mardi 27 novembre 2007

Johnny Hallyday


Le coeur d'un homme

Ma note 7/10

Depuis le temps qu'il en rêvait, depuis le temps qu'il en parlait... Johnny Hallyday a enfin enregistré son album de blues. Du blues ? Il y en a certes, mais on pourrait plus justement qualifier cet album de variété-blues. Les puristes n'y trouveront certainement pas suffisamment leur compte. Alors, vrai retour aux sources ou habile compromis ? Il y a des deux. La maison de disques a dû craindre qu'un opus intégralement voué au blues ait un retentissement commercial moindre. Personnellement, je pense que c'est une erreur et qu'il fallait aller au bout du truc, mordre les roots à pleines dents.
Pour sauver la face, on a eu recours à un habile camouflage en faisant appel à des musiciens rompus à ce style de musique (Taj Mahal, Keb' Mo', Tony Joe White) et à des instruments typiques du country-blues (Guitares dobro, slide, pedal steel, harmonica). A ce niveau, on ne s'est pas moqué du monde du côté des Ocean Studios californiens. Il y avait du lourd ! Et, en toute sincérité, musicalement cet album tient vraiment la route. Il y a des sonorités qui fleurent bon le Deep South ou le bayou.
Et puis il y a Johnny... On sent qu'il s'est régalé. Il chante avec l'aisance chaloupée et l'assurance tranquille d'un vieux cow boy. Comme il sait qu'il peut tout demander à sa voix, il s'amuse et prend des risques. Il reste un phénomène unique. Estimable et respectable.
Pourtant, cet album tant attendu m'a laissé un peu sur ma faim. Par rapport à l'état d'esprit avec lequel il l'envisageait (nous en avions parlé en tête à tête), il a dû subir quelques influences qui l'ont fait bifurquer parfois de la ligne pure et dure qu'il s'était fixée.
Sur les treize titres qui composent Le coeur d'un homme, j'en ai retenu huit qui m'ont toutefois vraiment plu. Après tout, c'est une bonne proportion. Mais on attend toujours tellement de notre "Jojo"...
Mes deux préférées sont T'aimer si mal et Ce que j'ai fait de ma vie. La première, parce qu'elle contient tous les archétypes du blues. C'est la plus authentique. La guitare de Taj Mahal (le frère de Carol Fredericks), un harmonica bien dirty et le piano boogie lui donnent une facture classique dans le genre. Et le texte de l'écrivain Marc Lévy est un vrai texte de blues qui raconte les amours malheureuses, la rupture, la souffrance d'aimer et de ne pas l'être en retour... Quant à la seconde, son climat plaintif et douloureux la rend chargée d'émotion jusqu'à la superbe montée en puissance qui la métamorphose en une sorte d'hymne (préparez vos briquets !). A souligner également la qualité de l'adaptation de Lionel Florence qui a eu le talent de s'effacer derrière Johnny à tel point qu'on pourrait croire que c'est lui qui a écrit ce texte empli d'honnêteté et d'humilité. D'où le réalisme de l'interprétation...
Après ces deux chansons, j'en distingue quatre qui sont particulièrement solides à différents titres :
- Always. La mélodie est imparable. C'est dans ce type d'ambiance que Johnny est le meilleur. Il peut y exprimer toutes les nuances de son extrême sensibilité. Le texte est simple, c'est une jolie chanson d'amour qui va droit au coeur.
- Chavirer les foules. Il est malin comme un singe ce Mallory. Très habilement, il nous fait une resucée "Canada Dry" de Toute la musique que j'aime. Johnny y est comme un poisson dans l'eau. C'est peut-être là sa meilleure interprétation de tout l'album car il joue sur les intonations, retient les syllabes, balance naturellement, suinte le swing. Et bien sûr il y est entraîné par un subtil harmonica et une excellente guitare dobro.
- Que restera-t-il ?. Là, on nage en pleine ambiance country, un genre qui va à Johnny comme un stetson ou une paire de santiags. Qu'est-ce qu'il est bon dans la douceur et la mélancolie ! Mais quant à imaginer ce qui restera de lui, la question ne se pose même pas : il restera. Point. Et pour longtemps dans nos coeurs et nos mémoires.
- Laquelle de toi. Voici une très jolie chanson, au texte original et intelligent, et à la mélodie entraînante et vivifiante. Sacrées guitares qui sentent le bivouac à la belle étoile devant un feu de bois.
Et enfin, dans le troisième wagon du train de l'excellence, je placerai deux titres :
- Je reviendrai dans tes bras. C'est un presque vrai blues, torturé par la guitare magique de l'ami Tony Joe White. Une chanson lancinante, efficace, virile, musclée. Sur scène, elle devrait dépoter.
- Ma vie. C'est la chanson-partage type. Le public va être debout et balancer en communion extatique et complice avec LE chanteur. C'est un bon rock énergique, tonique, tout entier destiné à chauffer l'ambiance dans la salle.

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