Théâtre Trévise
14, rue de Trévise
75009 Paris
Tel : 01 45 25 35 45
Métro : Cadet / Bonne Nouvelle / Grands Boulevards
Spectacle musical écrit par Alyssa Landry et Emmanuel
Lenormand
Musique de Thierry Boulanger
Mis en scène par Emmanuel Lenormand
Costumes de Benjamin Lefèvre
Décors de Christophe Auzolles
Avec Anaïs Delva (Mia), Cécilia Cara (Capucine), Marion
Posta (Barbara) ou, en alternance, Claire Pérot (Mia), Dalia Constantin
(Capucine), Magali Bonfils (Barbara)
Présentation : C’est l’histoire de trois femmes. En cloque.
Trop glauque. Avec un polichinelle dans l’ tiroir. Trop « vieille
histoire ». Avec une brioche au four. Trop chaud. Elles ne sont pas pour.
Enceintes et, bientôt… énooormes !
Aidées de seize chansons, elles
vont nous confier leurs angoisses, leur impatience, leurs joies. Choisir un
prénom pour le bébé, apprendre à changer une couche, supplier pour des fraises,
vanter la péridurale… Tout cela avec humour, charme et séduction.
A partir du moment où elles
apprennent leur grossesse jusqu’à l’accouchement, bien des choses vont se
passer. Un compte à rebours est lancé. Plus que six mois ; quatre
mois ; trois jours ; deux heures avant l’arrivée de Monsieur Bébé.
Seront-elles prêtes ? Bébé sera-t-il là à l’heure ?
Vivons ces neuf mois en leur
compagnie afin de tout savoir…
Mon avis : Alphonse Allais avait affirmé sous forme de calembour
que « La mère rit de son arrondissement ». C’est certainement le cas
pour certaines femmes, et c’est tant mieux, mais il ne faut surtout pas en
faire une généralité. On ne réagit pas toujours de la même façon lorsque l’on
apprend que l’on a réussi avec succès un test de grossesse… C’est le cas de
Barbara (Marion Posta), Capucine (Cécilia Cara) et Mia (Anaïs Delva), trois
très bonnes copines, qui apprennent simultanément qu’elles ont « un
polichinelle dans le tiroir ».
Enooormes !, avec trois « o » (« Occupé, comme
leur ventre ; « Organique », pour tout ce qui s’y passe à
l’intérieur ; « Osée », car on y appelle un chat un chat) est
une pièce intéressante parce que, sous le couvert de la légèreté, elle frise
parfois le documentaire. Les auteurs sont parvenus à nous amuser et à nous
émouvoir en enfantant une comédie – à forte connotation musicale - sur un thème
aussi vieux que le monde : la grossesse. Je crois que c’est la toute
première pièce résolument obstétricale à laquelle j’assiste. En effet, on suit
nos trois héroïnes depuis le jour où elles sont informées qu’une petite graine
a germé en leur sein jusqu’à leur accouchement. Pendant neuf mois, donc, nous
sommes les témoins de leurs états d’âme, nous assistons à leur évolution
physique, nous vivons avec elles les conséquences à la fois physiologiques et
psychologiques que leur état entraîne ; elles évoquent également des
problèmes plus pratiques comme le choix du prénom, la pose des couches, les
préparatifs de l’accouchement et l’option ou non de la péridurale… Tout y
est !
Mais tout cela elles le racontent
en fonction de leur mentalité, de leur vécu et, bien sûr, de l’implication du
géniteur.
La pièce est drôle parce que les
caractères des jeunes femmes sont totalement différents. Barbara, c’est la
working girl doublée, en raison de son métier, d’une fashion victime. Dotée d’un
sacré tempérament, elle est cash, exubérante, sceptique et pragmatique… Mia est
plus discrète, plus en retenue. C’est une femme libre et indépendante qui cache
sa fragilité en jouant les fatalistes et en se montrant un peu trop sûre
d’elle… Et puis il y a Capucine. C’est quelque chose. Elle est romantique,
catholique pratiquante (sa patronne doit être Sainte Nitouche) bref, c’est une
ravie de la crèche. Conventionnelle et naïve, elle positive systématiquement.
Liées par une complicité et une
amitié sans faille, elles peuvent tout se dire, tout se confier, y compris
leurs désagréments les plus intimes (n’est-ce pas Mia ?). Et elles
s’échangent en toute franchise leurs appréhensions, leurs peurs, leurs doutes,
mais aussi leurs espoirs et leurs exaltations. Si le fond se veut sérieux parce
que réaliste, les dialogues sont toujours drôles, excellement servis par trois
comédiennes pleines d’énergie, de talent et de justesse et à la personnalité
bien tranchée.
La construction de la pièce est
simple car elle se compose d’une succession de saynètes ou de tableaux présentés
dans l’ordre chronologique. En revanche, sa mise en scène est extrêmement bien
travaillée. Utilisation de projections, d’accessoires, rôle important des voix
off, scènes et chansons plus ou moins longues. Car, dans Enooormes ! il y a des chansons !
En effet de ces trois enceintes, naturellement,
il sort du son… Un son tour à tour mélodieux, bluesy, rock’n’roll, jazzy, mélancolique.
Lorsqu’elles chantent ensemble, leurs voix s’harmonisent parfaitement. C’est du
miel pour nos trompes d’Eustache. Par moment, j’avais l’agréable sensation de
retrouver l’ambiance vocale des meilleures comédies musicales américaines des
années 50.
Chacune a son moment de bravoure.
Capucine avec sa démonstration burlesque de l’utilisation des couches ;
Barbara lorsqu’elle danse et joue avec un manteau vide d’occupant ;
l’interprétation particulièrement émouvante de Mia dans une chanson intitulée
« Seule ». Elles sont vraiment épatantes toutes les trois, chacune
maîtrisant à merveille son registre. Mention particulière toutefois à Cécila
Cara, dont le personnage est quand même un peu plus étoffé et fouillé que les
autres. Elle nous révèle une fantaisie et un sens de l’humour qui, pour ceux
qui ne la connaissent pas, est inattendu. Sa palette de jeu s’est encore
élargie. Il y a en elle un petit côté Audrey Hepburn pas encore assez exploité.
Alfred Hitchcock l’aurait adorée.
Comme son nom l’indique, Enooormes ! est une pièce gonflée,
parfois crue, toujours distrayante, interprétée finement et malicieusement par
trois pas très sages femmes aussi douées en comédie qu’en chant. Osons le
néologisme : Barbara, Capucine te Mia sont rois exquises
« partu-riantes »…
Gilbert « Critikator »
Jouin
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