Théâtre
Saint-Georges
51, rue
Saint-Georges
75009 Paris
Tel : 01 48
78 63 47
Métro :
Saint-Georges
Une comédie écrite et mise en scène par Renaud Meyer
Décors d’Antoine Fontaine et Audrey Vuong
Lumières d’Hervé Gary
Costumes de Camille Duflos
Musique de Xavier Bornens
Avec José Paul (Philippe Baudrillard), Gladys Cohen (Nicole Sitbon),
Rudy Milstein (Serge Sitbon), Marie Montoya (Stéphanie Baudrillard), Guilhem
Pellegrin (Robert Sitbon), Loïc Renard (Arnaud Baudrillard)
Présentation :
Arnaud Baudrillard juge ses parents trop cools. Ils ne pensent qu’à faire la
fête et s’amuser avec leurs copains. Lui rêve de devenir expert-comptable.
Alors, il s’évade pour les vacances à Juan-les-Pins, chez son ami Serge Sitbon,
afin d’y trouver une vraie famille. Mais les parents de Serge ont perdu, eux
aussi, les rituels et les règles dont rêve leur fils, qui projette de partir
vivre en Israël er devenir rabbin. Les deux ados découvrent brusquement que
leurs parents sont de grands enfants auxquels il faut encore tout apprendre…
Mon avis : Jean
Cocteau a écrit Les Enfants terribles
en 1929, puis Les Parents terribles
en 1938, comme quoi le relationnel parents-enfants et réciproquement, est un
problème qui a toujours existé, bien avant Cocteau, et qui existera toujours. C’est
la vie… Cette pièce ne va pas néanmoins jusqu’à se ranger du côté d’André Gide
en proférant un péremptoire « Famille, je vous hais » quoi que…
Quoi que, à un moment où il est totalement dépassé par les
événements, Philippe Baudrillard (José Paul) va jusqu’à proférer sa détestation
de la famille. En fait, c’est là un cri provoqué par son impuissance à gérer
une situation devenue incontrôlable. En effet, depuis cette funeste soirée où
son épouse et lui ont oublié l’anniversaire de leur grand fils, leur petite
existence peinarde et insouciante va dégénérer, allant de Charybde en Sylla…
Devant les reproches du fiston, il était déjà allé jusqu’à se fendre d’un « On
peut avoir des enfants sans créer une famille », affirmation parfaitement
assumée qui ne souffrait pas de contestation.
Ils sont marrants les parents Baudrillard. Ce sont des
post-soixante-huitards attardés. Ce sont des fêtards, ils lèvent joyeusement le
coude, fument des pétards ; elle porte des robes héritées de la génération
peace and love et lui est une sorte de baba-cool qui vit une relation passionnée
avec son ukulélé. Vous comprenez donc qu’ils tombent de très haut lorsque leur
fils, Arnaud, après s’être déclaré mal aimé, ignoré, leur annonce sa décision
de devenir… expert-comptable ! Et, histoire de concrétiser tout à fait sa
rébellion, il refuse de partir pour la énième fois en vacances avec eux à La
Rochelle, préférant aller rejoindre son ami Serge Sitbon et sa famille à
Juan-les-Pins.
Voici donc le préambule de Mes parents sont des enfants comme les autres. Stéphanie et Philippe
Baudrillard sont deux irresponsables attachants qui n’ont pas vu se creuser un
abîme entre eux et leur fils. Quand commence la pièce, il est superflu de
tenter d’ériger ne serait-ce qu’une petite passerelle pour essayer de renouer
le contact. José Paul et Marie Montoya sont parfaits en « parents » à
côté de la plaque. Cette dernière possède une présence comique époustouflante
avec son lot de mimiques et un timbre de voix qui n’appartiennent qu’à elle (j’adore
ses larges sourires innocents et ses regards en biais). Quant à José Paul, il
confirme de pièce en pièce une aisance et un professionnalisme sidérants. Il excelle
dans les comédies parce qu’il a toujours le ton et l’attitude justes, sans
jamais forcer le trait.
Pour que le plateau de la balance de cette pièce soit
équilibré, il fallait que le couple placé en face d’eux puisse dégager une
force comique similaire. Le duo Gladys Cohen/GuilhemPellegrin, dans un tout
autre registre, est lui aussi épatant. Elle, elle incarne la femme et la mère juive
dans toute sa flamboyance, dans toute son exubérance immodérée. On comprend qu’elle
fasse un peu peur à son Robert de mari. Lui, pour avoir la paix, abonde
toujours dans son sens. Jusqu’au moment où il va faire la rencontre de Philippe
Baudrillard…
D’ailleurs la confrontation entre les deux couples va faire
grimper la pièce dans un délire paroxysmique. C’est le choc frontal de deux
cultures. Un antagonisme dont ils ne pourront se sortir qu’à grands coups de
compromissions réciproques.
On n’arrête pas de rire dans
cette comédie familiale. Même si parfois les ficelles sont un peu grosses, même
si certaines scènes font plus que friser la caricature, on s’amuse beaucoup à
les voir se dépêtrer dans le guêpier dans lequel leurs deux fils les ont
fourrés. Car autant les parents s’agitent, se démènent, se découragent,
invectivent, jouent en vain de leur autorité putative, autant les deux rejetons
restent impassibles, droits dans leurs bottes. Ils suivent paisiblement la
ligne qu’ils se sont fixée. Pourtant, ils n’imaginent pas un seul instant que
cette ligne va les mener là où ils ne supposaient jamais aller : sur les
pas de leurs propres parents !
Dans le rôle d’Arnaud, j’ai découvert en Loïc Renard un comédien
prometteur. Quant à Rudy Milstein, qui campe le très religieux Serge Sitbon, avec
sa nonchalance, et son grand sourire désarmant, je l’ai retrouvé tel qu’il m’avait
enchanté dans Les malheurs de Rudy.
Pièce drôle et sympathique, Mes parents sont des enfants comme les autres diffusent toutefois
quelques messages qui sont loin d’être anodins. Particulièrement sur les
diktats et les asservissements qu’impose une religion lorsqu’on veut la suivre
et l’appliquer dans son moindre détail dogmatique. Leur accumulation à un moment
de la pièce provoque un grand réflexe d’hilarité.
Gilbert « Critikator » Jouin
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