Théâtre du Petit Saint-Martin
17, rue René Boulanger
75010 Paris
Tel : 01 42 08 00 32
Métro : Strasbourg Saint-Denis
Seul en scène écrit et interprété par Régis Mailhot
Mis en scène par Gil Galliot
Présentation :
Reprise des hostilités, c’est
l’histoire d’une rupture non conventionnelle, celle d’un comique qui décide de
claquer la porte d’une société où la franchise est dorénavant considérée comme
un acte de délinquance. Entre le ras-le-bol de commenter la sempiternelle même
info spectacle, la difficulté de s’exprimer dans une époque moraliste et
démoralisante, et la peur de penser mal, le métier d’humoriste devient un défi
quotidien.
Mon avis :
Hier soir, je me suis fait le Mailhot… Qu’est-ce que je me suis poilé !
Ce préambule un peu vaseux reflète pourtant le grand plaisir
que j’ai connu en découvrant le nouveau seul en scène de Régis Mailhot. Ce
garçon propre sur lui, très élégant (costume, cravate), ce qui devient rare,
est un de nos humoristes les plus iconoclastes et les plus joyeusement
subversifs actuellement. Avec lui, il n’y a pas de langue bois, il n’y a que
des échardes qu’il plante allègrement ça et là au gré de ses envies et de l’actualité.
Il annonce d’ailleurs la couleur avec le titre de son
spectacle : « Reprise des hostilités »… Régis Mailhot repart
donc au combat. Et il a fait le plein de munitions. Il faut dire que l’actualité
française et mondiale a de quoi le ravitailler. Même s’il est un redoutable
tireur d’élite, il n’est pas du genre sniper, il ne tire pas au coup par coup.
Lui, son arme, c’est plutôt la mitraillette car il arrose copieusement tout ce
qui bouge.
Son spectacle est découpé en plusieurs chapitres thématisés.
C’est très bien pour le public car il a droit à du concentré à chaque fois.
Régis Mailhot ne nous propose que le suc ; il élimine le superflu, ne va
qu’à l’essentiel. C’est d’autant plus efficace que le jet est continu… Il a une
façon très personnelle de prendre un sujet et de ne lâcher que lorsqu’il en a
intégralement fait le tour. Il travaille comme un orpailleur : il passe
tout au tamis et ne conserve que les pépites. Son sens de la formule est imparable
(« Si le printemps était arabe, l’automne sera voilé »… « Pierre
Bergé, c’est le grenier à blé du PS »… « Le Superbowl de ceux qui n’en
ont pas », « Le taux de suicide chez les kamikaze »). Très à l’aise
sur scène, il occupe bien l’espace et démontre également qu’il est un sacrément
bon comédien (ce qui ne transparaît pas automatiquement à la radio). Ses images
et ses comparaisons sont particulièrement osées, et il ponctue ses pires assertions
d’un sourire à la fois candide et sardonique (il faut le faire !). Il est
vrai qu’il possède un sens de l’euphémisme qui frise la mauvaise foi lorsqu’il
avoue : « Je suis un peu taquin ». Il y a dans son texte –
remarquablement écrit – quelques « taquineries » qui pousseraient
quelques unes de ses cibles préférées à avoir envie de « régisside ».
Tout est vraiment bon dans ce spectacle intelligemment
charpenté. Parmi les thèmes qu’il aborde, les infos dans dix ans, le mariage
pour tous, l’homosexualité, les « héros » médiatiques (genre Zaïa et
Leonarda), les Femen, les syndicats, les handicapés, la sexualité, la grossesse,
la paternité, les artistes engagés, le plus abouti est, pour moi, celui qui
traite des trois religions monothéistes. C’est d’autant plus percutant que c’est
dénué de tout sectarisme. C’est d’ailleurs dans le même esprit qu’il analyse la
politique ; il y en a pour tout le monde... En outre, rien n'est excessif ou gratuitement méchant. Tout est marqué du sceau du bon sens et de la logique la plus irréfutable.
Bref, autant sur le plan qualitatif que quantitatif, Reprise des hostilités est un spectacle
très dense, très riche. Il est vrai qu’avec un tonton qui a passé sa vie à faire
(brillamment) le Jacques, l’énergumène a été à bonne école…
Entre La Framboise Frivole et Régis Mailhot, mes
zygomatiques ont vraiment vécu une semaine faste !...
Gilbert « Critikator » Jouin
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