Théâtre
de l’Hôpital Bretonneau
23, rue Joseph de Maistre
75018 Paris
Tel : 06 58 32 26 06
Métro : Lamarck / La Fourche / Guy Môquet
Du 11 au 14 janvier (jeudi, vendredi, samedi à 20 h 30,
dimanche à 17 h 00)
Une pièce écrite et mise
en scène par Julie Dessaivre
Librement inspirée de
« La garçonne et l’assassin » de Danièle Voldman et Fabrice Virgili
Décor de Nicolas Roy
Costumes de Marie-Armelle
Bloch
Lumières de Matthieu
Tricaud
Création musicale
d’Edouard Demanche
Avec Eloïse Bloch,
Edouard Demanche, Constance Gueugnier, Zacharie Harmi, Léa Rivière
L’histoire :
1915. Paul Grappe déserte de front. De retour à Paris, il cherche une solution
pour vivre. Libre. La police traque un homme ? Il sera une femme !
Pendant dix ans, aidé de
Louise, son épouse, il est, aux yeux de tous, la charmante Suzanne. Mais, même
maquillé, il demeure un mari possessif et violent.
La compagnie Rosa Rossa
s’empare de cette histoire vraie et entremêle drame, humour et musique.
Mon
avis :
Je ne peux que vous encourager vivement d’aller découvrir cette pièce. D’abord,
il y a l’endroit ; insolite : une salle de théâtre au sein d’un
hôpital. Dépaysement garanti.
Mais surtout il y a la
pièce qui y est donnée. Il ne faut pas beaucoup de temps aux comédiens pour
nous attraper par les sentiments. D’autant que l’histoire qu’ils nous racontent
est tirée d’un fait divers réel. Quand la réalité se teinte si joliment de
fiction, on ne peut qu’être captivé, car concerné. Devant nous s’ébattent – et
se battent – de vrais gens. Des gens comme nous quoi.
Comme Paul Grappe, on
aurait peut-être pris la tangente du front pour échapper à l’horreur. Il en
faut du courage pour déserter car, après, il faut survivre dans la
clandestinité. Pour éviter un double enfermement : son corps d’homme
recherché par la maréchaussée et le confinement dans le petit appartement qu’il
partage avec son épouse, il devient Suzanne. Avec elle, il connaît la liberté,
la griserie du danger, le pouvoir de la séduction et la débauche. La boisson
aidant, Paul et Suzanne ont de plus en plus de mal à cohabiter. Impossible dans
un tel dilemme d’échapper à la schizophrénie et à la violence.
Ce mélodrame qui se
déroule il y a tout juste cent ans a de troublants accents d’actualité. On
pense à ces femmes qui ont enduré les coups de leur conjoint durant des années
et qui, par désespoir, se muent en meurtrière de leur bourreau. Comme Louise,
elles ont défrayé la chronique. Comme Louise, elles ont droit, malgré tout, à
notre compréhension, voire à notre indulgence.
Raconté comme ça, on se demande
si cela vaut la peine de se déplacer pour assister à un drame. Eh bien
oui ! Et même en courant car on rit énormément tout au long de la pièce.
Remarquablement construite, elle nous fait vivre tout un éventail d’émotions. On
passe du saugrenu au cruel, du cocasse à la répulsion, de la légèreté à
l’agressivité, de la poésie au réalisme. On est troublé, amusé, révolté,
secoué. Bref, il n’y a que de l’humain là-dedans... La mise en scène est habile, maline,
efficace. On passe d’un tableau à un autre avec vivacité, sans s’encombrer de
fioritures. Un meuble qui change de place, un changement de costume, le tour
est joué. On ne va qu’à l’essentiel. La bande son, enlevée, entraînante, vient
contrebalancer les moments les plus âpres. On est dans la Vie. La vraie.
L’histoire, pour
remarquablement construite qu’elle soit, ne saurait nous happer avec autant de
vigueur sans la virtuosité des comédiens. Qu’est-ce qu’ils sont bons ces
cinq-là ! Ils savent tout faire ; interprétant parfois plusieurs
personnages, leur naturel est époustouflant. Aucun sur-jeu, que du naturel.
C’est du théâtre bio.
On sort de l’Hôpital
Bretonneau complètement revigoré. Ce spectacle devrait être remboursé par la
Sécurité Sociale !
Gilbert
« Critikator » Jouin
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