vendredi 9 novembre 2007

Le système Ribadier


Théâtre Montparnasse
31, rue de la Gaîté
75014 Paris
Tel : 01 43 22 77 74
Métro : Edgar Quinet/Gaîté/Montparnasse

Une pièce de Georges Feydeau
Mise en scène par Christian Bujeau
Avec Léa Drucker ((Angèle), Bruno Solo (Ribadier), Jean-Noël Brouté (Thommereux), Gérard Darier (Savinet), Fabienne Galula (Sophie), Romain Thunin (Gusman)

Ma note : 7/10

L'histoire : Pour pouvoir tromper en toute quiétude son épouse Angèle, qui est jalouse jusqu'à la paranoïa, Ribadier a inventé un système imparable. Lorsqu'il a envie de courir à un rendez-vous galant, exploitant les facultés hypnotiques dont il est doué, il l'endort en la fixant dans les yeux. A son retour, il réveille la malheureuse en lui soufflant sur le front.
Hélas, les plus belles mécaniques finissent toujours par se détraquer, et il en va de même pour le "système Ribadier", pourtant réputé infaillible. Surtout quand un ancien soupirant de son épouse revient d'un long exil bien déterminé à reconquérir l'élue de son coeur...

Mon avis : Quel auteur que ce Monsieur Georges Feydeau ! Ecrite la même année que Monsieur Chasse ! - il y a tout de même 115 ans - Le système Ribadier se distingue avant tout par ses dialogues ciselés et ses répliques savoureuses. Là, pas de portes qui claquent, pas d'amant dans les armoires, pas de courses folles, mais plutôt des échanges verbaux vifs, quelques saillies de bon aloi et de facétieux apartés avec le public. Mais si Le système Ribadier est d'abord une pièce qui s'écoute, elle n'en demeure pas moins très rythmée et truffée de rebondissements croquignolesques.
Le premier tiers repose sur le jeu du chat et de la souris auquel se livrent le sieur Ribadier et son épouse, malade de jalousie. Il faut dire que la pauvre Angèle (Léa Drucker) a été tellement bafouée par feu son premier mari qu'elle en nourrit une méfiance de tous les instants vis-à-vis de son successeur. Et elle n'a pas vraiment tort de se montrer si soupçonneuse... C'est une opposition de deux caractères. Devant un déferlement quasi hystérique de reproches, de plaintes, de lamentations qui, en une poignée de secondes sont regrettés pour se muer en une tentative de conciliation et d'apaisement, Ribadier (Bruno Solo), qui a certes quelques écarts de conduite à se reprocher, s'efforce de rester stoïque. Dame, il est tellement sûr de son fameux "système"...
Léa Drucker confirme une fois encore qu'elle est parfaitement à l'aise dans tous les registres. Elle nous campe une madame Ribadier à la jalousie et à la souffrance très théâtrales capable de se révéler soudain terriblement romantique et amoureuse. D'agaçante, elle devient touchnate. Elle joue toutes ces situations avec une grande finesse en ayant l'air de s'amuser énormément avec ce personnage haut en couleurs, limite caricatural...
Pour sa première expérience théâtrale, Bruno Solo a fait le bon choix. Il a l'art, en une simple mimique, de faire passer ses sentiments. Il aurait été excellent à l'époque du cinéma muet. Son Ribadier n'est jamais outré. Tout en subtilité. Il le joue avec l'assurance du bon bourgeois, de l'homme arrivé. Il vacille parfois légèrement devant les assauts véhéments de son épouse ou quand il doit trouver une parade aux maladresses de la servante, mais il reprend très vite sa maîtrise.
Or, c'est au moment où l'on commence à craindre que la pièce ne se mette à ronronner que surgit le troisième larron, Thommereux, l'homme par qui la machine va s'emballer. L'astuce de la mise en scène est d'avoir fait de lui l'antithèse de Ribadier. Autant ce dernier est placide, autant Thommereux est survolté, fougueux, excessif... Sans lui, la pièce n'atteindrait pas cette espèce d'équilibre. Jean-Noël Brouté y est épatant. Il a une condition physique irréprochable et un sens aigu de la gestuelle comique. Comme dans tout vaudeville qui se respecte, il fallait que le trio classique, le mari, la femme, le soupirant, se montre d'une égale valeur. Et là, c'est particulièrement bien réussi.
Petite mention également à Fabienne Galula, qui interprète une soubrette très joueuse, facétieuse et coquine. Elle est parfaite.
En conclusion, il y a seule chose qui, à mon goût, soit ratée dans cette nouvelle version du Système Ribadier, c'est son affiche. C'est vrai qu'elle ne donne pas très envie. Mais c'est pratiquement le seul reproche que l'on puisse lui adresser. Et, heureusement, les noms de Léa Drucker et Bruno Solo sont suffisamment attractifs pour que le public ait envie de passer un très bon moment de fantaisie au théâtre Montparnasse.

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