Théâtre des Variétés
7, boulevard Montmartre
75002 Paris
Tel : 01 42 33 09 92
Métro : Grands Boulevards
Une comédie d’Isabelle Mergault
Mise en scène par Alain Sachs
Décors de Charlie Mangel
Costumes de Pascale Bordet
Avec Chantal Ladesou (Barbara), Isabelle Mergault (Gigi),
Jean-Marie Lecoq (Jean-Charles), Jean-Louis Barcelona (Gildas)
L’histoire :
Gigi (Isabelle Mergault) est engagée par son amant pour tuer sa femme, Barbara
(Chantal Ladesou). Lorsqu’elle arrive dans l’appartement, elle se retrouve nez-à-nez
avec une femme en détresse. Elle n’ose plus l’assassiner et préfère lui venir
en aide. Les deux femmes découvriront peu à peu bien des choses qu’elles
ignoraient de cet homme dont elles croyaient être sincèrement aimées…
Mon avis :
Les spectateurs s’étranglent de rire, tapent des mains… Dans la salle du
théâtre des Variétés, l’ambiance est à la franche rigolade. Les responsables de
cette belle hilarité sont deux femmes, une blonde, Chantal Ladesou, et une
brune, Isabelle Mergault. Deux foldingues qui ne reculent devant rien pour nous
amuser… Au cinéma, les films reposant sur un tandem improbable (à l’instar de ceux
de Gérard Oury ou de Francis Weber) fonctionnent généralement à merveille. Ici
aussi, le binôme est d’une rare efficacité.
Isabelle Mergault a écrit le personnage de Barbara en
pensant à Chantal Ladesou. Elle lui a concocté un rôle sur mesure, un rôle en
or où le burlesque est parfois teinté d’émotion.
Le rideau s’ouvre sur un superbe appartement bourgeois,
moderne et cossu. La première scène, qui réunit Gigi et son amant Jean-Charles,
est très importante car elle nous permet d’assister à la répétition du meurtre
perpétré à l’encontre de Barbara, la riche épouse de Jean-Charles et, vu comme
ça se déroule, devant la candeur et la maladresse de la jeune femme, on se
doute que rien ne se passera comme prévu ; et on s’en réjouit d’avance… Moulée
dans une (très) courte robe à fleurs sur laquelle elle ne cesse de tirer en
vain vers le bas, Isabelle Mergault campe une femme amoureuse, naïve et
naturellement gaffeuse. Elle est pleine de bonne volonté, mais elle manque
cruellement de concentration et de motivation. Pas facile de zigouiller quelqu’un
de sang froid…
Le premier grain de sable à venir gripper le rouage de ces
funestes préparatifs n’est autre que l’intéressée elle-même, la cible, Barbara !
Son apparition en déshabillé vaporeux rosâtre digne de Barbara Cartland et la
coiffure crêpée en pétard façon crinière de lionne évaporée, déclenche des
gloussements de plaisir. LA Ladesou est au mieux de sa forme. Avec son timbre
de voix traînant, sa gestuelle aussi désordonnée qu’appuyée, ses poses invraisemblables
et ses mimiques inénarrables, elle focalise la jubilation. Certes, on n’est pas
au Français, mais on est en plein boulevard. En pleine autoroute même car pendant
près de deux heures Gigi et Barbara vont nous entraîner dans leur folie douce
pied au plancher.
Isabelle Mergault a retrouvé toute sa verve. Si sa
précédente pièce, L’amour sur un plateau,
avait pu comporter quelques faiblesses, autant Adieu, je reste est un spectacle total, sans temps morts, avec des
situations réellement cocasses et surtout des dialogues parfaitement ciselés. J’ai
relevé bon nombre d’excellents jeux de mots, un joli « Kikiproquo », et
quelques répliques qui pourraient devenir culte comme la conclusion de Gigi à
la phrase « S’aimer, c’est regarder ensemble dans la même direction… »
dont je vous laisse le plaisir de découvrir la chute… Il y a aussi cette
exclamation qui revient en gimmick dans la bouche de l’écrivaine Barbara lorsqu’elle
apprécie une jolie tournure : « C’est bien ça ! Faut que j’le
note… »
Isabelle a aussi truffé malicieusement son scénario de clins
d’œil cinématographiques. Elle reprend à bon escient quelques répliques cultes
de Bardot dans Le Mépris. Lorsqu’elle
donne une leçon de séduction à Barbara, on pense immédiatement au cours de
maintien que donne Poiret à Serrault dans La
cage aux folles. Lorsqu’elle surgit pour accomplir son forfait, elle parodie
visiblement Lara Croft. Quant au dénouement, il m’a rappelé la trame du Crime était presque parfait d’Hitchcock…
Il y a même des cascades et un combat à mains nues !
Avec sa propension à l’autodérision, Isabelle s’est également
ingéniée à choisir pour elle et ses partenaires masculins des prénoms, Gigi, Jean-Charles
et Gildas, qui ne peuvent que provoquer son fameux chuintement.
Mais ce qui rend cette comédie totalement aboutie, c’est qu’elle
a su la saupoudrer de séquences où perce l’émotion : le désarroi de Barbara
qui veut en finir avec la vie, la mélancolie de Gigi lorsqu’elle dresse son
bilan sentimental désastreux (« On ne m’a pas aimée »), la jolie relation
qui s’installe entre deux femmes trahies par l’homme qu’elle aime…
Emportée par ces deux phénomènes, Adieu, je reste est une pièce très réussie, efficace, qui n’a pour
but que de nous faire rire de bon cœur, sans arrières pensées, sans chichis. C’est
une pièce populaire dans le sens noble du terme qui devrait aisément tenir la
route du succès jusqu’à l’été prochain.
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