jeudi 2 juillet 2015

Anne Baquet "Non, je ne veux pas chanter"

Le Lucernaire
53, rue Notre-Dame des Champs
75006 Paris
Tel : 01 45 44 57 34
Métro : Notre-Dame des Champs / Vavin

De et avec Anne Baquet
Accompagnée au piano par Grégoire Baumberger
Mise en scène de Claudine Allegra
Lumières de Jacques Rouveyrollis

Présentation : Récital hors du temps, qui mêle le burlesque et le sensible. Après avoir interprété un répertoire allant de Bach à Bernstein, Anne Baquet a désiré reproduire la même diversité avec des créations.
Elle s’est donc adressée à différente auteurs (François Morel, Juliette, Jean-Jacques Sempé, Isabelle Mayereau, Georges Moustaki, Claude Bolling, Marie-Paule Belle…) sans oublier Rachmaninov, Chopin…
C’est un spectacle hors du temps, ni « modé » ni démodé, un voyage plein d’esprit, d’humour et de poésie, où le public passe d’une mélodie vocale à un piano quatre mains farfelu, ou d’une chanson humoristique à un pas de danse.

Mon avis : Anne Baquet a d’abord hérité des gènes de son père musicien et ô combien sportif, et de sa mère danseuse et chorégraphe. Ne se contentant pas de ce bagage inné, elle l’a agrémenté et enrichi d’études de chant, de danse, de comédie avec, en prime, un détour dans l’univers du cirque. Si bien qu’elle est devenue une artiste protéiforme et pluridisciplinaire. Une artiste complète, quoi, pour faire simple. Et qui dit « artiste complète », dit « spectacle total »…


Non, je ne veux pas chanter est la parfaite synthèse de tous ces talents additionnés. Après avoir découvert son pianiste (au sens propre du terme), salle oblige, Anne Baquet entame son récital avec un Lucernaire d’Opéra signé Rachmaninov. Après cette entame lyrico-académique, elle nous sert immédiatement un autre aspect de sa (forte) personnalité, la malice. Ensuite, elle ne va plus cesser de nous proposer des titres très divers lui permettant à chaque fois de nous offrir les mille autres facettes de son incroyable talent. C’est qu’elle sait tout faire. Et même un peu plus. Elle utilise en effet tous les acquis de ses multiples expériences pour nous faire vivre la bonne vingtaine de titres qu’elle interprète : chant lyrique, danse, humour, poésie, mime, burlesque… Anne est un véritable clown moderne. Physiquement et expressivement, elle m’a fait furieusement penser à la Gelsomina de La Strada (Giuletta Masina) de Fellini. Il y a en elle tout le registre de la commedia dell’arte auquel elle ajoute le côté âme slave familial. Au niveau des possibilités de jeu(x), on ne peut rêver plus large éventail.


Elle tire toutes les capacités de sa voix de soprano avec une maîtrise étonnante. Ça a l’air tellement facile et naturel ! Y compris quand elle se lance dans des trilles haut perchées ou dans des exercices de diction hallucinants. Cette aisance masque inévitablement l’incroyable somme de travail que l’obtention d’un tel résultat génère en amont. Chaque geste, chaque saut, chaque mimique, chaque entrechat, qui nous paraissent si spontanés, sont parfaitement étudiés. Ils viennent souligner ou illustrer un  thème, une situation, un mot, ce qui rend chaque chanson d’autant plus vivante.
Elle est remarquablement complétée en cela par son complice Grégoire Baumberger, une sorte de Pierrot lunaire frisé et au large sourire qui, lui, m’a fait un peu penser au personnage de Bip du mime Marceau. Ensemble ils se livrent à des pas de deux et à des quatre-mains pianistiques joliment et drôlement chorégraphiés.


En conclusion, vous n’avez que jusqu’au 9 août pour vous précipiter au Lucernaire afin de partager un grand moment de spectacle total avec une artiste surprenante, généreuse et épanouie. D’accord, elle « ne veut pas chanter », mais elle va vous enchanter…

Gilbert "Critikator" Jouin

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