enchevêtrement
des situations sont tels qu’on ne sait vraiment plus où donner de la tête. Et
on rit, on rit, on rit… Sincèrement, chapeau aux auteurs. Il en faut de l’imagination
pour réussir à concocter une comédie aussi bien construite et qui nous tienne
en haleine du début à la fin sans aucune incohérence. La manière dont les
dialogues s’enchaînent est d’une rare originalité, surtout au théâtre, où tout
se déroule en direct. Et le rythme est donné par la succession nerveuse de
petites saynètes. C’est réellement magistral. Il y a vraiment de superbes
idées. Ne serait-ce que de jouer les deux versions d’une scène : celle qui
était prévue et celle qui s’est réellement passée. L’effet de surprise sur nous
est d’autant plus réjouissant.
Du début à la fin, on se sent en empathie avec les quatre
protagonistes des Grands moyens. Ils
nous ressemblent, ils sont comme nous, avec leurs doutes, leur quête de
bonheur. Le casting est parfait, épatant. Pour donner la réplique à ces deux
hurluberlus de Garnier et Sentou, il fallait deux jeunes femmes promptes à s’engouffrer
dans ce joyeux univers et aptes à y ajouter leur grain de folie. Magaly
Godenaire et Marie Montoya campent avec autant de malice que de sensibilité ces
deux jeunes femmes en mal d’amour en mal de mâles. Contrairement aux
bonshommes, elles restent lucides, même si, heureusement, elles ne sont pas
toujours raisonnables.
Je ne peux que vous recommander le plus chaudement cette
pièce joyeuse, pleine d’humour et pleine d’amour. C’est une réussite totale, à
tous les niveaux. Que ce soit sur le plan de l’écriture, sur celui de la mise
en scène te sur celui du jeu d’acteur, ils y ont tous mis le meilleur d’eux-mêmes.
Les grands moyens, quoi !
2 commentaires:
Merci pour cet avis.
Nous avons pris nos billets pour Novembre.
Bernard.
Genialissime
Je suis allé voir cette pièce car je suis fascinée par le talent de Garnier et Sentou et je voulais suivre leur aventure. Et bien je ne cacherai pas qu'en allant voir ce vaudeville j'ai découvert encore plus ces deux fous qui me font déjà bien rire car je les ai découvert dans quelque chose de romantique. C'est difficile à admettre mais ils sont capable de provoquer en nous ce petit malaise face à la situation difficile de leur personnage. On se laisse prendre dans l'histoire, on est captivé. On est aussi bouleversé que ces quatre personnages. Oui, parce que je suis venu pour ces deux gars mais en venant les voir j'ai découvert deux ravissantes jeunes femmes bourrées de talent! Drôles, émouvantes et talentueuses. Je ne regrette pas du tout d'avoir été voir les Grands Moyens et pour tout dire s'il m'est possible d'y retourner je n'hésiterai pas une seule seconde.
Bravo ! Et courez vite voir cette pièce si ce n'est le déjà fait.
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