jeudi 10 septembre 2015

Ladies Night

Palais des Glaces
37, rue du Faubourg du Temple
75010 Paris
Tel : 01 42 02 27 17
Métro : République / Goncourt

Une comédie d’Anthony Mc Carten, Stephen Sinclair et Jacques Collard
Nouvelle adaptation d’Alain Helle
Mise en scène de Julien Tortora et Rachel Suissa
Chorégraphies de Mélanie Dahan
Lumières de Sébastien Lanoue
Costumes d’Anne-Sophie Lebocey
Avec Clara Morgane (Glenda), Christophe Canard (Gérard), Arnaud Cassano (Steph), Jacques Courtes (Bernie), Clément Naslin (Benoît), Vincent Piguet (Jacky), Philou (Wes), Jérémy Malaveau ou Julien Tortora (Manu)

L’histoire : Quand Manu a une idée derrière la tête, il ne lâche rien. Déterminé à retrouver la garde de son fils, il va réussir à motiver ses potes de comptoir pour créer… un spectacle de chippendales !
Leurs motivations : se sortir du chômage.
Leurs points faibles : leur physique et leur piètre talent de danseur.
Leurs points forts : l’humour et la solidarité.
Heureusement, sur leur chemin ils seront aidés par Glenda, ex-danseuse, qui les soutiendra et les mènera jusqu’au show final.
Véritable tableau de notre société, cette comédie délirante et émouvante prouve que rien n’est impossible si on a la force d’y croire.

Mon avis : C’est la troisième version de Ladies Night que je vois. J’avais découvert cette pièce il y a quinze ans, avec Olivier Marchal et Lisette Malidor, je l’ai revue en 2012, avec Linda Hardy et Bruno Sanches… Et bien cette nouvelle mouture est largement au niveau des deux précédentes et elle produit le même (fort) impact sur les spectateurs et, surtout, sur les spectatrices.
On connaît l’histoire. Elle a été le thème du film britannique The Full Monty, sorti en 1997, bardé de récompenses en Angleterre et aux Etats-Unis, et qui a connu un formidable succès à travers le monde. Ses six héros sont des naufragés de la vie. Le chômage les a plongés dans une misère sociale (marginalisation, désoeuvrement) et affective (problèmes de couple). Il ne leur reste comme point d’ancrage que leur amitié et le bar de Bernie où ils se retrouvent pour jouer aux fléchettes et boire des bières. Compagnons d’infortune ; ensemble ils se sentent un peu plus forts.
Une annonce parue dans un journal local va bouleverser leur morne existence en leur offrant un but, un projet. Bref, en leur donnant l’opportunité de rêver à nouveau. C’est Manu qui va être l’instigateur de ce challenge insensé. Manu, sans doute le plus paumé de la bande, qui fait n’importe quoi de sa vie, mais qui devient fou à l’idée de se voir déchu des droits sur son fils de 7 ans. Sa proposition de créer un spectacle de strip-tease va rencontrer un écho plutôt favorable chez ses compagnons, d’autant qu’il pourrait y avoir une belle recette à la clé. Qui dit argent, dit récupération de sa dignité et reconquête de sa compagne et de son enfant.


Il se dégage de cette pièce une profonde humanité. Ces six personnages, qui forment une sacrée brochette de bras cassés, vont en effet retrouver une énergie perdue en se lançant à fond dans une entreprise qui frise l’utopie. Qui dit six personnages, dit six caractères. Pour que ça sonne vrai, il faut que les comédiens soient le plus banals possibles, qu’ils nous ressemblent. Pour mener à bien leur folle aventure, ils ont vraiment beaucoup plus de handicaps que d’atouts. Certains ne sont plus très jeunes, d’autres ont des problèmes de poids, un autre n’est pas encore sorti des jupons de sa maman… Ce ne sont vraiment pas des apollons. C’est ce en quoi ils sont touchants.

Le casting est vraiment parfait. Ils sont tous des « right men at the right place ». Malgré tout, il y en a trois qui attirent un peu plus notre attention. Jérémy Malaveau qui, dans le rôle de Manu, apporte une certaine animalité. Il a touché le fond et le projet qu’il a imaginé le regonfle d’une sorte d’énergie du désespoir. Il est en outre extrêmement émouvant dans les séquences où son fils est en cause… Vincent Piguet incarne à la perfection Jacky, un rocker fan de Dick Rivers, un peu fruste, un peu narcissique, très caricatural, terriblement naïf et, forcément, attachant… Et puis il y a Clément Naslin. Son Benoît est le personnage qui provoque le plus d’éclats de rire. Pour l’interpréter, il a pris une voix de fausset, adopté une démarche étriquée ; c’est le petit poussin égaré dans une basse-cour. Cette aventure va, sans qu’il s’en doute, le révéler à lui-même, lui permettre d’exister par lui-même et de couper enfin le cordon ombilical…


J’insiste, tout le monde est bon dans cette pièce. Il faut y ajouter Jacques Courtes, le patron du bar qui sponsorise généreusement les futurs Metallo Boys et bien sûr Clara Morgane qui apporte tout son charme, son autorité et sa force de conviction pour que cette folle entreprise soit un succès.
Enfin, il faut souligner la place prépondérante que tiennent les épisodes dansés dans ce spectacle. Il est amusant de voit l’évolution de nos énergumènes dans cette discipline, de patauds et désordonnés qu’ils sont au début, jusqu’à un étourdissant bouquet final. Et là, chapeau au travail de la chorégraphe Mélanie Dahan !
Je dois avouer que, comme les deux fois précédentes, j’ai été parcouru de frissons au moment où nos Metallo Boys font leur entrée sur scène pour présenter leur show pour la première fois au public. Et, ce qui est également très plaisant à ce moment-là, c’est de voir et d’entendre les spectatrices participer au jeu en encourageant chaudement nos strip-teasers en herbe…


Gilbert « Critikator » Jouin

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