Fiction France – Polydor / Universal
Affublé du surnom de « farfadet » tout au long de
son épopée « nouvellestaresque », c’est en faune interstellaire que
Mathieu Saïkaly nous revient pour nous présenter son premier album, A Million Particles »…
Pour l’avoir suivi pendant l’émission et pour avoir eu le
plaisir de le découvrir sur une scène champêtre à Cachan, je savais à peu près
à quoi m’attendre de la part de ce jeune de 22 ans à la personnalité déjà très
affirmée. Pourtant, son opus m’a quand même surpris. Difficile d’imaginer une
œuvre plus personnelle. Mathieu ne ressemble à personne, tout au moins
artistiquement. Physiquement, peut-être en raison du sang libanais qui coule
dans ses veines, il présente une ressemblance avec Mika. Il a également en commun
avec lui son goût pour la musique pop, une excellente maîtrise de la langue
anglaise et un authentique cosmopolitisme. Or, dans
« cosmopolitisme », il y a « cosmos ». Comme dans le titre
de la deuxième chanson de son album où il l’associe au mot « cliché »
en forme de clin d’œil malicieux.
Il faut écouter plusieurs fois A Million Particles pour en savourer toute sa richesse et toutes
ses subtilités. Les qualificatifs qui s’imposent pour le décrire sont sobre,
aérien, élégant… Mathieu Saïkaly est un rêveur lucide. Il s’auto-flagelle
d’ailleurs carrément en évoquant ses « conneries de romantique ».
Romantique, il l’est certes, et il l’assume, mais il est capable d’observations
quasi cliniques alors qu’il devrait se trouver en plein lâcher prise amoureux
comme dans Poison (Berce du Caucase).
Il veut bien planer, mais tout en gardant le contrôle de sa dérive…
J’ai lu dans quelques articles à son propos revenir
fréquemment le terme « fragile » pour le définir. Mais quand on lit
attentivement les textes de ses chansons, je suis convaincu qu’il est loin de
l’être. Qu’il soit sensible et doux, c’est indéniable ; ça ne le rend pas
vulnérable pour autant. Dans Canvas,
on le sent même un tantinet compliqué, et dans Je t’ai cherchée, il est carrément obsessionnel. On peut même se
demander s’il n’est pas fasciné par les parts d’ombre ; les siennes et
celles des autres. De même, quand il se projette Dans l’espace, on sent paradoxalement poindre une sensation d’enfermement,
un vague sentiment d’insatisfaction. Difficile de trouver sa place quand il y
en a trop ? Bizarre… Il nourrit même une certaine méfiance vis-à-vis de l’amour.
Apparemment, c’est pour lui un jeu de hasard, la conséquence d’un coup de dés (From Glass To Ice). Ce qui n’interdit
pas, au contraire, de tendres moments de partage et de fraîcheur quand il le
vit comme dans le superbe duo Dans l’ombre
de mes pupilles qui se présente ; selon moi, comme la suite enchanteresse
de Pour Bubz.
Visiblement, l’écriture et la réalisation de son premier
album n’ont souffert d’aucune concession. A
Million Particles est 100% « Saïkalytatif ». Avec son grand
sourire angélique, il nous invite dans son univers à la douceur communicative.
Il y imprime sa marque, son identité, son sceau. Son truc à lui, c’est tout simplement
guitare sèche et voix. Bien sûr, tout en s’en tenant au plus grand dépouillement,
il ajoute ce qu’il faut de vaporeux et de céleste en saupoudrant un peu de
cordes et de chœurs par ci, par là… L’écriture est soignée, imprégnée d’une
recherche évidente de jolies sonorités.
En conclusion, A
Million Particles est un album très personnel, original, envoûtant. Je
pense qu’il prendra toute son intensité lorsque Mathieu Saïkaly le présentera
sur scène. Son espace à lui, c’est là qu’il se tient, c’est là qu’il va prendre
son envol et sa réalité. Car il est incontestablement déjà un artiste à part, à
particules. A particules mystérieuses et féériques.
Mathieu Saïkaly se produira au Café de la Danse le 5 octobre.
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