jeudi 18 juillet 2013

Zaz "Recto Verso"

Apparemment, dans son premier album éponyme, Zaz n’avait dévoilé que le recto de sa personnalité. Aujourd’hui, pile trois ans après, elle y ajoute le verso. Raison pour laquelle je trouve Recto Verso plus abouti que le précédent. Qui était déjà très bien ! Il contient plus de facettes, plus d’explorations, plus d’audaces aussi. Mais, telle Ariane, elle a su garder le fil de ce qui constitue son originalité et qui a fait son succès. On ne s’attardera plus cette fois sur cette voix si particulière, délicieusement écorchée, à nulle autre pareille. Zaz a apporté un sang nouveau - un chant nouveau même – à la chanson française. Elle en est aujourd’hui un des plus beaux fleurons.

Donc, dans Recto Verso, si on ne découvre plus la chanteuse (bien que la singularité de ses cordes vocales soit toujours aussi séduisante), on découvre en revanche une interprète. En effet, pour bien faire passer les thèmes de certains titres, il ne faut pas avoir peur de livrer toute l’étendue de sa sensibilité et/ou la force de ses convictions.
Dans l’énorme diamant que fut Je veux, elle s’est amusée à tailler d’autres joyaux, exploitant ainsi un filon qui fut sa première carte de visite. Mais elle a eu la sagesse de ne pas puiser par trop dans ce cousinage. C’eût été une solution de facilité. Et je ne pense pas que ce soit son genre. Seules, en fait, les deux premières chansons, On ira et Comme ci, comme ça revendiquent ce cousinage, la première pour son rythme, la seconde pour son texte.

Après ce préambule, il est grand temps d’entrer dans le vif du sujet et de discotopsier ce deuxième opus de Miss Zaz.

1/ On ira
Signée Kerredine Soltani, comme Je veux, c’est une chanson lumineuse, tonique, positive. Prônant les rencontres, la mixité dans tous ses domaines, Zaz y chante la beauté du monde et sa confiance en l’humanité. Le texte joue beaucoup sur le name dropping.

2/ Comme ci, comme ça
Là, comme dans Je veux, Zaz revendique haut et fort sa liberté : « Je choisis d’être moi ». Sur une ambiance manouche, elle déclare ne vouloir en faire qu’à sa tête, faisant entièrement confiance à la « petite voix qui la pousse »

3/ Gamine
Signée Mickaël Furnon (Mickey 3D) cette chanson évoque les affres de l’amour, mais énoncées d’une voix presque neutre, sur un ton badin. Tout en affectant l’indifférence, elle profère néanmoins quelques menaces. Réactions classiques de la part d’une fille amoureuse qui a peur…

4/ T’attends quoi
Chanson-message : il y a urgence à préserver notre monde. Cri d’alarme, ode à la nature, inquiétude devant une Terre que l’homme envoie à sa perte. Le sujet est vraiment bien traité.

5/ La lessive
Le thème évoqué dans ce titre rejoint On ira. Hommage à l’humanité, beauté des êtres, aptitude à ne retenir que les « moments de grâce » que représentent les belles rencontres. Tout cela est psalmodié en alexandrins, la voix très devant, avec juste une guitare. C’est osé mais parfaitement réussi. Très beau titre !

6/ J’ai tant escamoté
Chanson réaliste à l’ancienne habillée par un joli accompagnement façon bastringue avec accordéon. La ritournelle entraînante contraste subtilement avec le constat mélancolique d’un texte qui exprime la lassitude du mensonge, des promesses non tenues. Superbe interprétation véhémente et suintante de sensibilité.

7/ Déterre
Voix murmurée, façon incantation. Tout en susurrant doucement « Fais du bruit », Zaz nous exhorte à nous réveiller, à nous prendre en main, à surmonter nos peurs et nos inhibitions, à exhumer nos « trésors enfouis »… Sa montée en puissance au fur et à mesure que la chanson avance est réellement impressionnante.

8/ Toujours
Chanson bucolique d’une fille très « nature », qui se veut libre en tout endroit et en toutes occasions, qui refuse de prendre la vie et de se prendre, elle, au sérieux. C’est l’hymne d’une Cosette devenue Gavroche.

9/ Si je perds
Cette chanson, carrément à part dans cet album, est dure à entendre. Elle traite avec une terrible lucidité de la vieillesse, de la fin de vie. Il serait tellement plus facile et confortable de se réfugier dans l’oubli que de supporter tous les désagréments de l’âge, de se sentir inutile, d’être un poids déjà mort pour les autres. Le dernier espoir, l’ultime secours serait donc de « perdre la mémoire »

10/ Si
Du pur jus de cet « Enfoiré » de Jean-Jacques Goldman ! Zaz chante a cappella pratiquement de bout en bout. C’est à peine si un piano intervient discrètement pour souligner la montée. C’est une chanson pleine d’envies, de partages, de rêves de solutions pour que le monde aille mieux. Mais on sent, en filigrane, que malgré toute la bonne volonté que l’on y met, il y a un réel aveu d’impuissance. Cette chanson, qu’elle sait utopique, Zaz la termine magistralement par une plainte.

11/ Oublie Loulou
C’est amusant car je n’ai vu qu’après l’avoir écoutée que Oublie Loulou était une chanson d’Aznavour. Moi, j’avais trouvé qu’elle ressemblait à du Trenet ! Marrant, non ?... Le débit est sur-vitaminé ; reposant sur les sonorités, le texte regorge d’onomatopées. C’est un funny song, jazzy, amusant, ludique, tonique, réjouissant. Et puis, quelle partie de violon !

12/ Cette journée
Encore un superbe texte. Exhalant énormément d’amour, il traite d’une relation forte et de la quête d’identité… A qui s’adresse-t-il ? A un père, un frère, un ami, un amant ? Je pencherais pour le premier, mais en fait, on s’en fout. Il n’y a que ce qui est dit et la manière de le dire qui compte.

13/ Nous debout
Chanson signée David McNeil et Ours sur un thème éternel et quelque peu éculé : vivre debout, se battre, ne pas se laisser enliser « même les pieds dans la boue ».  C’est, de loin, la chanson la plus faible de cet album. Elle est impersonnelle et elle n’apporte rien.

14/ La lune

Métaphore d’un pays imaginaire idéalisé auquel il faut bien donner un nom, alors on choisit la lune, tellement chargée en symboles. C’est une manière de fuir la réalité terrestre et les brûlures du soleil. C’est le refuge rêvé, une illusion. On voudrait y croire tout en ayant conscience qu’il s’agit d’une abstraction. C’est une bonne chanson de fin…

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Voix effroyable !