mardi 1 avril 2014

La Sanction

L’Archipel
17, boulevard de Strasbourg
75010 Paris
Tel : 01 48 00 04 05
Métro : Strasbourg Saint-Denis
Jusqu’au 12 avril
Cette pièce sera jouée à Avignon en juillet. Théâtre du Roi René à 18 h 15.

Une pièce de Jean Barbier
Mise en scène par Idriss Saint-Martin
Décors d’Olivier Prost
Lumières de Jean-Luc Piro
Costumes de Maryvonne Hamida
Avec Diane de Segonzac (la vieille dame), Christophe Poulain (Red Douglas), Julien Tortora (Jeff), Sabine Perraud (Liz Douglas), Jacques Chailleux (John)

L’histoire : Années 70, dans une petite ville tranquille des Etats-Unis. Deux hommes que tout oppose vont, par goût du risque et pour l’appât du gain, cambrioler une pauvre vieille femme. Mais la situation tourne mal… Ils vont commettre l’irréparable. Seul l’un d’entre eux sera arrêté et jugé… A sa sortie de prison, il part à la recherche de son ex-associé…

Mon avis : C’est un crève-cœur que cette pièce doive s’arrêter le 12 avril… Sincèrement, j’ai été happé par cette histoire sombre, par ce sordide fait divers qui aurait pu s’inspirer de la réalité tant il est crédible et tant sa logique est implacable. C’est simple, à un moment du début, je lui ai trouvé un véritable cousinage avec Orange Mécanique ; Christophe Poulain, dans le rôle de Ted, n’étant pas loin de se comporter comme Alex le personnage interprété dans le film de Kubrick par Malcolm McDowell. C’est là un véritable compliment tant ce garçon réussit à distiller une inquiétante violence gratuite et à y montrer un plaisir sadique. Il fout vraiment la trouille, c’est un grand détraqué, incontrôlable et hyper-dangereux.
L’habileté de l’auteur est de lui avoir adjoint un complice qui lui est diamétralement opposé. Quand Ted fait partie de ce qu’on appelait à l’époque les « blousons dorés », Jeff lui est un authentique blouson noir, un voyou venu de la rue, un héritier de ces bandes nées au milieu des années 50 qu’un film comme La Fureur de vivre a immortalisées. Julien Tortora a ce look. On le croirait sorti tout droit de la bande des Sharks, ces latino-américains de West Side Story. Autant Ted est un adepte de la violence, autant Fred préfère agir en douceur. Ils forment un binôme façon « flic gentil » et « flic méchant ». Mais leur finalité est commune : partir avec les économies de la vieille dame.


Pendant toute la première moitié de la pièce, on est sous tension. On prend fait et cause pour la vieille dame, on a peur pour elle. Surtout qu’elle ne veut rien lâcher. Cette petite dame fragile est d’un courage hallucinant. Mais, à l’instar de la Chèvre de Monsieur Seguin, son opiniâtreté risque de ne pas être suffisante, surtout face à un barjot comme Ted… Les scènes qui se déroulent dans l’appartement de la vieille dame sont dures, âpres, sans concession. Elles sont absolument nécessaires pour nous faire comprendre les profils psychologiques des deux principaux protagonistes et préparer ainsi le terrain à la deuxième partie.

La sanction est une pièce bien construite. Elle aurait pu être malsaine, elle est uniquement machiavélique. Et, surtout, elle est remarquablement interprétée. D’abord par le duo Poulain/Tortora. Ils sont en tous points excellents. C’est d’autant plus méritoire qu’ils incarnent des personnages qui doivent faire appel à un registre de jeu très étendu. Ils sont vraiment parfaits.
Une mention particulière aussi pour la prestation de Diane de Segonzac dans le rôle hyper délicat de la vieille dame, un rôle dans lequel elle doit subir toutes sortes de violences morales et physiques, au cours desquelles il lui arrive, grâce à Jeff, de connaître quelques petits moments d’espoir. Un beau, très beau personnage.


Grand amateur de polars, j’ai aimé La Sanction pour son climat, pour la justesse de ses personnages et pour leur jeu réellement habité. C’est une pièce qui ne peut pas laisser indifférent.  Je n’ai pas regretté ma soirée…

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