samedi 31 mars 2007
Rutabaga Swing
Comédie des Champs-Elysées
15, avenue Montaigne
75008 Paris
Tel : 01 53 23 99 19
Métro : Alma-Marceau
Une pièce de Didier Schwartz
Mise en scène de Philippe Ogouz
Avec : Bruno Abraham-Kremer ou Philippe Ogouz (Bernard), Emmanuel Curtil (Philippe), François Feroleto (Hans), Jacques Haurogné (Claude), Jacques Herlin (Durieux), Amala Landré (Marie), Marion Posta (Suzy). Et Ezéquiel Spucches au piano.
L'histoire : 1942. En dépit de la guerre et de l'Occupation, la vie continue tant bien que mal. Chez madame Barray, le café du village, une petite troupe d'artistes amateurs se réunit même régulièrement pour répéter un spectacle... Il y a là Philippe, le petit-fils de la patronne, qui tient l'estaminet à la place de sa grand-mère alitée à l'étage ; Marie, la jeune serveuse fraîchement engagée ; Claude, le facteur gentiment idéaliste qui ne jure que par De Gaulle et qui rêve d'entrer dans la Résistance ; Bernard, le bibliothécaire fidèle aux idées du Maréchal Pétain ; et mademoiselle Suzy, la frivole coiffeuse au franc-parler décoiffant... Tout ce petit monde danse, chante et vit, s'aime et se chamaille dans une franche camaraderie.
Quand l'histoire commence, un jeune lieutenant de la Wehrmacht, vient prendre possession d'une chambre réquisitionnée par l'armée allemande. Il est traducteur, il aime la culture française, et tient à ce qu'on ne le considère pas comme un Nazi. L'ex-pensionnaire de la chambre qui lui est réservée vient d'être arrêté avec d'autres otages en représailles d'un attentat. Il va être fusillé le soir-même. Or, ayant réussi à s'échapper du camion qui l'emmenait vers le lieu de son exécution, il rentre subrepticement pour réintégrer sa chambre...
Mon avis : Petit problème avec le titre car cette pièce contient beaucoup plus de rutabaga que de swing ! Hormis la toute première chanson, tonique et enlevée, et une autre gentiment jazzy, ce sont surtout de jolies romances qui nous sont proposées. C'est un peu dommage car cette troupe possède de l'allant et de l'entrain.
Après cette simple réticence qui n'enlève rien à la qualité su spectacle présenté, Rutabaga Swing est une pièce qui, en marge de son parti-pris de nous distraire, nous donne beaucoup à réfléchir. On y traite en effet de sujets graves, très graves, et on y rit énormément. Ponctuée de documents radio de l'époque, elle nous distille quelques vérités historiques dérangeantes. Cette pièce est un concentré de ce que la nature humaine peut engendrer de beau et de laid. Entre bassesses, trahisons, frilosité et grandeur d'âme, courage et solidarité, c'est toute la palette de ce qu'ont été la plupart des comportements en temps de guerre. Il faut l'avoir vécu pour juger. Et encore...
Le casting est parfait. Les personnages féminins sont attachants. Marie, la serveuse, est touchante de discrétion, de gentillesse et de dignité. Suzy, la coiffeuse qui ne s'embarrasse pas de principes, est pétulante et sympathique. Claude, le facteur, candide et attendrissant, fait un numéro qui nous rappelle son collègue du Jour de fête de Tati. Hans, l'officier allemand qui-n'a-pas-le-beau-rôle, nous fait vite partager les affres que représente pour lui le fait d'être l'occupant et d'avoir pouvoir de vie et de mort sur des gens auxquels il s'est attaché. A travers son regard lucide, il met le souvent le doigt là où c'est sensible. Et il y a monsieur Bernard. Quelle présence ! La séquence où il est travesti en madame Barray est un fantastique morceau de bravoure.
En conclusion, même si on peut déplorer quelques longueurs (particulièrement deux scènes avec Hans et dans le choix de chansons lentes), Rutabaga Swing est une pièce fine et intelligente. Sans vouloir nous donner de leçon, elle nous met face à un miroir qui reflète un vrai condensé du genre humain. La troupe quant à elle est irréprochable. Les personnages nous ressemblent tant qu'on ne peut que se remémorer la célèbre réflexion de Jacques Prévert : "Quelle connerie la guerre !"
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