L’Archipel
17, boulevard de Strasbourg
75010 Paris
Tel : 01 73 54 79 79
Métro : Strasbourg
Saint-Denis
Tous les jeudis à 19 heures
Une pièce de William Shakespeare
Adaptée par Jean-Hervé Appéré et
Bernard Azimuth
Mise en scène par Jean-Hervé
Appéré
Avec Bernard Azimuth (Claudius),
Bernard Azimuth (Hamlet), Bernard Azimuth (Gertrude), Bernard Azimuth
(Polonius), Bernard Azimuth (Ophélie), Bernard Azimuth (Laërte), Bernard
Azimuth (le spectre d’Hamlet)…
Présentation : Azimuth s’empare d’Hamlet ou Hamlet s’est-il
emparé de Bernard Azimuth ?
La question reste posée devant ce
spectacle baroque et névrosé, un pléonasme sans aucun doute, dans lequel on
retrouve les situations ainsi que les personnages emblématiques de Shakespeare,
le tout passé à la moulinette de cet humour décalé et destructeur propre à
Bernard Azimuth.
Mon avis : Il fallait oser ! Oser s’attaquer tout seul à
ce monument qu’est Hamlet, une des
plus célèbres pièces du grand William Shakespeare ! Et, surtout, réduire
cette œuvre, la plus longue du dramaturge anglais, à la façon d’une compression
de César et faire de cette terrible tragédie un show qui nous fait rire du
début à la fin, c’est une prouesse incroyable.
Je vais même être très franc :
je préfère de loin la version de Bernard Azimuth. L’originale est trop longue,
trop lourde, trop glauque. Là, j’ai tout compris. Vous pouvez y amener des
ados, ils vont prendre un réel plaisir à découvrir Hamlet sous cet angle, car l’intrigue est parfaitement respectée.
Bernard Azimuth, exalté, habité et
déchaîné, interprète tous les principaux protagonistes de ce drame. Il n’a
besoin de presque rien (une couronne de galette des rois, deux poupées, et c’est
tout) pour incarner sept des principaux personnages. On ne s’y perd jamais, on
sait toujours qui est qui. Il lui suffit de changer de voix, de prendre une
certaine posture, un accent particulier et on sait à qui on a affaire…
Pourtant, à ces sept personnages
incontournables, il faut en ajouter un, et non des moindres… Bernard Azimuth
lui-même. Il ne cesse de couper le fil de son récit pour se livrer soit à des
apartés explicatifs désopilants, soit à des digressions personnelles qui n’ont
qu’un lien lointain avec l’histoire. C’est cette construction, pleine de
ruptures, qui fait que cette pièce est complètement réussie.
Bernard Azimuth maîtrise parfaitement
l’art du burlesque. Sa prestation est insensée ; insensée dans le sens du « nonsense »
anglais. Un état d’esprit que, j’en suis convaincu, William Shakespeare n’aurait
pas désavoué. Avec une énergie de tous les instants, il s’agite et se
démultiplie. Il sa vautre avec gourmandise dans une espèce de schizophrénie
permanente. Il mêle le passé et le présent, la grandeur historique avec ses
petits soucis familiaux. Il passe presque sans transition de l’emphase la plus
déclamatoire à la petite banalité saugrenue. Il transforme ce maelstrom danois
en montagne russe.
Ce spectacle est d’une richesse
et d’une densité incroyables. Il fait en effet appel à tous les ressorts du registre
du pantomime. Il se livre même à un spectacle de marionnettes, une scène entre
Hamlet et Ophélie, qui constitue un grand moment de cocasserie. On assiste aussi
au formidable (dans le sens épique du terme) duel entre Hamlet et Laërte, un
duel plein de bruit et de fureur où le grandiose bat le fer avec le ridicule…
Et puis, soudain, il nous offre une profonde réflexion philosophique sur l’éventualité
ou non d’une vie après la mort. Mine de rien, ça nous donne à penser. D’ailleurs,
il le dit lui-même, Bernard Azimuth est un adepte de la « mise en abîme »…
Bernard Azimuth fait l’Hamlet en
cassant les jeux, en maltraitant les conventions. Rendez-vous compte :
plus ça meurt sur scène, plus on meurt… de rire dans la salle. Etonnant, non ?
Comme aurait dit monsieur Cyclopède.
Dans ce one man show qui atteint
parfois des sommets étourdissants, ce remarquable comédien qui se fait
énormément suer sur scène (au sens propre) tant il se dépense, nous livre une
pièce complètement folle sur la folie, un digest qui, pour moi, est bien plus
digeste que l’intégrale de Shakespeare. Si on y ajoute la qualité des musiques
qui illustrent certains tableaux et une bande son impeccable (bruits du dehors,
orage, etc…), on obtient un spectacle d’un très, très haut niveau. Un spectacle
qui doit marquer dans une carrière car celui-ci est réellement du domaine rare de
la performance d’acteur. A voir absolument.
Gilbert « Critikator »
Jouin
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire