Café de la Gare
41, rue du Temple
75004 Paris
Tel : 01 42 78 52 51
Métro : Rambuteau / Hôtel de
Ville
One-Man show écrit par Olivier de
Benoist et Paul-Marie Debrie
Interprété par Olivier de Benoist
Présentation : Prenant conscience de sa légère obsession à
l’égard de la gent féminine, Olivier de Benoist décide de faire amende
honorable. Après un passage chez les misogynes anonymes pour soigner son
encombrante pathologie, c’est l’heure du bilan… ODB refait le film de sa vie,
tel un équilibriste, avec un risque de rechute qui le guette à chaque réplique…
Mon avis : Olivier de Benoist est désormais en vitesse de
croisière. Il s’est confortablement installé dans un domaine qui n’appartient
qu’à lui, dans un registre qui lui est propre. Au moins, on sait pourquoi on
vient le voir et il ne nous déçoit pas. Il est au rendez-vous. Avec sa fausse
nonchalance, sa dégaine frisant la désinvolture, son œil goguenard et son
phrasé si personnel, il ne déroge pas à ce qui a fait son succès : la
vacherie élevée au rang d’art. Mais, surtout, comme certaines villes ont leur
spécialité (Montélimar le nougat, Cambrai la bêtise, Aix le calisson…), lui
aussi a la sienne, elle lui a donné son image de marque : la misogynie.
Pour lui piquer un de ses jeux de mots énoncé hier soir, on peut affirmer qu’il
est un « misogyne tonique ». Et même, on le vérifiera tout au long de
son spectacle, il est incurable…
Dans un Café de la Gare bondé,
nombreuses sont les femmes. A croire qu’elles sont maso, les bougresses. Elles
adorent se faire flageller par ce grand escogriffe qui vilipende son épouse,
dénigre sa belle-mère et ne cesse de discréditer la gent féminine en général. D’ailleurs,
ODB attaque filles en tête. Avec une mauvais foi évidente, il affirme vouloir
faire amende honorable et ne plus essayer de s’en prendre aux femmes au cours
de ce nouveau spectacle. Pour se débarrasser de cette addiction, il est même
allé jusqu’à s’inscrire aux Misogynes Anonymes ! En est-il sorti guéri ?
Vous ne pourrez établir son bilan de santé qu’à la fin. En effet, le spectre de
la rechute est omniprésent, vilain petit diable qui lui souffle à l’oreille
quelques insanités un tantinet machistes.
Olivier nous explique tout de
suite pourquoi il a baptisé ce spectacle 0
/ 40. C’est tout simple : comme il vient d’atteindre la quarantaine,
il a décidé de raconter sa vie de sa naissance (le point « 0 ») à
aujourd’hui. Flanqué de Torec, son assistant (Moldave ?), qui ressemble
furieusement à ce très précieux Marcel Gotlib et qui intervient avec autant de
maladresse que de bonhommie, il balaie ces quatre décennies dans l’ordre
chronologique. Son journal intime, l’éveil de sa sexualité, le bac, les études
de droit, sa première et unique plaidoirie, le mariage, l’éducation des
enfants, ses velléités de chanteur, la magie… Il raconte tout cela à sa manière,
c’est-à-dire avec une abondance de saillies réjouissantes, d’affirmations
malveillantes, de formules imparables, bref, tout son (mauvais) fond de
commerce y passe. Cet homme adore être odieux. Il y a vraiment de quoi faite
tout un fromage de ses caprices d’odieux car il éprouve visiblement une
véritable jouissance à aller trop loin. Il assène sa rosserie, feint de s’apercevoir
qu’il a quand même tapé un peu dur, et fait celui qui s’amende en s’en imposant
une, d’amende, sonnante et pas vraiment trébuchante.
Pour moi, qui ai vu ses trois
derniers spectacles, 0 / 40 est son
meilleur, son plus complet. Fort de ce qui a fait sa notoriété chez Ruquier
puis chez Drucker, il n’a plus à se présenter. Il est sur l’autoroute (d’où la
vitesse de croisière évoquée au début). Aucune scorie dans ce spectacle, l’humour,
noir et vache, est permanent. Les jeux de mots sont remarquables, les vannes
efficaces. Comme il a pris du métier, donc de l’assurance, il a énormément
gagné en présence et en profondeur de jeu… En plus, non seulement le rythme ne
faiblit jamais, mais il a parfaitement assimilé le principe de la rupture en
nous accordant deux séances de projections particulièrement jouissives. Quel
travail de recherche et de montage ! Certaines images sont à hurler de
rire.
Outre ces deux temps forts, il y
a d’autres très grands moments dans ce spectacle. J’ai fortement apprécié par
exemple sa fameuse plaidoirie, l’éducation des enfants, son enfance à la Zola,
et la narration de son propre décès…
0 / 40 ! Au-delà du nombre de ses années vécues, ce chiffre
est aussi un score de tennis. D’ailleurs son affiche nous le rappelle finement.
Quand le spectacle commence, il en est donc à 0 / 40 et, comme il est seul en
scène, c’est toujours à lui de servir. En guise de rappel, il nous assène deux
aces imparables, une sex tape avec son épouse et l’enterrement hypothétique de
sa belle-mère. Jeu, set et match !... ODB, c’est le Djokovic de l’humour
vache et de la misogynie flamboyante et (faussement) assumée, voire
revendiquée. Aucun temps mort, aucune baisse de régime, il reprend les rires de
volée et s’amuse même à jouer les ramasseurs de belles.
Quel match !
Enfin, je me plais à signaler la
présence en première partie d’ODB d’un galopin qui promet, Jérémy Charbonnel.
En voici un qui a tout le potentiel pour aller très loin. Avec son look propret
et gentillet, son sourire craquant, son cheveu savamment ordonné, on lui
donnerait le bon Dieu sans confession. Or, il s’avère que ce que profère ce
jeune homme est aux antipodes de cette image joliment lisse. Sous son pelage de
minet se cache un fauve à la dent particulièrement dure. C’est qu’il balance,
le bougre ! Et avec le sourire ! Rien ne lui fait peur. Son rêve
profond, c’est de « donner libre cours au connard » qui est en lui. Avec
son sens aigu de la vanne, il y parvient aisément. C’est formidablement féroce
et horriblement noir. Ce garçon, c’est de la graine de moutarde. Ça pique, ça
agace, ça brûle parfois, mais qu’est-ce que c’est bon. En tout cas, l’échantillon
qu’il nous a présenté donne vraiment envie de découvrir ce qu’il a en magasin.
Gilbert « Critikator »
Jouin
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