Théâtre Clavel
3, rue Clavel
75019 Paris
Tel : 01 42 38 22 58
Métro : Pyrénées
Ecrit et mis en scène par Julien
Romano
Avec Julien Romano, Jonathan
Bruzat, Karen Peyrard
Présentation : Inspirée d’une histoire vraie qui pourrait
l’être…
L’ImpassE relate un fait divers mettant en scène deux frères et une femme que tout oppose mais que le destin a décidé de réunir pour la seconde fois de leur vie.
L’ImpassE relate un fait divers mettant en scène deux frères et une femme que tout oppose mais que le destin a décidé de réunir pour la seconde fois de leur vie.
Manque d’amour, fautes inavouées,
destins bousculés…
Entre maladresse,
incompréhension, rancunes, violence et désarroi, cette pièce est une invitation
à la remise en question.
La remise en question de nos
valeurs, de ce que nous sommes.
Surtout, elle nous fait nous
poser une question essentielle : « Ce qui nous arrive est-il écrit
d’avance, ou est-ce que nos choix peuvent changer nos vies ? »
Mon avis : âpre, brutal, tendu, étouffant… Ce sont les
qualificatifs qui s’imposaient à moi au fur et à mesure que cette pièce se
déroulait. On ressort du théâtre Clavel les muscles endoloris par la crispation
et l’esprit un tantinet perturbé. Mais aussi avec la forte impression d’avoir
assisté à quelque chose de fort, qui donne à réfléchir et, aussi, à une sacrée
performance d’acteurs.
Un square, des feuilles mortes
qui jonchent le sol, deux de ces banals bancs verts, un lampadaire suranné, une
poubelle, une corbeille à papiers et une palette abandonnée… Le décor, on ne
peut plus anonyme, est planté. Un de ces bancs est occupé par une jeune femme
enceinte plongée dans la lecture d’un livre. Perché sur le dossier du second, un
jeune homme passablement énervé grille une clope. Dès l’arrivée du troisième
protagoniste, tout va soudainement s’accélérer.
On comprend très vite que ces deux garçons sont deux frères, que nous sommes témoins de leurs retrouvailles après dix années passées en prison par l’aîné. Mais on constate aussi très vite que ce sont deux êtres frustres, deux laissés pour compte par la société, deux écorchés vifs qui, dès qu’ils ne trouvent pas les mots pour s’expliquer, n’ont pour seul échange que les coups… L’aîné est une grenade dégoupillée. Lorsque sa violence explose, spectaculaire, disproportionnée, elle est incontrôlable. Et comme le cadet n’est pas en reste dans ce domaine, les provocations et les pugilats se multiplient… Tout cela, en la présence de la jeune femme, de plus en plus inquiète, de plus en plus terrorisée. Mais pourquoi ne s’enfuit-elle pas, se demande-t-on ? Il doit y avoir une raison...
La tension ne cesse de grimper. Le
climat est de plus en plus oppressant. Nous sommes en présence de deux bêtes
sauvages. Leur engagement physique est total, extrême. Les mots sont crus,
injurieux… Après une courte plage de calme durant laquelle la jeune femme,
profitant de l’absence du cadet, tente d’apaiser l’aîné en instaurant un
dialogue à la fois idéaliste et moralisateur, la violence reprend ses droits,
implacable, inéluctable, jusqu’à, évidemment, l’irréparable et l’indicible.
Soudain, alors que l’horreur est à son paroxysme, la mise en scène se fait
toute en esthétique, avec recours au ralenti et soutien de la douce mélopée de ce
superbe gospel traditionnel qu’est In His
hands. Magnifique trouvaille permettant d’édulcorer ce qu’on n’a pas envie
de voir. Mais qu’on voit quand même…
Impasse, perd et manque… Le titre de la pièce ne cesse de nous hanter. L’intrigue va donc inévitablement finir dans un cul-de-sac, atteindre ce fameux point de non-retour ? Et bien oui ! Ou non… Y aurait-il une toute petite ouverture salvatrice tout au fond de cette impasse ? C’est là qu’intervient le problème du choix. Cette pièce hyperréaliste traite des injustices de la vie, de ses inégalités. Les cartes étant distribuées, n’y a-t-il aucune solution, aucun moyen pour en changer la donne ? Il y a un message dans cette œuvre radicale. Le manque d’amour est générateur de désespérance, de souffrance et, partant, de violence. Or, c’est la femme, la mère d’abord, puis la compagne, qui est la matrice de cet amour. C’est à travers elle que peut intervenir la rédemption.
L’ImpassE ne dure qu’une heure. Heureusement tant elle est
éprouvante. Si elle est aussi à conseiller c’est pour l’investissement total, l’engagement
physique impressionnant de deux comédiens qui ne font pas dans la demi-mesure.
On les sent véritablement impliqués, habités par une « fureur de vivre »
(coucou James Dean !). Or, en fait, ces deux petites frappes ainsi que la
jeune femme, sont des êtres angoissés par la peur de l’avenir. Et la peur n’est
jamais bonne conseillère. Et où est Dieu dans tout cela ?
On n’en sort pas indemne ;
on se sent le cœur un tantinet cabossé, mais… Mais, outre la certitude d’avoir
assisté à un intense moment de théâtre et de jeu, on se dit qu’il serait
peut-être bon de faire un peu plus attention à son prochain et d’en prendre
soin. Refusant l’impasse, la main passe. Et elle se tend vers l’Autre d’autant
plus facilement qu’on y met son cœur dessus.
Gilbert « Critikator »
Jouin
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire