mercredi 6 janvier 2016

Balavoine(s)

Capitol / Universal Music

Sortie le 8 janvier 2016


J’ai eu le privilège de connaître et de côtoyer un peu Daniel Balavoine. Etant ami avec son batteur, Jean-Pierre Prévotat, j’ai été amené à assister à quelques séances d’enregistrement et à des répétitions. Je garde le souvenir d’un homme facile d’accès, convivial, bon vivant, vanneur et très porté sur les blagues potaches et les histoires cochonnes. Et quel rire il avait ! Je l’entends encore. Un rire explosif, juvénile, communicatif… En même temps, il était terriblement exigeant et perfectionniste, particulièrement au niveau du son. Il y avait un temps pour la déconne, et un autre pour le travail.
J’appréciais l’homme autant que l’artiste. J’avais pris une claque en 1978 avec son troisième album qui contenait entre autres Le Chanteur, Lucie, Si je suis fou… Mais ma chanson préférée – je la réécoute encore souvent – c’était Les oiseaux… Puis j’ai eu la chance de le découvrir sur scène au printemps 1979 dans le rôle de Johnny Rockfort dans Starmania. Depuis ce jour, je suis devenu un admirateur inconditionnel et l’ai toujours suivi.

Quelques temps après sa disparition, devenu journaliste, j’ai rencontré à plusieurs reprises sa sœur Claire et son frère Bernard. Ils oeuvraient au sein de l’Association Daniel Balavoine et ils avaient pris le relais de leur frère pour assurer l’installation en Afrique de pompes à eau… Il m’est également arrivé de croiser sa compagne, Corinne, qui travaillait alors dans les médias.
Lorsqu’il m’est arrivé également d’interviewer certains de ses partenaires de Starmania comme Fabienne Thibeault, Diane Dufresne, Nanette Workman, Roddy Julienne, on évoquait inévitablement la personnalité forte et attachante de Daniel. Il avait laissé en eux, en nous, une empreinte indélébile.

En ce moment, à l’approche du trentième anniversaire de sa disparition, les hommages et les émissions commencent à se multiplier.
J’ai ainsi beaucoup aimé le documentaire Je m’ présente, je m’appelle Daniel de Didier Varrod, diffusé sur France 3 le 30 décembre dernier.
Et c’est avec autant de curiosité et d’intérêt que je me suis penché sur Balavoine(s), le premier « tribute » qui lui est consacré, qui sort le 8 janvier.

Bon, comme d’habitude, l’exercice critique est hélas totalement subjectif. Je ne peux que me fier à mes goûts, à mes sensations, à mon plaisir… ou pas. Voici donc mon hit-parade très personnel.

Emmanuel Moire
A la plus haute marche de mon podium, je place Florent Pagny pour sa reprise de La vie ne m’apprend rien. Son interprétation est à la fois pleine de conviction et de sensibilité. On le sent vraiment concerné par le sens de ce superbe texte. Il adhère visiblement à chaque mot et le fait sien. Et, atout supplémentaire, il ne recherche absolument pas la performance vocale. Du coup, on en apprécie d’autant plus les nuances.
Ensuite, je place Emmanuel Moire. Il restitue Le chanteur à sa façon, avec sa propre personnalité. Il traite parfaitement l’aspect pathétique de cette chanson. Là où Daniel, jouant les matamores, mettait une sorte de défi, il distille une fragilité empreinte de mélancolie. En cela il est conforme à l’esprit du texte. En permanence sur le fil, il confirme sa grande intelligence et sa finesse.
Sur la troisième marche du podium, j’ai installé Christophe avec Lucie. On dirait que cette chanson lui appartient, qu’elle fait partie de son répertoire tant elle est en adéquation avec son climat habituel. C’en est d’ailleurs troublant.

Marina Kaye, Zaz, Florent Pagny (photo Abaca)
 En quatrième position, je mets Shy’m pour la belle énergie qu’elle déploie dans Vivre ou survivre… Puis vient Zaz dont les fêlures vocales permettent de faire merveilleusement passer l’émotion de Tous les cris, les SOS
Je ne connaissais pas Josef Salvat et j’ai découvert une voix intéressante, une sonorité originale vraisemblablement due à ses origines australiennes. Il apporte une signature très personnelle à Pour la femme veuve qui s’éveille

En revanche, l’interprétation de Damien Lauretta – que je ne connaissais pas non plus – m’a d’abord rendu perplexe. Tellement habitué à l’agressivité et au ton menaçant de Daniel Balavoine dans Quand on arrive en ville que j’ai été décontenancé par le ton tranquille, la voix douce de ce jeune homme. Et puis, soudain, il est passé en voix de tête, et j’ai trouvé que c’était plutôt réussi. Finalement je n’ai jamais cessé d’osciller entre agacement et plaisir. Un peu à côté de la plaque (il ne fait pas assez méchant), il a au moins le mérite d’avoir pris une option et de s’y tenir. A revoir…

Jenifer
Enfin, quasiment sur un même pied d’égalité, je place Cléo pour son intensité dans Dieu que l’amour est tristeJenifer, pour son absolue maîtrise, sa maturité et la beauté formelle de sa voix mélodieuse au service de cette très sensible chanson qu’est Mon fils, ma bataille… J’ai aimé l’appropriation intelligente, toute en retenue d’Ours dans Si je suis fouCats On Trees pour son interprétation presque trop respectueuse de Aimer est plus fort que d’être aimé, ce qui donne quelque chose d’assez distancié mais au climat intéressant… Le choix de Féfé faire de L’Aziza un reggae est fort judicieux, très agréable à écouter.

Sinon, il faut saluer le joli travail de Marina Kaye dans la seule chanson en anglais de cet album, Only The Very Best. On la sent vraiment habitée, imprégnée et son refrain est impeccable... Quant à Raphaël, il apporte toute sa délicatesse dans une reprise feutrée et sobre de Soulève-moiNolwenn Leroy s’en sort comme d’habitude avec une élégance rare et beaucoup de raffinement avec cette chanson pas évidente d’accès, toute en sinuosités qu’est Un enfant assis attend la pluie.


Hélas, presque toutes les chansons de Balavoine(s) sont, à mon avis – et cela n’engage que moi- gâchées par des arrangements ratés, décalés, parfois pompeux voire incongrus. C’est dommage car on passe à côté de quelque chose de vraiment fort. Je me suis souvent perdu en route, indisposé que j’étais par cette incompatibilité entre de jolies voix et de mauvais accompagnements musicaux. J’ai écouté l’album à plusieurs reprises et j’ai souffert à chaque fois. Mais ce n’est que mon ressenti…

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