Théâtre Tristan Bernard
64, rue du Rocher
75008 Paris
Tel : 01 45 22 08 40
Métro : Villiers /
Saint-Lazare
Une comédie de Bénabar et Héctor
Cabello Reyes
Mise en scène par Isabelle Nanty
Décors de Sébastien Nicolini
Costumes de Priscille
Schirr-Bonnans
Lumières de Laurent Béal
Avec Pascal Demolon, Zoé Félix,
Bénabar, Isabelle Habiague, David Zéboulon
Présentation : D’habitude, son psy, on vient le voir parce
qu’on a besoin d’aide. On le paye et il écoute. On évite si possible de le
provoquer, de l’insulter, voire de le menacer physiquement. En échange, le psy
évite, normalement, de vous traiter de con, de vous humilier ou de menacer
d’appeler la police. Ici, ce n’est pas tout à fait ça…
Et d’ailleurs pourquoi ces deux
types, un cuisiniste et un psy, vont-ils passer ensemble la plus étrange
journée de leur vie ? A cause d’une femme, bien évidemment !...
Mon avis : Tout concourt à rendre cette pièce très agréable à
suivre.
J’ai d’abord aimé son écriture,
moderne et fine, et ses dialogues, drôles et percutants. Ensuite, j’ai aimé sa
construction. C’est une pièce qui va sans cesse crescendo. C’est d’abord un
match de boxe à deux. Un qui a envie de cogner et de détruire (Pascal Demolon) et
l’autre qui cherche à esquiver pour éviter le chaos. On se retrouve un peu
comme dans ces films de Francis Veber ou de Gérard Oury qui mettent aux prises
deux individus aux profils psychologiques et comportementaux diamétralement
opposés. Bénabar et Pascal Demolon composent un tandem hyper efficace. Les deux
personnages sont très fouillés et leur opposition ne peut que faire des
étincelles.
Bénabar, psy de son état, est un
bourgeois d’apparence plutôt lisse, intellectuel légèrement imbu de son statut,
assez réservé, voire timoré. Il est élégant, bien coiffé. Il est culturellement
et socialement impossible qu’il puisse avoir une once de sympathie pour ce type
qui vient le menacer dans son cabinet… Ce type, c’est Pascal Demolon. Lui, il
est cuisiniste. Le mépris qui l’habite à l’encontre des nantis (qui est en fait
de la jalousie) se cristallise sur le psy de sa femme, vil représentant de tout
ce qu’il exècre. Il n’a pas à se forcer pour se montrer agressif et vindicatif
envers lui. La mèche en bataille, le verbe haut, le geste nerveux, il présente
tous les symptômes de l’homme en crise. Tout simplement parce qu’il est en
souffrance.
Leur affrontement est absolument
savoureux. Notre psy, qui met un certain à comprendre ce qui a provoqué l’animosité
du cuisiniste, est un tantinet tétanisé. Pas évident de se trouver brutalement
confronté à une grenade dégoupillée (au propre comme au figuré)… Puis, petit à
petit, le combat de boxe s’équilibre. Les rôles s’inversent parfois. A force de
parler, ils se découvrent des affinités, des points communs.
Comme je l’ai stipulé, le déroulé
de la pièce va crescendo. Il atteint son pic d’intensité lorsque le duo se mue
en trio avec l’arrivée de « La » femme, épouse du cuisiniste et
patiente du psy. Une mise en scène très astucieuse nous permet d’être les
témoins d’une confrontation que nous attendons tous. Nous vivons là un grand
moment de comédie pure. Complètement impliqués dans leur personnage respectif, Bénabar,
Pascal Demolon et Zoé Félix s’en donnent à cœur joie.
J’ai été réellement séduit par le
jeu subtil, précis et propre de Bénabar. Il est tout à fait crédible dans ce
rôle de thérapeute qui a conscience d’être un praticien de seconde zone (il est
très loin de jouir de la notoriété de son collègue et rival Schneider, la star
médiatisée des psys).
Pascal Demolon est irrésistible
de drôlerie. Avec son timbre de voix et son phrasé si particuliers, il peut d’autant
plus donner libre cours à son tempérament de feu que Bénabar reste, lui, dans
la sobriété. Leur association est une formidable trouvaille.
Quant à Zoé Félix, elle est
touchante de fragilité et de féminité. En totale contradiction avec son
physique de femme fatale, elle joue le doute et le manque d’assurance à la perfection,
ce qui la rend attachante et profondément humaine.
Je vous écoute est une des bonnes surprises de cette rentrée 2016 véritablement
très riche. Le texte est bon, les répliques sont souvent cinglantes, la mise en
scène est enlevée et inventive, on y rit beaucoup et les comédiens sont vraiment
épatants.
Le talent de plume du binôme
Bénabar/Hector Cabello Reyes est une évidence. Une belle carrière d’auteurs de comédies
s’ouvre devant eux.
Gilbert « Critikator »
Jouin
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